« Dégustez et surtout ne laissez pas refroidir. » par ABS Mag

Comme bien des musiques de tradition orale, le funk n’est peut être pas à l’abri, un jour ou l’autre, d’une révélation qui chamboulera tous nos savoirs sur ses origines. Pour l’heure, c’est par la musique syncopée des Caraïbes à la fin des années quarante que le spécialiste Bruno Blum débute un voyage torride - et sans la clim’- en 67 escales qui nous mènent de l’Afro-cubain Machito au Louisianais Eddie Bo. Comme le rappelle le compilateur, le terme « funk » signifie mauvaise odeur corporelle. Ce qui peut aussi endosser une connotation positive dans certaines communautés noires quand on désigne comme « funky » celui qui a travaillé et transpiré. Un premier CD titré « The Deep Caribbean Roots of Funk » voyage de Kingston à Port-au-Prince, via La Havane, les Bermudes et Pointe à Pitre. On y découvre comment « El Loco Cha Cha Cha »  de René Touzet prépare le terrain au « Louie Louie » de Richard Berry, ou encore quatre manières de décliner du limbo. Avec en fil rouge les influences croisées d’Allen Toussaint et de Bo Diddley sur le funk US. Le second, « Funky Jazz, Hard Bop, Soul Jazz », parle de lui-même. Rares sont les combos qui n’ont pas inscrit au moins une fois à leur répertoire un thème afro-cubain. James Moody ou Dizzy Gillespie devenant même des familiers du genre. Sun Ra est là aussi, qui jette les bases du cosmic funk, alors que plus rien ne semble séparer Moondog enregistré dans une rue de New York d’un griot capté dans la brousse. Agitez ces deux CD, mélangez, branchez le mixeur et vous obtiendrez le contenu du troisième : « Negro Spirituals, Blues & Soul ». Forcément le plus familier à l’amateur de R’n’B 50/60 avec l’incontournable Bo, James Brown – le type qui a le plus transpiré dans le showbiz’-, plein de Louisianais et même un clin d’œil à Elvis, pourtant toujours si propre sur lui. Dégustez et surtout ne laissez pas refroidir.
Par Dominique LAGARDE  - ABS MAG