« La meilleur période de Lightnin’ Hopkins » par Blues&Co

Nouvelle anthologie double CD que nous propose Patrick Frémeaux et son staff de passionnés, consacré cette fois à monsieur Lightin’ Hopkins, certainement le plus grand créateur et le plus grand innovateur de toute l’histoire du Texas bleus. Né à Centerville Texas en 1912, le jeune Sam «Ligntin’» Hopkins va très vite tomber dans la marmite du blues à l’écoute du légendaire Blind Lemon Jefferson. Indéniablement, il va être l’un des premiers bluesmen à utiliser la guitare électrique dans un style country blues texan sans fioritures à l’humour corrosif, et à fortes connotations hispaniques. Son jeu parcimonieux, à la fois lourd et subtile, et sa voix profonde et expressive font des ravages. Ses énormes capacités d’auteur compositeur autobiographique relatant les déboires de la vie au quotidien, à l’instar d’un Benoît Blue Boy en France, et même de nombreux textes tournant autour du sexe à ne pas mettre entre toutes les chastes oreilles, le propulseront aux sommets d’une popularité amplement méritée, chez les ouvriers noirs de son Etat, ainsi que de la Californie. Cette anthologie regroupe 36 titres compris entre 1946 et 1952, certainement la meilleur période de Lightnin’ Hopkins, prolifique en succès comme notamment le titre « Short Haired Woman », qui lui feront gagner beaucoup de dollars, hélas pour lui aussi vite dépensés que gagnés dans le poker ou l’alcool. Moult chefs-d’œuvre sont entrés dans la postérité par la grande porte : « Katia Mae Blus », « Let Me Fly Your Kite », « Papa Bones Boogy » et tant d’autres. Tous les titres ici présentés sont majoritairement enregistrés à Houston Texas, soit en solo, ou soit avec l’apport entre autres de Frankie Lee Sims à la guitare, ou de Don Cooks à la basse. Son talent et son style électrique et moderne, arriveront jusqu’aux oreilles de nombreux bluesmen, et auront une influence énorme sur leurs carrières naissantes : Lightnin’ Slim en Louisiane, Jonnhy Fuller, Phillip Walker en Californie. Cependant, dès 1953, son public va le lâcher au profit d’un blues plus sophistiqué et plus « politiquement correct » comme celui distillé par T-Bone Walker et toute la scène de la West Coast de L.A. De galères en périodes de spleen , pendant de longues années, lightnin’ ne subsistera que grâce à de petits gigs dans les bouges de Houston, avant qu’un certain Sam Charters, musicologue de profession, et la mode du blues revival le ressuscitent. D’ailleurs, Muddy Waters en personne n’a jamais tarit d’éloges à son égard, en le qualifiant de bluesman ensorceleur avec sa guitare, qui empêche de faire quoi que ce soit d’autre que de l’écouter pendant des jours. Une fois de plus, c’est une somptueuse compil’ concoctée par la maison Frémeaux et Associés qui ne prend pas l’auditeur (ou le consommateur) pour un crétin. Les premières œuvres majeures de la magnifique carrière de Lightnin’ Hopkins ici proposées sont indispensables. Mais ai-je besoin de la préciser ? Serge SCIBOZ - BLUES&CO