« Ubu Roi d’Alfred Jarry, interprété par Judith Magre et Michel Aumont » par Lire

Quelque temps après la création d’Ubu roi en 1896, le président du Conseil fut traité de père Ubu. Cette apostrophe valait bien tous les commentaires savants sur l’écriture de la transgression auxquels la pièce, par la suite, donnerait lieu. Le « merdre » retentissant du père Ubu sur lequel se lève le rideau n’en finit pas en effet d’éclabousser le monde et de faire écho à ce flot même, substance dont Flaubert disait qu’il battait le pied de sa tour d’ivoire. Le pouvoir a toujours suscité la critique. Ici, la pièce n’en dénonce pas seulement l’arbitraire et la violence. Elle s’en  prend avant tout à sa vulgarité et à sa bêtise. Ubu n’est pas l’intransigeant Créon. Il est ce qui l’attend. Inéluctablement. Ou plutôt, ce qui le travaille déjà, insidieusement. Il fallait deux acteurs chevronnés comme Michel Aumont et Judith Magre pour incarner père et mère Ubu, ce couple royal de pantins. Car l’excès aussi se joue de justesse ! Jérôme SERRI – LIRE