« Du grand art ! » par BCR

« Ca fait très longtemps qu’on attendait avec impatience un album de Benoît Blue Boy avec le flamboyant guitariste Franck Goldwasser. Il y avait déjà eu quelques belles prémisses sur « Couvert de Bleus », l’album culte de Benoît sorti chez AB disques, complètement épuisé depuis et dont en attend désespérément sa réédition et sur « Lent ou Rapide » (Dixiefrog 1997).  Franck Goldwasser est l’un des meilleurs guitaristes de blues de sa génération. Magnifique autodidacte de la six cordes, il fut biberonné dès sa plus tendre adolescence aux riffs ciselés d’Elmore James, T-Bone Walker ou BB King. Une rencontre heureuse avec le bluesman Sonny Rhodes bouleversera sa vie et le fît émigrer sur la côte ouest des Etats-Unis, entre San Francisco, Oakland et Santa Barbara, où il accompagnera des légendes comme Pee Wee Crayton, Lowell Fulson, Jimmy McCracklin, Phillip Walker, Kim Wilson ou R.J Mischo et participera à de nombreux et remarquables enregistrements pour le fameux label Fedora, Harmonica Slim, Hosea Leavy… Sans oublier quelques albums au sein de Mannish Boys ou en solo de très bonne facture sous le nom de Paris Slim, mais de grâce, ne l’appelez plus jamais Paris Slim ! Franck Goldwasser est le guitariste de blues par excellence que tout le monde s’arrache. Un guitariste surdoué qui connait très bien son sujet et pour qui le blues, à l’instar de Benoît Blue Boy, est un véritable art de vivre au quotidien. Car dans le blues, il n’y a évidemment pas de place pour les éventuels tricheurs, voire pour les éventuels usurpateurs. Et les deux acolytes vivent le blues depuis des décennies au plus profond de leurs viscères. Malgré une carrière déjà bien remplie qui force le respect, les années qui passent avec des hauts et parfois des bas, chez Benoît le gars tout bleu, la passion, l’intégrité artistique et l’authenticité sont toujours bien palpables. Cet album qui est une sorte d’OVNI dans les bacs des meilleurs disquaires, est une totale réussite. Cette association musicale entre Benoît Blue Boy et Franck Goldwasser engendre des pépites d’un blues poisseux et hypnotique, d’un blues à ras-de-terre au feeling étincelant et au groove lancinant. Les principales influences de Benoît B.B, Jimmy Reed, Slim Harpo ou George ‘Harmonica’ Smith, s’entremêlent avec celles de Franck, T-Bone Walker, Elmore James… et donnent un cocktail détonant. Ce n’est pas un album de Benoît Blue Boy accompagné par Franck Goldwasser, mais bel et bien un album en duo et de parfaite osmose, au sein duquel, les deux amis se sont partagé le chant et la création des titres. Enregistré à Montreuil avec Stéphane « G.B » Manaranche à la basse, Marty Vickers à la batterie et Stan Noubard Pacha en invité exceptionnel sur un titre, sans oublier les guitares étincelantes de Franck Goldwasser, l’harmonica diabolique et les guitares rythmiques de Benoît Blue Boy, l’album intitulé « Papa, Fais Pas Ça », transpire l’anachronisme et la sincérité sans bornes et propose 11 titres, de véritables courts-métrages des galères au quotidien, traités comme à l’accoutumée chez Benoît avec humour et dérision, poésie et gouaille des faubourgs de Paname. On notera une incroyable reprise du standard de BBB « Le Blues Au Bout De Mon Lit », que n’aurait pas renié Robert Johnson en personne à la croisée des chemins. Du grand art ! Ah oui, j’allais oublier, cet album est sorti chez le groupe Frémeaux & Associés, estampillé blues de qualité supérieure contrôlée, avec une pochette qui n’est pas sans rappeler l’album « Benoît Blue Boy en Amérique » enregistré à Austin Texas et encore dans toutes les mémoires. Avec cet opus, qu’il est indispensable d’acquérir dans les meilleurs délais, Benoît Blue Boy et Franck Goldwasser donnent une nouvelle fois au blues français et en français, toutes ses lettres de noblesse, et j’irai même plus loin en affirmant haut et fort qu’ils ont conforté leur statut inébranlable d’authentique légende vivante du blues ! Mais cette indéniable évidence, vous la connaissiez déjà… »               
Par Serge SCIBOZ - BCR