« Un enthousiasme intact » par Le Salon littéraire

« L’âge d’or des grandes formations fut assurément ce qu’on appelé la Swing Era, cette décennie qui, à partir de 1935 (approximativement car il est malaisé de lui assigner une date de naissance précise), vit fleurir des orchestres dont la fonction principale était de jouer pour la danse. Rien de péjoratif dans ce détail : longtemps celle-ci a été étroitement associée à la musique de jazz et pas plus les musiciens que les amateurs n’y trouvaient à redire. D’autant qu’une stimulation réciproque résultait souvent d’une rencontre dont tiraient avantage ces deux arts complémentaires. Parmi les orchestres les plus réputés de l’époque, celui de Count Basie. Sa longévité, en dépit de quelques éclipses liées aux aléas des conditions économiques, atteste de sa qualité constante. Ainsi, la valeur de ses solistes, le talent de ses arrangeurs, le son d’ensemble de cette machine à swing à la fois puissante et raffinée ont-ils traversé les années avec un succès intact. Un coffret de deux disques vient opportunément le rappeler. Il regroupe les extraits de trois concerts parisiens donnés à l’initiative de Frank Ténot, Daniel Filipacchi et Norman Granz, en 1957, 1960 et 1962. L’orchestre compte alors des musiciens de la trempe de Thad Jones et Joe Newman (trompette), Al Grey et Quentin Jackson (trombone), Frank Wess, Frank Foster, Eddie « Lockjaw » Davis, Eric Dixon (anches). Quant à la rythmique, outre Basie dirigeant l’orchestre depuis son piano, et l’irremplaçable Freddie Green à la guitare, elle prend, avec Eddie Jones (contrebasse) et le batteur Sonny Payne, une part prépondérante à la pulsation caractéristique de l’ensemble. Quelques-uns des succès les plus représentatifs de cette grande formation, One O’Clock Jump, The Kid From Redbank, Shiny Stockings et autre Jumpin’ At The Woodside ou April In Paris sont revisités avec un enthousiasme intact. Et si les conditions d’enregistrement en direct ne sont pas idéales, la prééminence de la batterie nuisant parfois à l’équilibre d’ensemble, ce défaut mineur est largement compensé par l’impression de vie intense qui se dégage de ce double album. »
Par Jacques ABOUCAYA - LE SALON LITTERAIRE