«La fine fleur des orchestres martiniquais et guadeloupéens » par Politis

Si le zouk a conquis en quelques années une audience dépassant très largement le cadre des îles où il est né, les musiques qui le précèdent, et le nourrirent, demeuraient largement inconnues. Elles avaient pourtant été enregistrées, dès les années trente, mais il semblait que faire revire une histoire musicale antillaise n’ait aucun intérêt pour les compagnies phonographiques ou pour les pouvoirs publics. Aujourd’hui, heureusement, des initiatives de producteurs indépendants viennent combler cette lacune. Frémeaux & Associés proposent deux coffrets de 2 CD reprenant les meilleures faces gravées à Paris par la fine fleur des orchestres martiniquais et guadeloupéens. On y redécouvre le charme des voix féminines et l’enchantement des clarinettes meneuses de mélodies, hors de tout doudouisme. On y entend notamment deux des plus grands instrumentistes de l’entre-deux guerres : Alexandre Stellio, Martiniquais, et Eugène Delouche, Guadeloupéen à qui, par ailleurs, deux recueils sont entièrement consacrés. Biguines, polkas, mazurkas, valses créoles déroulent leurs mélodies joyeuses ou nostalgiques annonçant ce que Chamoiseau et Confiant revendiquent aujourd’hui, une créolité fière de ses métissages, faite d’héritages, d’emprunts et, surtout, d’innovations : source d’un patrimoine antillais mais offert désormais au monde entier.
Denis-Constant MARTIN – POLITIS