« Le charme du swing musette à la parisienne » Par On Mag

« Cette rencontre à Paris est celle deux artistes, et je pèse mes mots, plus les autres qui les accompagnent. Artistes au vrai sens du terme, ceux qui, pour reprendre une formule excellente, vivent non pas de l’art, mais pour l’art. Raul Barboza, tout d’abord, l’accordéoniste argentin le plus parisien, venu en France faire connaître le chamamé de son Argentine du nord-est, sa polka de Corrientes, dont il est aujourd’hui, non pas l’ambassadeur comme on le dit, mais bien le Pape. Son chamamé, danse joyeuse et gaie, mais musique d’un peuple nié, vaincu, humilié, est également triste. C’est la tristesse joyeuse des Guaranis mélangée à la joie triste des vainqueurs espagnols. Inimitable. L’autre, Daniel Colin, accordéoniste-bandonéoniste, l’un des rares qui swinguent vraiment, c’est l’artiste par définition, le seul capable, pour se rendre en voiture d’Ivry, où il réside, à la commune limitrophe (en gros, trois rues) de se retrouver à trente kilomètres et de vous téléphoner pour vous demander où il est (expérience vécue). Tout ça parce qu’il avait un air en tête et qu’il composait en roulant. Et autour d’eux, d’autres artistes : Claire Elzière et son pianiste historique, Gregory Veux. Elle chante des chansons parisiennes (« A Paris dans chaque faubourg », «Il pleut sur la route », « La Vie » « Accordéon » ou « Pigalle»), comme il faut les chanter, sans effet de voix, simplement. Mais aussi Dominique Cravic et quelques-uns des Primitifs du Futur (Bertrand Auger, Laurent Larcher, Jean-Michel Davis). Dominique Cravic (qui joue avec talent le crouneur) est davantage qu’un artiste, c’est un poète. Et quel guitariste ! Bref, tout ce petit monde nous a mijoté un CD-rencontre où se conjuguent le swing de Daniel Colin, le charme du swing musette à la parisienne de Claire Elzière, la fougue mélancolique de Raul Barboza, l’attendrissement nostalgique de Dominique Cravic, bref, un CD qui aurait enchanté un Patrick Saussois, qui nous manque plus que jamais. Car, à lui aussi, c’était son monde. Et c’est le nôtre. »
Par Michel BEDIN – ON MAG