« La pérennité de la mémoire » par Livres Hebdo

L’édition en sciences humaines est une entreprise de longue durée, mais l’avantage de cette sereine lenteur, c’est qu’elle entretient la pérennité de la mémoire. En l’occurrence, celle de Michel Prigent, ancien p-dg et directeur éditorial des Presses universitaires de France, décédé en mai 2011, dont un des projets se concrétise le 13 mars, avec les deux premiers volumes d’une Histoire personnelle de la France qui en comptera sept. «C’était un partenariat imaginé avec Patrick et Claude Frémeaux, qui voulaient mettre la parole des professeurs d’histoire à la portée du plus grand nombre, y compris de ceux qui peuvent avoir des difficultés à lire», explique Claude Gauvard. Cette grande spécialiste de l’histoire médiévale, professeure émérite à l’Université Paris-I Panthéon-Sorbonne, est la directrice aux Puf de la collection «Le nœud gordien», et est chargée de conduire cette entreprise (…). Bruno Dumézil, l’auteur du premier titre Des Gaulois aux Carolingiens , «a ainsi réévalué l’influences de Barbares par rapport aux Romains, et bien analysé les syncrétismes des civilisations antérieures», souligne Claude Gauvard. Elle a pour sa part synthétisé ses travaux sur les nouvelles façons de gouverner qui se mettent en place à la fin de la dynastie capétienne, tout en ferraillant toujours contre le mythe de soi-disant rois maudits, «un fantasme bon pour l’édition et la télévision». En tant que directrice de la série, il lui incombait de choisir les auteurs, naturellement à partir des multiples postes d’observation de monde universitaire dont elle dispose, notamment à la direction de La Revue historique avec Jean-François Sirinelli – un spécialiste de l’histoire contemporaine qui s’est évidemment chargé de La France du XXe siècle, à paraître l’an prochain. Ancienne présidente du jury d’agrégation d’histoire, Claude Gauvard n’avait pas manqué de repérer Bruno Dumezil, major de sa promotion. Jean-marie Le Gall, spécialiste de l’histoire religieuse des XVIe et XVIIe siècles, enseignant à Paris I et membre de la revue historique, s’est naturellement imposé pour le quatrième tome, De la Renaissance à Louis XIV. «Pour le XVIIIe, il fallait inclure la Révolution et tenir dans un unique volume. Seul un professeur de classes préparatoires sait tenir une telles synthèse», a tranché la médiéviste, confiant la tâche à Olivier Coquart, enseignant à Henri-IV. Et pour La France du XIXe siècle, elle est allée chercher Emmanuel Fureix, auteur auparavant de La France des larmes, une histoire «remarquable» de la société de la première moitié du siècle à travers ses grands deuils nationaux (…). Hervé HUGUENY – LIVRES HEBDO