« Un ovni musical unique en son genre » par Le Bulletin du Hot Club de France

Le jazz connaît quelques principes directeurs, devenus proverbiaux et, naturellement, porteurs de musique : le « It don’t mean a thing if it ain’t got that swing » (Ça n’a aucun sens si ça n’a pas de swing) de Duke Ellington en est l’exemple le plus célèbre, mais « Tain’t what you do, it’s the way that you do it » (Ce n’est pas ce que vous faites, c’est la manière dont vous le faites), composé par MM. Oliver (Sy) et Young (Trummy) pour Jimmy Lunceford  n’est pas mal non plus : c’est ainsi que jazz a fait depuis les origines son affaire de tout ce qu’il rencontrait sur son chemin, depuis les cantiques protestants du siècle avant-dernier jusqu’aux pires chansonnettes de nos contemporains. Avec le swing en guise de mortier, cette musique est aussi l’art de la transmutation d’à peu près n’importe quoi. Cette alchimie comporte quelques chemins plus originaux que les autres… en voici un, particulièrement jubilatoire, tracé par Emmanuel Hussenot et son « Orpheon Célesta ».Du temps de nos jeunes années et du fameux « Sharkey & Co », le tandem de cornets formé par « Manu » et Jean-Pierre « Sharkey » Morel était devenu fameux, et ce sont justement des musiciens de cette formation qui furent plus tard à l’origine d’« Orphéon Célesta », virulent quartet par lequel passèrent un nombre incroyable de gens maintenant très connus dans le jazz français. Cet orchestre-là est marqué depuis l’origine au coin de l’humour et de la virtuosité, et ses spectacles sont beaucoup plus que des concerts : costumes, jeux de scène, décalages en tout genre créent son image de marque. Et, même si, ici, il nous manque l’image, on peut largement en profiter… imprévisibilité, drôlerie, poésie, rapidité d’esprit, on pourrait penser aux « Frères Jacques » (et parfois à Bobby Lapointe) à la sauce Slim Gaillard, mais « Orphéon Célesta », sorte d’ovni musical, reste unique en son genre.
Par Laurent VERDEAUX – LE BULLETIN MUSICAL DU HOT CLUB DE FRANCE