« Une fantastique interprète du blues » par Jazzman

Plutôt qu’un long discours, on conseillera aux auditeurs de se rendre directement à la plage 10 du premier disque. Nous sommes en 1950 à Los Angeles. Dinah Washington « star des jukes-boxes » (sic) chante sur scène face à un public noir et tout est là. L’histoire de la rencontre d’une artiste avec un public en qui il se reconnaît, un public qui hurle, commente ou trépigne. Et elle le lui rend bien, tendant les notes, sensuelle en diable. L’histoire d’une fantastique interprète de blues mais qui « pouvait tout chanter » ainsi que le disait et le prouve. L’histoire de Dinah Washington née Ruth Lee Jones, morte en 1963 à l’âge de trente-neuf ans suite à l’absorption d’un mélange de pilules de régime et d’alcool. Parcourir l’œuvre de « la reine », c’est aussi croiser la route de ces hommes qui l’accompagnèrent et parfois l’épousèrent. Hampton est là, en 1943 puis 1945, le batteur Jimmy Cobb et son orchestre (avec Paul Gonsalves) ou Cootie Williams. Le sax Paul Quinichette, en « vice-président », joue avec les mêmes yeux que Lester Young pour Lady Day. A la fin des années 1950, c’est Quincy Jones qui met sa science de l’arrangement au service de la vedette américaine. Chronologique, pédagogique avec un livret clair et précis, cette sélection signée Jean Buzelin rend justice à une artiste trop longtemps méconnue en Europe. On gardera pour la bonne bouche le connoté Big Long Sliding Thing (1954) d’un heureux tromboniste dont « le long instrument qui glisse » ne laissera pas indifférents les amateurs et amatrices de double sens. Christophe DRIANCOURT – JAZZMAN