« Un voyage passionnant » par Juke Box

Apparue au début des années 60, la soul est indissociable de l’émancipation de la communauté afro-américaine, de la lutte pour les droits civiques et des émeutes sanglantes de la seconde moitié de la décennie. Elle en est la bande-son au même titre que les combats de boxe de Cassius Clay/Mohamed Ali en sont l’expression visuelle. Mais ses racines remontent à loin comme l’illustre ce coffret de 3 CD avec un livret bien documenté de Bruno Blum. Le premier disque, The Roots (1928-1954), se penche sur la ferveur du gospel, une des composantes majeures du style, avec le Reverend Bonny Campbell (« Have Mercy On Me »), le Golden Gate Jubilee Quartet (« Rock My Soul »), un titre qu’Elvis Presley aimera interpréter dans les années 70), Sister Rosetta Tharpe (« Beams Of Heaven »), les Soul Stirrers avec Sam Cooke (« Jesus Gave Me Water »). Et aussi sur le R&B, autre élément indispensable, avec Roy Brown (« Hard Luck Blues »), les Dominoes (« Have Mercy Baby »), les Drifters (« Lucille »), et le jazz : Jack Teagarden (« Basin Street Blues »), Billie Holiday (« Solitude »). Les Précurseurs (1954-1961) font l’objet du CD 2, qui démarre, à tout seigneur tout honneur, avec celui qui le premier a mélangé le sacré et le profane, le Genius Ray Charles (« I’ve Got A Woman », « Drown In My Own Tears », « The Right Time »), suivi de près par Sam Cooke (« You Send Me », « Wonderful World »). Certains ténors du genre débutent leur carrière dès les années 50 comme James Brown (« Please, Please, Please ») Smokey Robinson & The Miracles (« Bad Girl »), Joe Tex (« Blessed Are These Tears »), Aretha Franklin (« Take My Hands Precious Lord »). Le CD 3, Early Soul (1961-1962), voit le genre se codifier tel qu’on le connaît avec Solomon Burke (« Cry To Me »), les Temptations (« Dream Come True »), Etta James (« Something’s Got A Hold On Me »), Marvin Gaye (« Stubborn Kind Of Fellow »), Otis Redding (“These Arms Of Mine”), Wilson Pickett (“I Found a Love”). La soul rugueuse de Memphis, qui fera le bonheur des labels Atco/Atlantic, cohabite avec le style plus sophistiqué de Tamla Motown à Detroit, sans oublier Chess à Chicago, toujours dans la course. Un passionnant voyage au pays des belles voix et des sentiments à fleur de peau.
Par Tony MARLOW – JUKE BOX