« Tango première manière » par Télérama

En Argentine, on dit ‘el vals’, au masculin. La valse : une musique et une danse qui sortent des salons aristocratiques à la fin du XIXe siècle et s’encanaillent, comme la milonga, cet ancêtre du tango, au contact des payadores, ménestrels du début du XIXe siècle qui furent des passeurs entre la pampa et les villes. Ces chroniqueurs d’un autre âge chantaient les nouvelles du jour et se livraient à des joutes oratoires en s’accompagnant à la guitare. « Carlos Gardel fut le dernier payador et le premier chanteur de tango cancion », écrivent Philippe Lesage et Paulo César de Andrade dans le livret qui accompagne ce double album. Outre des joyaux d’ironie et de lyrisme empruntés à Gardel, outre de savoureux instrumentaux aux bandonéons fureteurs et aux violons solennels, on y découvre les voix du tango première manière comme celle-ci, ainsi décrite par Borges : « Aiguë comme celle d’un châtré, traînante ou avec des sursauts d’impatience, jamais criarde, entre parlé et chanté ».
Éliane ALOUZAY - TÉLÉRAMA