« Grand faiseur d’histoires et joueur de mots devant l’Eternel » par Wordpress

« Disparu il y a déjà trente ans, Bernard Dimey a écrit pour les plus grands. Un coffret  Poésie et chansons 1959-1961 rend hommage à ce faiseur de mots et de poésie. “Moi j’étais fait pour écrire et j’ai poussé la mauvaise porte, celle de la facilité” aimait dire Bernard Dimey, devenu célèbre pour avoir écrit des textes de chansons pour les plus grands : de Jean Sablon à Yves Montand, en passant par Henri Salvador, Juliette Gréco ou encore Mouloudji. Que du lourd ! Mais, pour Dimey, la chanson n’était qu’une “bricole” et il s’est essayé à bien d’autres aventures artistiques. Des dialogues de cinéma d’abord : en 1963, il a ainsi signé les dialogues d’un film de Claude Autant-Lara, Le Magot de Josépha. Il est aussi l’auteur du livret d’une comédie musicale, Un métier en or, où figurait Philippe Noiret, sur une musique signée Jean-Michel Defaye, qui fut l’un des grands orchestrateurs d’un certain… Léo Ferré. Suite à une embrouille avec la directrice de l’Alhambra, ladite comédie sera retirée de l’affiche rapidement. Bernard Dimey fit bien d’autres choses encore comme écrire un recueil de nouvelles humoristiques ou signer des poèmes accompagnant une exposition de tableaux de Jordi Bonas, peintre expressionniste catalan. L’homme était doté d’une folle inspiration. J’ai le souvenir de confidences d’Henri Salvador racontant comment ils avaient écrit le futur tube Syracuse, en se lançant un défi : “Bernard devait terminer les paroles avant que je finisse la mélodie. Il a gagné.” Une chanson d’autant plus étonnante que ni Salvador, ni Dimey n’avaient jamais mis les pieds dans la ville sicilienne ! En fait, Bernard Dimey était avant tout un poète, qui aborda sur bien des rivages et mena une vie excessive en tout. Au départ de son épouse Lily Landry, en 1967, alors que le fisc lui tombe sur le dos, Bernard Dimey plonge sec et, pour subsister, se produit dans des cabarets. Avec sa tête de statue grecque, sa voix forte et sa barbe en broussaille, Dimey a marqué bien des tréteaux, incarnant la figure du poète de Montmartre, mais une Butte authentique, celle qui vit dans le souvenir des Communards. Et non celle des touristes en goguette. “Je ne dirai pas tout / J’ai le sang plein d’alcool d’un alcool de colère /Et je vais achever ma vie dans un bocal / comme un poisson Chinois” : ces vers résument bien l’univers de Bernard Dimey, poète du pessimisme gai. De lui, Mouloudji a dit : “C’est un tragique qui ne se prenait pas au sérieux. ” Un interprète que l’on retrouve dans le beau coffret regroupant les premiers interprètes de Dimey. Il faut écouter Jean Ferrat dans La Cervelle, Aznavour dans L’Amour et la Guerre, Zizi Jeanmaire dans Le Nougat pour retrouver la griffe de Bernard Dimey, ce grand faiseur d’histoires et joueur de mots devant l’Eternel. Une œuvre à écouter »
Par François CARDINALI - WORDPRESS