« Des trésors oubliés » par Trad Magazine

Didier Roussin avait créé la collection « Accordéon » chez Frémeaux au début des années 1990. Hélas, il n’eut le temps de publier que quelques volumes, le crabe l’emportant en 1996 à l’âge de 47 ans. Après une longue interruption (Didier était le plus grand connaisseur de cette musique), un volume 3 conçu par Dany Lallemand parut assez récemment, couvrant la décennie 1944-1954. Le volume 4, dédié à Didier Roussin, revient sur plusieurs décennies, avec une sélection exemplaire de trente-six titres. Il y a le style musette parisien dans toutes ses déclinaisons : trio accordéon-banjo-jâse, formations plus étoffées avec instruments inhabituels (jazzo-flute, xylophone) et assez fréquemment refrains chantés fleurant bon le Paris populaire (C’est la java de Robert Trognée et son orchestre). Il y a aussi le swing musette de Gus Viseur (Qu’en pensez-vous ? avec l’orchestre Swing Royal, 1940), Emile Carrara (l’excellent 720 In The Books, fox-trot gravé en 1941), Tony Murena (le merveilleux Pacific, propulsé par les guitares des Ferret) ou Jo Privat (belle version boléro swing de Besame mucho en 1945 avec piano, clarinette et guitare, peut-être Didi Duprat ?). L’âge d’or de l’accordéon est représenté par Emile Vacher (Cajoleuse, remarquable valse enregistrée en 1929), Charles Péguri (Mignonette, jolie valse en solo de 1925), Fredo Gardoni (immense vedette ayant enregistrée en 1929), Charles Peguri (Mignonette, joli valse en solo de 1925), Fredo Gardoni (immense vedette ayant enregistré des centaines de titres, ici en 1929 avec Mon petit, version française de Sonny Boy avec refrain chanté par Leroy, Puig au banjo et Baiz au jazzoflute) ou Momboisse ( sa version instrumentale de J’ai deux amours de 1931 avec les fameux Latorre et Belliard au banjo). Une musique certes faite pour la danse (java, valse, fox-trot) mais qui s’écoute aussi : Dalirette, mazurka de Médard Ferrero en duo avec Gus Viseur, le méconnu Mazalda (1948) de ce dernier ou le magnifique Voulta (1930) de Marceau. Si plusieurs de ces titres ont déjà été publiés ici ou là, la présente sélection nous donne l’occasion de (re)découvrir quelques grands artistes, des trésors oubliés comme Juju-Java par l’orchestre Gigetto (Costoncelli) en 1929, La libournaise (1931) par l’ensemble de René Leroux, Java d’amour par le duo Aris & Ricci (1933), Léon Raiter et l’orchestre montmartrois (six musiciens dont l’accordéoniste Albert Huard et le guitariste Alex Manara), les Vagabonds mélomanes, l’orchestre de Marcel Groffe (1933) avec violon, saxo et jâse ou celui du saxo Paul Romby (la jolie version très Primitifs du Futur avant la lettre de La valse chinoise). Du vrai et bon musette à l’ancienne, comme Dédé Roussin l’adorait. Outre le fait que toutes les références  de leur catalogue sont toujours disponibles, l’avantage des anthologies Frémeaux réside dans le sérieux de leur réalisation. Le livret bilingue de trente pages, illustré de photos et documents, présente le style et son contexte, détaillant le parcours des artistes. La discographies mentionne les titres, compositeurs, dates d’enregistrement et références. A quand une intégrale swing de Viseur et Murena ? Francis COUVREUX – TRAD MAGAZINE