« Frankly Speaking » par Jazz Magazine

Joli CD, cet « Ellington Moods » publié par Patrick Frémeaux (FA433). Onze pianistes ont composé des thèmes à la saveur elligtonnienne et accompagnement Claude Tissendier. […] Claude Bolling, lui, s’est beaucoup produit ces derniers temps avec son grand orchestre à l’occasion du centième anniversaire de la naissance d’Ellington. Son nouveau cd, « A Tone Parallel to Harlem » (Frémeaux  FA499), rassemble des enregistrements de 1999 (9 plages sur 15), 914 et 78 et permet d’apprécier à quel point Claude et ses musiciens ont su s’imprégner non seulement du son mais de l’esprit du grand Washingtonien. A noter les chaleureuses interventions vocales de Marc Thomas et Maud. On croyait Adélaide Hall inimitable dans Creole Love Call : il faut réviser ce jugement, démarche qui est d’ailleurs, philosophiquement parlant, toujours intelligente. Quant à l’interprétation par Thomas et Pierre Schirrer (ts) d’It don’t mean a thing, elle prouve que le travail de Bolling est loin de se limiter à la simple relecture – sans vouloir relancer un récent débat qui, de toute manière, ne sera jamais clos. […] Pardonnez-moi de conclure pour un souvenir personnel. En 1940 - j’avais quatorze ans, - fasciné par Ellington, j’avais encadré une photo découpée dans un Jazz Hot d’avant guerre le représentant en parfais dandy de Harlem, smoking, gilet de satin, nœud papillon coquin. Tout pour séduire au Cotton Club. Ma mère, institutrice qui aimait jouer des valses de Strauss au violon, eut un choc en apercevant le portrait de mon idole à côté de mon lit : « Pourquoi affiches-tu dans ta chambre ce nègre ? » (On pouvait en ce temps-là utiliser ce terme sans risquer sa prison). Je répondis : « Parce que c’est merveilleux un musicien. Il joue du piano et dirige un grand orchestre ». Elle hocha la tête : « Ah si c’est un musicien… ». Pour la convaincre, je lui fit écouter Mood Indigo et Solitude : elle fut conquise. Elle n’était pas sotte ma maman. Frank TENOT – JAZZ MAGAZINE