« Hauteur de vue de l’esprit du temps » par Télérama

Zeitgeist n’est pas le nom d’une exoplanète ou d’un héros de manga, c’est un terme qui, en allemand signifie « l’esprit du temps ». Il renvoie à un pan de la philosophie qui considère l’homme comme tributaire de son époque, de sa classe sociale et de la culture dans laquelle il évolue. Que Laurent Cugny – pianiste, chef d’orchestre, compositeur, docteur en musicologie et enseignant à la Sorbonne – ait retenu ce titre n’a évidemment rien d’un hasard. Plutôt que de s’en tenir au cliché de reportage (vu la tête qu’il a, l’air du temps, c’était l’assurance d’une bonne déprime), Cugny paraît avoir voulu restaurer le milieu musical qui l’a façonné – et dans lequel ont sans doute baigné ses musiciens, tous poussés à leur meilleur. Soit Duke Elington, Joe Zawinul, le Miles Davis d’« In a Silent Way » (« Liviore », composition de Cugny), mais aussi les Beatles (« I Want You ») ou Joni Mitchell (« Woodstock »). Manière d’autoportrait par la bande ? Peut-être. Aisance surtout, à évoluer dans des mélodies chéries, plaisir de s’installer dans les sons, les pulsations qui formèrent le premier berceau. Quand la hauteur de vue se mêle à une jouissance sans arrière-pensée, « l’esprit du temps », soudain, a bien meilleure figure.

Par Louis-Julien NICOLAOU - TELERAMA