« Le goût de l’éternité » par Le Monde de la Musique

On réédite aujourd’hui n’importe quoi et l’on égare l’acheteur sous des tonnes de doublons. Ici, c’est tout le contraire. Didier Roussin (« compositeur ») et Daniel Nevers (« Spécial Gus Viseur ») se sont concertés avant de nous livrer ces faces qui n’avaient pas vu le jour depuis des décénnies : le premier, historien du musette, a privilégié les valses ; Daniel Nevers, historien du jazz français, a privilégié le swing. Chacun a légèrement empiété sur le territoire de l’autre pour varier le propos mais en évitant les doublons. Avec Roussin on découvre l’accordéoniste des bals musette affinant le langage de la valse au contact des guitaristes manouches jusqu’à l’avènement de la valse swing. Dans cette nouvelle collection  « Compositions » consacrée au musette (voir notre chronique du Joseph Colombo en page 104 du Monde de la Musique), c’est le compositeur qui est mis en avant (d’où la présence d’interprétations de Tony Murena et des frères Colombo). Daniel Nevers avait déjà publié la compilation « Accordéon Swing » (Jazztime/EMI). Il nous propose ici un Gus Viseur dévoyé par ses amis jazzmen (les Ferret, Oscar Aleman, Philippe Brun), s’adonnant aux plaisir de l’improvisation et mêlant originaux et standards swing. A cette accordéon swing un rien sautillant, j’aurais tendance à préférer l’envolée étourdissante des valses, ouverte chez Viseur à tous les imprévus. Elles ont le goût de l’éternité là où ses swings n’ont que le délicieux parfum de l’histoire et de la nostalgie. Franck BERGEROT - LE MONDE LA MUSIQUE