« Une intégrale réjouissante » par Travellingue

Si elle a commencé comme secrétaire, Léonie Maria Julia Bathiat, plus connue sous le nom d’Arletty, a mis à « profit » sa relation avec un jeune armateur, Jacques-Georges Lévy pour découvrir la « haute » société, les grands couturiers, la littérature avant de quitter son compagnon et de mener une carrière en solo comme mannequin chez Paul Poiret. C’est en faisant connaissance avec le marchant de tableau Paul Guillaume – qui fut l’ami de Picasso et Modigliani – qui la recommande au directeur du Théâtre des Capucines, Armand Berthez, qu’elle passe des auditions et est engagée pour deux figurations. C’est lui qui va angliciser son nom qui deviendra son nom d’artiste. Le succès va vite venir et, en 1922, Arletty est à l’affiche de cinq spectacles dont une opérette. Au cinéma, elle débute aussi dans l’adaptation de La Garçonne, de Victor Margueritte où elle figure au côté de Marie Bell, Suzy Solidor et Edith Piaf, une jeune débutante. Mais, c’est en chanteuse, dans le rôle de Clémentine de l’opérette Yes – le livre est signé Albert Willemetz - qui assure sa notoriété en 1928. Deux ans après, elle fait vraiment ses débuts au cinéma avec La Douceur d’aimer, de Yves Boucher. Et, dès 1931, elle se fait remarquer un premier rôle dans Un chien qui rapporte, de Jean Choux. Désormais, Arletty mène plusieurs carrières de front et Marcel Carné lui offre un de ses plus grands rôles sur grand écran dans Hôtel du Nord, face à Louis Jouvet, ce maître du théâtre. Tout le monde se souvient de la célèbre réplique « Atmosphère ! Atmosphère ! Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? ». Une réplique qu’elle ne voulait plus reprendre à longueur d’interview à la fin de sa vie. C’est grâce à Marcel Carné qu’elle fait la connaissance d’un dialoguiste, un certain Jacques Prévert, avec lequel elle noue une amitié. Ensemble, ils enregistreront Intempéries, en 1962, dont on retrouve les prises dans ce coffret. Chantant aussi bien en solo qu’en belle compagnie comme en atteste cette Intégrale – de Andrex à Georges Ulmer en passant par Michel Simon ou encore Dranem (leur Vase de Soissons vaut le détour) - Arletty imprime sa gouaille à l’image comme sur les disques. Avec des chansons devenues des classiques, par exemple Comme de bien entendu. Autre pièce rare de ce coffret : amie de Louis-Ferdinand Céline (comme de Michel Simon), Arletty a enregistré des extraits de Mort à Crédit et, on peut le mesurer à nouveau, son style épouse celui du grand écrivain qui a connu de tristes dérives politiques. Tout amateur d’Arletty ne pourra que se réjouir de (re)découvrir certaines pépites de cette Intégrale.

Par François CARDINALLI - TRAVELLINGUE