Minutieux travail de compilation par Soul Bag

« (…) Nous avons en effet un échantillon de chants, certes tirés du répertoire religieux traditionnel des Noirs des Etats-Unis, mais retravaillés dans le style des mélodies classiques européennes et même du bel canto italien, ceci surtout chez les vocalistes s’exprimant en solo avec accompagnement de piano. Ceci posé, on se doit de saluer le minutieux travail de compilation effectué par François-Xavier Moulé qui signe une impeccable brochure en accompagnement de ce coffret. ... » Jacques DEMETRE – SOUL BAG

« (…) Nous avons en effet un échantillon de chants, certes tirés du répertoire religieux traditionnel des Noirs des Etats-Unis, mais retravaillés dans le style des mélodies classiques européennes et même du bel canto italien, ceci surtout chez les vocalistes s’exprimant en solo avec accompagnement de piano. Ceci posé, on se doit de saluer le minutieux travail de compilation effectué par François-Xavier Moulé qui signe une impeccable brochure en accompagnement de ce coffret. Au surplus, il faut bien admettre que ce genre de spirituals est pratiqué par des artistes noirs, fiers de l’être, et qu’il répond, depuis plus d’un siècle, à l’aspiration de certaines couches de la population afro-américaine accéder à un statut culturel reconnu par les Blancs, tout en essayant de rester fidèles à leurs racines. C’est pourquoi, bien que cet album ne réponde pas entièrement à notre attente, nous ne pouvons pas l’écarter d’une simple chiquenaude, d’autant plus que certains morceaux entonnés par les solistes occupant tout le premier disque sont intrinsèquement très beaux (Deep River par Marian Anderson, Go Down Moses par John Payne, Sometimes I Feel Like A Motherless Child et Ezekiel Saw The Wheel par Paul Robeson, etc). Mais il manque évidemment cette étincelle rythmique et ce souffle émotionnel qui caractérisent la musique noire authentique. Il n’est que de comparer les deux versions, sur des paroles similaires, du Lit’l Boy de Roland Hayes (ici présent) et du fameux Little Boy du Révérend Kelsey. Néanmoins, quand on passe à l’audition du second disque, consacré à des chorales et à des quartettes, on s’aperçoit que l’écart entre les deux formes, l’une populaire et l’autre « savante », tend à diminuer, sachant par ailleurs que sept de ces groupements (sur douze) sont répertoriés dans le Blues & Gospel Records, 1902-1943 de Dixon et Godrich. C’est ainsi que j’ai assez aimé certaines des plages de ce second disque, dans la mesure où elles font entendre des harmonies et des structures rythmiques proche de style "jubilee" à l’honneur à cette époque parmi les Noirs. Telles sont par exemple Pickin’ On The Harp With De Golden Strings par les Elkins-Paynes Jubilee Singers, Little David par les Fisk University Jubilee Singers (qui remonte à 1909), Hallelujah par le Rust College Quartet, Mary Don’t You Weep par les Utica Jubilee Singers et Religion Is A Fortune par le Hall Johnson Negro Choir (dans cette dernière prestation, le soliste utilise des contours mélodiques proches du blues et analogues au célèbre Shoes Shiner’s Drag de Lionel Hampton). Par moments, l’ambiance est même proche de ce qu’on peut entendre dans le recueil "Gospel Quartets" élaboré par Jean Buzelin pour Frémeaux & Associés (voir S.B. N° 138). Enfin, un autre mérite de ce compact sera peut-être de contribuer à amener les amateurs de musique classique à accorder une oreille attentive à la musique que nous aimons ici. » Jacques DEMETRE – SOUL BAG