L'Etranger Albert Camus par Oeil Electrique

“Disque indispensable.” Arno GUILLOU - OEIL ÉLECTRIQUE

"Ce qui frappe en premier en écoutant la lecture de l’Etranger par son auteur, c’est le ton de la voix d’Albert Camus : à la fois sûr de lui et évasif. Sûr de lui, car qui mieux que l’auteur peut interpréter ce qu’il a écrit, et, plus surprenant, évasif, car si cette voix correspond parfaitement à l’incarnation de Meursault, personnage central du roman, elle détone avec l’idée qu’on peut se faire d’Albert Camus, que l’on imagine volontiers plus affirmatif ou en tout cas moins impersonnel. Puis en y réfléchissant, c’est finalement assez logique pour un homme dont le principal sujet littéraire et philosophique fut l’absurdité de l’existence. Ainsi, ce roman, classique parmi les classiques, et pourtant si vrai à chacune de ses lectures, prend une dimension non égalée : Meursault, dont la mère vient de décéder, assiste passivement à son enterrement, puis reprend très vite un vie normale, banale. Une situation absurde, suite à une rixe entre Raymond, un proxénète qu’il vient de rencontrer, et un groupe d’Arabes sur une plage surchauffée par le soleil, amène Meursault à tuer l’un d’entre eux. S’en suit un procès où chacun de ses gestes, de ses actions avant le meurtre devient plus important aux yeux de la cour que le meurtre en lui-même. Meursault assiste, impuissant et passif, au jugement de son « insensibilité ». Ce que la cour définit comme de l’indifférence, Meursault l’explique simplement par cette phrase « (…) j’avais une nature telle que mes besoins physiques dérangeaient souvent mes sentiments ». La lecture par Camus transcende ces mots, et toute la chaleur, la langueur, la lenteur du texte transpire au long de ces trois disques. Cependant à la fin du roman, lorsqu’un aumônier tente de le convaincre de s’en remettre à Dieu pour sauver son âme, la voix de Camus devient tout à coup passionnée : l’enregistrement s’achève alors dans une tourmente à laquelle l’auditeur n’était pas préparé. Un disque indispensable à tout passionné de Camus."
Arno GUILLOU - OEIL ÉLECTRIQUE