« Un disque qui vous aidera à vivre. » par Jaz Hot

« Ces musiciens sont bien connus chez nous dans la mouvance jazz traditionnel et mainstream. Ensemble, sous la direction de Michel Bonnet, ils ont trouvé un "son" d'orchestre en s'inspirant des formations du tromboniste Kid Ory. Cette fois, l'idée est d'appliquer cette sonorité collective à des morceaux non enregistrés par Kid Ory (si on oublie «Tiger Rag»). La tendance ici est au rag (ragtime jazzifié). Certes James Scott (1885-1938) n'aurait pas été satisfait, lui qui a écrit «Don't Jazz Me-Rag (I'm Music)» (1921). James Scott est d'ailleurs l'auteur de cette jolie valse, «The Suffragette», jouée en collective assez près du texte donc avec respect (belle musique). On remarquera en passant au thème suivant, «Bis Scott Rag», combien le 3/4 est moins enclin au swing que le 4/4 sur tempo médium. Ce thème de Claude Bolling est un bon tremplin à d'excellents solos. Michel Bonnet cherche le vibrato à la Mutt Carey dans la citation de coda. Patrick Bacqueville ici comme dans tous ses solos a totalement retrouvé le style de Kid Ory avec sourdine et une belle puissance. Scott Joplin est à l'honneur avec «Chrysanthemim» (1904), «A Real Slow Drag» (tiré de l'opéra Treemonisha, 1911), «Solace (A Mexican Serenade)» (1909) et «The Entertainer» (1902). Dans «The Entertainer» qui fut enregistré en 1947 par Mutt Carey et par Bunk Johnson, nous trouvons que Michel Bonnet est près de la version de Bunk dans les ensembles, tandis que son solo avec sourdine harmon à tube est plus jazz (pas de solo de trombone!). «Solace» est très bien exposé en duo par Davot et Bonnet (sourdine clear tone), rejoints par le piano, la clarinette puis tout d'orchestre. De la belle musique, de la jolie trompette et un bon arrangement. «Le Petit Nègre» de Debussy (1909) est exposé en piano solo avec respect, puis nous avons un excellent arrangement orchestral et d'excellents solos de Bacqueville et Christophe Davot. La batterie lance une version swing du «P'tit Quinquin» (1853). Elle lance aussi «La Marseillaise» qui nous surprend moins puisque George Lewis l'a plusieurs enregistrée. Patrick Bacqueville joue en solo (paraphrase) dans le plus parfait style Ory. Le tempo médium est parfait dans «Sensation» (Lamb & Joplin, 1908). Quand Michel Bonnet joue dans le derby, il nous fait penser à Ken Colyer lui-même disciple de Mutt Carey. Signalons que tous les choix de tempos sont parfaits; c'était aussi un point fort de Kid Ory. Enfin, «Rubber Plant Rag (Moulin à café)» de George Cobb (1909) met très bien en valeur Guy Bonne, mais aussi Bacqueville et Enzo Mucci. Un disque qui vous aidera à vivre. »
Par Michel LAPLACE – JAZZ HOT