« Raphaël Faÿs nous enchante par sa fougue créatrice » par Les Dernières nouvelles du jazz

« Après « Andalucia » en 2006 et « Extremadura » 2009, le guitariste Raphaël Faÿs, habituellement assimilé à la Musique manouche, consacre un troisième opus au flamenco. « Mi Camino Con El Flamenco » se révèle être un florilège de toutes les formes de danse flamenca, allant de Bulérias en Fandangos, se dandinant au passage sur diverses Rumbas. La passion que voue ce guitariste à ce style de Musique est immense, en témoigne sa filiation directe avec des artistes incontournables comme Paco De Lucia, et nous pouvons en entendre quelques exemples probants dans les titres Rio Ancho ou Maestro Paco. Nous pourrions d’ailleurs, maladroitement peut être, y trouver une certaine ressemblance avec le disque culte « Friday Night in San Francisco » où évolue trois magiciens de la guitare Jazz et Flamenca (Al Di Meola, Paco De Lucia et John McLaughlin). Ici, la richesse mélodique des compositions tient une part énorme dans le déroulement de cette œuvre magistrale où fantaisie et lyrisme ne font qu’un. Le flamenco, cette lumineuse envolée populaire réunissant plusieurs cultures, ibériques et orientales (Luna De Fuego), à jamais destinée à nous faire ressentir les émotions les plus fortes. Il existe dans ce disque plusieurs façons de succomber à ce lyrisme incommensurable, avec tout d’abord une technique instrumentale irréprochable, à la fois ancrée dans la tradition et orientée vers l’expérimentation, apte à retranscrire à la perfection un paysage d’Andalousie. L’improvisation y est quant à elle virevoltante, avec de fortes influences Jazz manouche en ce qui concerne les phrasés du violon et de la contrebasse. Mais c’est par la suite qu’une voix rocailleuse et emplie d’émotion vous transporte au-delà des frontières de l’Histoire de cette culture flamenca, comme une complainte envahie par le chagrin (Para Mi Compadres). Le temps s’arrête l’espace de son chant. Du côté de la guitare de Raphaël, on ne peut qu’être conquis par l’expressivité d’un jeu où rien n’est en trop, étant en permanence au service de l’ornementation d’un discours mélodique toujours audacieux. Distillant leurs milliers de notes, ces guitares ont le talent de pénétrer dans nos cœurs par le biais de nos oreilles, séduites en quelques secondes. Aussi, il serait non négligeable de rappeler que Raphaël Faÿs est l’un des rares guitaristes à utiliser un médiator dans ce style de Musique. La surprise finale arrive discrètement au détour de la dernière composition, Fantasia Romantica, où les cordes frottées enrobent délicatement le thème principal, tel un dernier au-revoir, au comble du romantisme. Raphaël Faÿs nous enchante par sa fougue créatrice et son goût immense pour la simple beauté de cette Musique du sud. Il nous laisse imaginer à travers ce disque quel moment mémorable il est possible de vivre en compagnie de ces danseurs et musiciens sur scène. »
Par Tristan LORIAUT – LES DERNIERES NOUVELLES DU JAZZ