D’une modernité sans âge, d’une universalité à l’état brut par Les Inrockuptibles

« Country & Western. “Si le cowboy avait eu dans son enfance une belle voix, il l’aurait en tout cas perdue à hurler après les troupeaux.” D’après cet adage, cette compilation de ballades et chansons de vachers pourrait se confondre avec des bêlements de binious ancestraux, avec de laborieux marmonnements archaïques. Les compositions se révèlent pourtant ici d’une modernité sans âge, d’une universalité à l’état brut. La plupart de ces ballades puisent dans les airs du folklore irlandais, passés dans le domaine public, avec des improvisations vocales héritées du yodle, pour des histoires de saloon, de whisky frelaté, de duel au pistolet, d’agilité au lasso, de vaches pansées, de squaws scalpées… Buffalo Bill ou Calamity Jane gagnaient ainsi leur vie l’hiver en interprétant leurs aventures estivales. En 1925, le label Victor décide de graver ce type de ballades en 78t – dont l’impeccable Whooper-Ti-Yi-Yo –, enregistrant d’authentiques cowboys comme Jules Verne Allen ( !). Quatre ans plus tard, l’avènement du cinéma parlant s’accompagne d’un énorme engouement pour le “western chantant”, imposant au public américain des vedettes comme Gene Autry, Roy Rogers ou Tex Ritter. Avec les chansons de ces acteurs, c’est tout un pan de la musique country qui a été renouvelé, d’une manière aussi épidermique et néophyte que talentueuse et truculente. Le monde des cowboys se retrouve finalement dépeint d’une façon plus réaliste – beaucoup de spleen pèse dans ces chansons – que cador. Aujourd’hui, ce n’est sûrement pas du côté du routier Garth Brook qu’on retrouvera ce son ; plutôt chez les Palace Brothers, ou même chez Beck, dans le rôle du nouveau Billy the Kid. » Benoît Sabatier – Les Inrockuptibles