« Des musiciens qui prennent plaisir à jouer ensemble, un auditeur forcément ravi » Par L’Enseignant

« Pour les non initié(e)s au jazz – il paraît qu’il en existe encore, j’ai du mal à le croire – une section rythmique sonne bizarrement. Pourquoi nommer « section » ce qui se réduit à un trio ou à un quartet, soit guitare (g)/basse (b)/batterie (dr) – le piano peut remplacer la guitare quelques fois – ou piano/basse/guitare/batterie ? Pour une raison historique pour conserver la mémoire d’un moment du jazz, le temps où les big bands régnaient en maîtres, soit les années 1930, seule période où le jazz était populaire. (…) Aujourd’hui, tout trio ou quartet qui accompagne chanteurs, chanteuses, musiciens accède au statut de section rythmique... Cette introduction pour expliquer le titre de cet album Frémeaux et associés, « La section rythmique ». Elle se compose, en l’occurrence, d’un guitariste, David Blenkhorn, d’un bassiste, Sébastien Girardot (tous deux, malgré les apparences d’un nom français, Australiens) et d’un batteur, Français, Guillaume Nouaux. Ces trois là se sont fait connaître, pour employer un mot anglais – on m’excusera ou pas, peu importe c’est le terme qui convient -, pour leur « versatilité », leur capacité à accompagner des musicien(ne)s différents, aux styles parfois opposés. Ils ont voulu réaliser un enregistrement qui permette de les entendre réinventer les standards de toute origine. Ils démarrent avec « Hard Times », du blues, pour finir sur la balade de Hoagy Carmichael, « The Nearness Of You » en passant par le gospel, le jazz traditionnel, Duke Ellington pour faire la preuve de leur capacité à s’introduire dans toutes les phases du jazz et aborder les rivages d’un « traditionalisme revisité » - pour reprendre le titre d’un album de Bob Brookmeyer qui leur convient bien. C’est une esthétique qu’ils partagent avec Brook dans sa volonté de ne rien ignorer mais de tout reprendre pour entrée dans la modernité. En ces temps curieux, formidables et étranges, écouter cet album représente une pause. Du jazz bien fait, des airs connus qui prennent une nouvelle coloration, des musiciens qui prennent plaisir à jouer ensemble et un auditeur forcément ravi. Même un peu béat. Que demander de plus ? »
Nicolas BENIES – L’ENSEIGNANT