« Une majesté sereine » par Jazzmag-Jazzman

Cette livraison regroupe huit titres de 1958 gravés avant et après le passage de Mahalia au Newport Jazz Festival (dont les interprétations live ou réenregistrées en studio étaient incluses dans le précédent volume de cette intégrale) et neuf issue de deux séances du début 1959. C’est une période où la chanteuse, devenue « la » référence d’un public blanc et international en matière de gospel, n’en garde pas moins une forte assise dans sa communauté d’origine : à cet égard, Jean Buzelin relève dans son livret que des thèmes aussi différents que For My Good Fortune, au traitement proche du rhythm & blues, et le traditionnel Elijah’s Rock furent publiés en 45-tours à destination des acheteurs noirs. Le clou de ce volume est censé être la version de Trouble of the World que donne Mahalia dans le film Imitation of Life (Le Mirage de la Vie) de Douglas Sirk. Si sa beauté demeure ici, elle est toutefois plus marquante dans la continuité narrative du film qu’isolée sur disque, où la chanteuse l’avait déjà fixé deux ans plus tôt. Les sommets du recueil me semblent être le spiritual He’s Got the Whole World in His Hands, le très pur I Found the Answer, où aucun chœur daté n’incite Mahalia à la surenchère comme c’est ailleurs le cas, et Just to Behold His Face, composition de Lucie E. Campbell traitée avec une majesté sereine. Côté accompagnateurs, la fidèle et incomparable Mildred Falls n’est présente au piano que dans la seconde moitié de l’ensemble, mais plusieurs groupes de jazzmen (Robert Banks, Wally Richardson, Jimmy Raney, Panama Francis, Osie Johnson) fournissent des écrins ajustés à la voix qu’ils servent. On ne peut en dire autant de certains choristes. Philippe BAS-RABERIN – JAZZMAG-JAZZMAN