Compagnon de route historique de Soul Bag et fan invétéré du Genius, notre ami publie une formidable discographie de référence, fruit d’une vie de passion et de labeur.
D'où vient ta passion pour Ray Charles ?
En 1959, j’ai 15 ans, mon frère aîné ramène à la maison des 45-tours. Parmi eux, l'EP de Ray Charles avec What'd I say, Blackjack et Heartbreaker. Je suis foudroyé... Dès l’année suivante, je m'achète un électrophone et, progressivement, tous les disques de Ray Charles édités en France. À I'été 1961, je regarde les extraits de ses concerts au festival d'Antibes Juan-les-Pins. Il est encore avec son formidable octette des années Atlantic. En octobre, c’est à Paris qu'il se produit, cette fois-ci à l'orgue et avec un orchestre augmenté à 17 musiciens. Je suis à court de superlatifs. Je n'ai alors pas la moindre idée qu'au siècle suivant, je publierai tous ces merveilleux concerts grâce à la complicité de Frémeaux & Associés.
Sur quelle durée as-tu écrit ce livre ?
Je serais tenté de répondre "a lifetime in the making" ! J'ai largement repris une partie de mon projet de livre Ray Charles, Célèbre et méconnu, qui était resté dans les cartons, ainsi que certaines chroniques pour Soul Bag. Suivant l’exemple de Kurt Mohr, pionnier de la discographie, j’ai interrogé des musiciens en tournée, récupéré des adresses à qui écrire, contacté des éditeurs, des marques de disques, le syndicat des musiciens américains, la Bibliothèque du Congrès.
Des graals manquent-ils encore à ta quête ?
Ma frustration ultime : les 10 interprétations à Carnegie Hall en 1957 (ses plus anciens enregistrements live connus), enregistrées par la radio Voice of America et conservées à la Library of Congress. Je ne suis jamais parvenu à les faire publier, ni même à les écouter. Il y a aussi ce show "Sold on Soul" de 1970, au Madison Square Garden, en hommage à Duke Ellington où Ray avait joué Satin doll au piano et chanté Laughing and clowning en compagnie de B.B. King en s'accompagnant à l’orgue...
La production de Ray Charles est vaste ; comment conseillerais-tu à un "débutant" de l'aborder ?
Avec circonspection. Ses enregistrements sont si divers ! Le coffret "Pure Genius" extrait de l'intégrale Atlantic, est incontournable, suivi du coffret "Singular Genius", qui reprend toutes les faces ABC. Mais la meilleure introduction à son oeuvre me paraît être le CD "Ray Charles Live in Concert" (1964), complété de 7 inédits. Brother Ray y joue du piano et de l’orgue, et y déploie magistralement toute la palette de son immense talent, alors à son apogée. Tout y est : du R&B, du jazz, des ballades poignantes, de l’humour, un blues d'anthologie…
Propos recueillis le 19 juillet 2025 par Ulrick Parfum – Soul Bag