« Un jazzman dans le plus profond de l'âme » par Les dernières nouvelles du jazz

« Marc Benham avait déjà fait très forte impression avec son premier CD, « Herbst », enregistré en 2011-2012, et finalement publié par Frémeaux en 2013. Rompu au métier (le jazz traditionnel, la variété, l'électro....), c'est pourtant un jazzman dans le plus profond de l'âme, familier des clubs parisiens (Sunside, Caveau des Légendes). Il serait commode (et forcément réducteur) de le définir comme solaloïde , car le grand Martial Solal l'adoube de propos élogieux. Il y a chez lui ce goût du rebond, de la fantaisie, de l'inattendu, et toujours avec une intelligence musicale aiguë. Comme Martial c'est un adepte du « chemin aux sentiers qui bifurquent », et sa maîtrise de l'instrument, autant que son pouvoir de concentration sur l'instant improvisé, lui permettent des écarts inouïs. Pour ce disque, Marc Benham a choisi de revisiter l'univers de Fats Waller, avec une connaissance et un respect qui n'excluent pas de le ripoliner de teintes nouvelles. D'entrée de jeu, il agrémente l'étrange Viper's Drag d'un prélude plus déroutant encore. Mais le respect du style est là, allié à un sens aigu du détour. Aux reprises de Fats Waller se mêlent des compositions originales largement nanties de lyrisme, de finesse, et de ce pianisme intense (mais jamais ostentatoire) qui ravira les fanatiques de l'instrument (comblés aussi par la belle qualité du piano du studio Sextan). Lyrisme intense et recueilli également dans I've Got a Feeling I'm Falling de Fats, merveille d'équilibre entre sensualité et nostalgie ; et profondeur abyssale des harmonies de Madreza, signé par le pianiste. En outre Marc Benham nous offre un détour inattendu par Couperin (Les Barricades Mystérieuses), avec variations prolixes, imaginatives et pleines de swing en stride : belle escapade avant une composition originale, Tes Zygomatiques, empreinte de fantaisie virtuose (et d'un beau sens de la forme) ; et pour conclure une seconde version, fort différente, de l'inoxydable Ain't Misbehavin. Un disque magnifique, qui devrait plaire aux amateurs de (grand) piano et de (très bon) jazz ! »
Par Xavier PREVOST – LES DERNIERES NOUVELLES DU JAZZ