« Rodolphe Raffalli au service de la guitare » par Le Devoir (Québec)

En Corse, d’où il vient, les anciens lui disent : « On reconnaît bien vos racines puisque, même dans votre jazz manouche, vous conservez un son méditerranéen ». A cela, le guitariste renchérit de bon cœur : « Cela provient du rapprochement avec la mandoline et de l’influence qu’a exercée sur moi la famille Ferre ». Maurice Ferre lui avait tout enseigné à la dure, à la place du Tertre, lieu mythique de Montmartre. « A l’âge de 15 ans, j’ai commencé mon apprentissage petit à petit en apprenant l’art de la pompe. On jouait pratiquement tout les soirs de la semaine, six heures d’affilée sans pause. Si le public s’ennuyait, on te virait. Le propriétaire tapait alors dans un arbre et dix guitaristes en tombaient.» C’était la vieille école, mais Ferre a légué à Raffalli un précieux héritage : le style des Gitanes, à ne confondre ni avec celui des Gitans d’Espagne et de Camargue ni avec celui de Django, que Raffalli a également intégré. « Contrairement à lui, les Gitanes insèrent un très grand nombre de trémolos dans leur musique ». En parallèle, le guitariste, qui avait également baigné dans le jazz et la musique Sud-américaine, se nourrissait depuis l’enfance de Brassens. D’où l’idée de lui consacrer deux disques, lumineux concept qui vaudra à Raffalli une des meilleures ventes jazz en France en 2002 pour le premier : une approche très spontanée, que des guitares et de la contrebasse, du tonton Georges sans les mots, en swings et en ballades sur des rapides et des lentes, un lyrisme qui ressort et cette façon de tellement respecter l’œuvre qu’on croirais apercevoir le Sétois dans le fond. Georges Brassens vol.2, paru l’an dernier, est un disque mûri plus longtemps, enregistré en analogique, ce qui confère une sonorité plus ancienne. « Certains préfèrent l’esprit à l’arraché du premier, mais l’intention était plutôt de créer un mini conservatoire de cordes ». Au Québec, Raffalli rendra hommage à Brassens et aux traditions manouches : en quintette à l’enseigne du musette avec l’accordéoniste Ludovic Beier les 30 Août à Québec et les 31 août et 2 Septembre à Montmagny ; le 6 septembre à Montréal, puis en trio avec Michel Donato le lendemain à Gatineau. Et du célèbre contrebassiste québécois, que sait-il ? « Je ne le connais pas, mais on m’en dit beaucoup de bien. Ça devrait être une belle rencontre non. Il vit au Canada, non ? »
Yves BERNARD – LE DEVOIR (QUÉBEC)