« Un manifeste du poids culturel des musiques populaires » par Le Monde de la Musique

Le temps enfoui, le temps retroussé…La nostalgie comme prétexte à s’inventer des émotions au présent. Attention, œuvre de salut public. Comme un manifeste du poids culturel des musiques populaires. Jo Privat, bien sûr, qui ouvre le bal ; et Didi Duprat, dont la guitare fut aussi essentielle au musette de Paris que celle de Freddie Green au swing de Count Basie ; et encore Didier Roussin, l’encyclopédiste activiste qui fut l’âme de ces trois volumes à mettre en joie un congrès de neurasthéniques. Tous trois disparus à quelques semaines d’intervalles et dont la vie plaide pour le futur de cette musique à trois temps qui joue la valse aux étiquettes. Car il s’agit aussi bel et bien de création, de bijoux d’arrangements (Les Nocturnes, Titine), de virtuosité ahurissante (Martin O’Connor dans Indifférence, Marcel Azzola dans Rue de la Chine), de préhistoire restituée (La valse des barreaux verts), de contrepoints enchanteurs ((Brise Napolitaine, Alhambra), d’humanité sentimentale (Vent d’automne), de nouveaux talents (Eric Bouvelle et Alain Musicchini ébouriffants sur la suite des frères Peguri),de musicalité pure (le duo d’accordéons de Miliana), d’expérimentations (Roger le Vénitien), d’hommages tendres (La Ritale)…Ce vent-là a la douceur fantasmatique d’une peau de pêche en plein hiver.
Alex DUTILH – LE MONDE DE LA MUSIQUE