Une personnalité hors du commun par Jazz Magazine

« Jusqu’à Marian Anderson, les chanteuses afro-américaines avaient été condamnées, quels qu’aient été leur formation et leur talent au vaudeville et à tous les dérivés des Minstrel Shows. ... » Denis-Constant MARTIN – JAZZ MAGAZINE

« Jusqu’à Marian Anderson, les chanteuses afro-américaines avaient été condamnées, quels qu’aient été leur formation et leur talent au vaudeville et à tous les dérivés des Minstrel Shows. Dans les années 1890, Sissieretta Jones, surnommée "The Black Patti" par référence à la soprano italienne Adelina Patti, dut se résoudre à créer une troupe de "troubadours" et à monter des "variety shows". L’intégrité artistique qu’elle parvint à y déployer ouvrit le chemin à Marian Anderson. Celle-ci, en dépit du racisme, de la bêtise des filles de la révolution américaine qui lui interdirent en 1939 Constitution Hall, parvint à se faire reconnaître comme cantatrice à part entière. Il lui fallut une personnalité hors du commun (que présente bien le livret de François-Xavier Moulé) et un art musical exceptionnel. C’est-à-dire autre chose que des dons – timbre, tessiture – rares et de la technique – projection, clarté de diction : une qualité d’interprétation qui transfigure la musique et les textes. Ce que Marian Anderson mit au service de Brahms, Sibelius ou Verdi, elle l’appliqua également aux spirituals tels qu’arrangés par Harry T. Burleigh, Roland Hayes ou Hall Johnson. Parce qu’elle les traitait comme des "mélodies", parce qu’elle les investissait à la fois de l’émotion propre aux grandes chanteuses (à l’instar de Kathleen Ferrier) et de l’espérance tragique issue de son expérience personnelle, elle y fit entendre des richesses insoupçonnées. En ce sens, elle ne s’oppose nullement à Mahalia Jackson, Clara Ward ou Marion Williams, lorsqu’elles chantent le même répertoire, mais les complète admirablement. » Denis-Constant MARTIN – JAZZ MAGAZINE