« Ce Warlop est un phénomène ! » Par Bulletin du HCF

Beaucoup moins connu du grand public que Grappelli, il n’en fut pas moins un violoniste de jazz français de la plus grande importance. Natif de Douai, il fréquenta le conservatoire de Lille puis celui de Paris obtenant un 1er prix de chant, violon et direction. A quinze ans Michel jouait déjà en concert salle Pleyel. A cette époque, le monde de la musique classique à Paris le regardait comme un deuxième Yehudi Menuhin. Après quelques concerts classiques pour gagner sa vie, fin 1929 il débuta le jazz en professionnel au Tabac Pigalle avec « Grégor & ses Grégoriens », un orchestre influencé par celui du célèbre américain Fletcher Henderson. Warlop était un rêveur qui voulait poursuivre ce qui le passionnait depuis 1927 : le jazz, los boîtes de nuit de Pigalle, Joe Venuti et Eddie Lang, Eddie South qu’il écouta au Bœuf sur le toit ou à La Plantation et avec qui il joua. Malheureusement une seule session d’enregistrement, le 29 septembre 1937, réunit Warlop et South avec, cerise sur le gâteau. Stéphane Grappelli et Django Reinhardt. Il était très intéressé par les jazz band noirs américains jouant à Montmartre. Il étudia la tonalité, la technique et l’instinct musical d’artistes tels que : Gene Cedric (ts), Doc Cheatham (tp), Benny Carter (as, tp), Coleman Hawkins (ts), Arthur Briggs (tp), Bill Coleman (tp)… C’était un jeune homme sérieux, modeste et timide. Le célèbre chef d’orchestre Jacques Hélian a dit de lui : « Ce Warlop est un phénomène ! que ce soit dans un ensemble, au violon, en chant, en harmonie, en contrepoint, en improvisation, il est tout aussi doué que Grappelli. C’était un arrangeur et un compositeur habile. Il forma un premier ensemble, « The Chicago Syncopators » avec lesquels il enregistra en 1933 et 1934 pour le label Sonabel. Le 8 janvier 1934, il enregistra « All for the swing » et « Crazy fiddle » dans lesquels on entrevoit pour la première fois son monde étrange et personnel : passion, désir, mélancolie, dépression. Il rencontra Django Reinhardt lors d’une session d’enregistrement en avril 1934 avec Jean Sablon et ils enregistrèrent ensemble des années 1934 à 1938. Il accompagna de nombreux(ses) chanteurs(ses), parfois rejoint par Reinhardt (g)et Grappelli (p). Il a réalisé environ quatre cents enregistrements (dont treize en 1937 et 1938 pour Swing crée en 1937 par Charles Delaunay). Il fut mobilisé en septembre 1939, capturé en mai 1940, prisonnier de guerre dans un Stalag, libéré pour raison de santé en mars 1941. Pendant cette période, il composa deux œuvres pour orchestre de jazz enregistrées après la libération : « Le noël du prisonnier » et « Swing concerto ». Dès son retour à Paris, de 1941 à 1945, il rejoignit l’orchestre de musique légère de Raymond Legrand (père de Michel Legrand) ce qui l’empêcha de remplacer Grappelli dans le Quintette du Hot-Club de France au profit du clarinettiste Hubert Rostaing. A la même époque il créa le « Septuor à cordes de jazz » puis un « Octuor » (quatre violons, deux guitares, une contrebasse et une harpe) que rejoignit la chanteuse swing du moment : Irène de Trébert. Après la libération, Raymond Legrand, Michel Warlop et d’autres ayant joué pour Radio Paris, furent considérés comme collaborateurs. Il travailla alors à Bordeaux avec Pierre Zeppilli (p), à Perpignan et dans les Pyrénées. Très atteint par l’alcoolisme, il décéda le 6 mars 1947.

Par Bernard JOUAN – BULLETIN DU HOT CLUB DE FRANCE