« Face au pouvoir politique » par Le Soir

"(…) Frémeaux & Associés ont eu la bonne idée d’éditer un triple CD reprenant une série de musiciens qui ont dû faire face au pouvoir politique. Tous les musiciens. La République de Weimar, en Allemagne, de 1918 à 1933, vit une crise économique, des violences politiques, mais aussi une effervescence culturelle incroyable. Mais dès qu’Hitler accède au pouvoir en janvier 1933, c’est « la descente aux enfers », comme dit Philippe Lesage dans le livret : on considère comme de la « musique dégénérée » celles de Mendelssohn, Schoenberg, Kurt Weill, Bartok, des chansons de cabaret, du « nigger jazz ». En Union soviétique, Staline cloue Chostakovitch et Prokoviev au pilori. Au congrès des compositeurs, Chostakovitch devra lire « livide et lèvres pincées, une lettre d’autoflagellation qu’on lui avait glissée avant qu’il monte à la tribune ». Aux Etats-Unis, Paul Robeson, Josh White, Marian Anderson, Max Roach sont tour à tour portés aux nues et vilipendés. Au Portugal, Amalia Rodrigues subit d’incroyables pressions du pouvoir de Salazar. En Espagne, on obligea Manuel de Falla à l’exil. En France, Bobby Lapointe, Georges Brassens, Léo Ferré, Yves Montand, Boris Vian connurent la censure ou le renvoi de leurs chansons après minuit à la radio. Et en Belgique ? Le coffret n’en parle pas, mais la chanson de Brel « Au suivant » fut interdite à la radio pendant un temps : elle mettait notre armée en cause."
PAR J.-C VANTROYEN – LE SOIR