« Nous redécouvrons les multiples facettes de l’art de ce génie » par Le journal de l’Ile

Plonger à nouveau dans le musique de Charlie Parker un demi-siècle après sa disparition : c’est le bain le plus revigorant que je vous souhaite en cette année nouvelle. Les éditions Frémeaux vous y convient en publiant un double album consacré à celui que l’on appelait « The Bird » entendez l’oiseau. Il est vrai que Parker a donné de nouvelles ailes au jazz notamment dans le domaine de l’harmonie aux limites de l’atonalité. À travers trente-trois titres gravés entre décembre 1947 et février 1954, soit un an avant sa mort, nous redécouvrons les multiples facettes de l’art de ce génie de l’improvisation marqué par l’enchaînement de vertigineuses ascensions et de chutes brutales, de courtes phrases ponctuées de silence suivi de scintillantes gerbes de notes portées par une sonorité acide et dense à la coloration ascétique dans un climat de tension dramatique parfois tragique. Qu’il  joue aux côtés de Miles Davis, Dizzie Gillespie, Fats Navaro, Max Roach ou Kenny Clarke, en quartet ou en quintet, au sein de formations à cordes ou avec le big band de Stan Kenton dont il fut l’invité quelques mois avant sa disparition, Charlie Parker le virtuose s’envole toujours au-dessus de la mêlée. Parmi tous les enregistrements inédits du Bird que présente cette sélection nous retiendrons une surprenante jam session de treize minutes baptisée « funky blues » dans laquelle Parker plâne entre Jonny Hodges et Benny Carter, les deux autres maîtres de l’alto, soutenus par le trio d’Oscar Peterson. Part belle est faite à ses retrouvailles inattendues entre géants du be bop à Toronto en mai 1953 qui nous valent seize minutes de jazz intense entretenues par Dizzy, Bud Powell, Mingus et Max Roach. Mais la palme revient à « Parker’s Mood » l’interprétation la plus émouvante du blues de Charlie Parker enregistrée en 1948 aux côtés d’un Miles de vingt deux ans. Le blues : un genre que le Bird maîtrise à la perfection pour l’avoir appris à Kansas City, la ville où il naquit et grandit à l’ombre de Count Basie et des big band de l’époque swing. LE JOURNAL DE L’ILE