Ernest Leardee - Rythmes Des Antilles 1951-1954
Ernest Leardee - Rythmes Des Antilles 1951-1954
Ref.: FA5177

AVEC L’INTEGRALE ANDRE SALVADOR

ERNEST LEARDEE

Ref.: FA5177

Direction Artistique : JEAN-PIERRE MEUNIER

Label : Frémeaux & Associés

Durée totale de l'œuvre : 2 heures 11 minutes

Nbre. CD : 2

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Présentation

« Ernest Léardée, avec son orchestre antillais, fut au début des années 1950 l’un des acteurs du renouveau des musiques tropicales en France. Il nous donne l’occasion de découvrir le chanteur André Salvador, frère aîné d’Henri Salvador, dans des enregistrements rares remplis de fantaisie et de tendresse. »
J.-P. Meunier & P. Frémeaux
ERNEST LEARDEE et son Orchestre de Danse Antillais : Tout’ moune pleuré • Nana • Douvan Pote Doudou • Ces Zazous la • Eulalie • À Karukera • Carnaval à la Martinique • Cé Filon • Moin aimé ti fi y a • Oui c’est Samba • Oué Oué • Gadé Chabine la - ABEL BEAUREGARD et son Orchestre Antillais (chant : Ernest Léardée) : La belle Amélie - Orchestre ERNEST LEARDEE : Moin aimé ti fi y a • Tu Dulce • Terre de feu - ERNEST LEARDEE et son Orchestre : Mambocito • Bayo coco • Macaco • Samba do Brazil • Mieux que toi • Bonne année - GILLES SALA (Orchestre Léardée) : Rêver d’un baiser • Haïti chérie - SEVERIANO ALVAREZ (Orchestre Léardée) : Le chant des bongos • Je cours après mon cœur • Rythme des Antilles - LES SŒURS BORDEAU (Orchestre Léardée) : Dolorosa cancion • Linda Maria - SIMONE ALMA (Orchestre Léardée) : Moin aimé ti fi y a • Tout’ moune pleuré - ANDRE SALVADOR (Orchestre Léardée) : Petite fleur fanée • Quand j’étais petit garçon • Lamoula créole • Mambo Mambo • Chocolat à la vanille • Aux Caraïbes • Yengoué • Guaracha ma mya - ANDRE SALVADOR (Orchestre André Ekyan) Prix du disque 1947 :  Hey ! ba ba rebop • Document : Ernest Léardée Raconte (1983)
“In the early fifties Ernest Léardée, with his West Indian orchestra, played a major role in the popularization of tropical music in France. He enables us to discover singer André Salvador, Henri Salvador’s elder brother, in unissued and extremely rare recordings.”
J.-P. Meunier & P. Frémeaux
Droits : Groupe Frémeaux Colombini - Patrimoine des Antilles, Biguine, West french indies heritage. 



Presse
                          L'ESPRIT CRÉOLE par vibrationsLe fabuleux destin des Antillais de Paris s’écrit sur plus d’un siècle. Où l’on se rend compte qu’il y a une vie avant et après le zouk.Il y a un siècle tout juste, au printemps 1902, la montagne Pelée raya d’un jet de lave et de poussière la ville de Saint-Pierre. A l’époque, la métropole martiniquaise forte de près de trente mille âmes était la capitale des Antilles françaises, et plus largement l’une des grandes cités de la créolité  caraïbe. Son rayonnement culturel allait bien au-delà des rivages. On y dansait et jouait de la biguine, la musique des salons d’une bourgeoisie métisse bourgeonnante. Née quelques décennies plus tôt, cette musique aux origines incertaines, dont même les plus fameux spécialistes ne se risqueraient pas à en expliquer le nom, combine le souvenir tenace des tambours africains à l’héritage du quadrille. Pour Jean-Pierre Meunier, spécialiste de la question à qui l’on doit de multiples rééditions sur le label Frémeaux, « il s’agit d’une interprétation de la polka à la manière africaine, marquée par les syncopes ». A chacun sa définition. Toujours est-il que quand on songe que la Louisiane fut française, quand on pense que les transactions commerciales et les migrations de population furent fréquentes entre les îles et la côte du Golfe du Mexique, on ne peut manquer de tisser un lien évident entre le jazz qui allait naître aux États-unis et la biguine dont le centre créatif venait de s’éteindre des suites de cette catastrophe naturelle. Jean-Christophe Averty osera même : « Si saint-Pierre n’avait pas été totalement détruite, le jazz y serait né ! ».Les instruments de la révolteÁ l’orée du vingtième siècle, le mento jamaïcain, le son cubain, la samba brésilienne apparaissaient, styles à l’évidence cousins de la biguine. Chacune de ces musiques nées en ville même les harmonies européennes aux cadences africaines, sur quelques accords de base et une trame mélodique appuyée. On pourrait de même rapprocher les instrumentations…Chacune conserve une part de l’héritage de la grande déportation, longtemps consigné dans des sociétés secrètes, plus ou moins syncrétiques. La biguine porte en elle les stigmates des lewoz et autres chants de veillée, dont elle s’affranchi en s’urbanisant, en même temps que l’esclavage est aboli. Dès lors, deux branches d’un même tronc vont se séparer pour ne se retrouver qu’un siècle et bien des péripéties plus tard. D’un côté, les tambours et la transe rythmique vont nourrir le terreau des mornes, ces petits monts arrondis des îles, des campagnes ; de l’autre, les cordes et la danse mélodique vont se développer sur le pavé des villes. « Mais l’esprit de la biguine a toujours été dans le ka », tempère Eric Vinceno, bassiste guadeloupéen qui a grandi avec les grands maîtres du genre mais qui a aussi retenu les leçons du jazz appris à Berklee. En 2002,il est temps pour sa génération de réunir enfin ces deux traditions. Il est temps de réexaminer à leur juste valeur le gwo ka et son équivalent martiniquais le bel-air, ces instruments ces instruments de la révolte, de la résistance à la colonisation. Ces longs fûts taillés dans les barriques de rhum conservent les origines de antillais, demeurent les porte-parole de leur originalité. « Le ka, ce n’est pas qu’un rythme et un tambour. C’est un phrasé, un sens mélodique. Il y a toute une dimension spirituelle », ajoute Vinceno. Tandis que la biguine devient l’emblème, puis le zouk, de la musique antillaise, le ka est rejeté aux oubliettes d’une histoire filtrée selon les critères politiques de la métropole. Il y a bien des raisons d’expliquer l’attitude de la France dans cette affaire, qui n’a jamais favorisé cette expression. Si la conga et le djembé n’ont pas de secrets pour le français moyen, le ka et le bel air font figures d’illustres inconnus pour la plupart. Ce n’est pas là l’un des moindres paradoxes de cette drôle d’histoire coloniale qui fit taire les tambours, bannir le créole de l’école jusque dans les années 60, tandis que nombre d’antillais affichaient l’envie de se blanchir, de s’assimiler pour réussir en s’intégrant au risque de se désintégrer…Précurseurs et passeurs« Pendant très longtemps, la musique antillaise a été parquée, réduite à la Compagnie créole et Kassav. Et pourtant depuis le début du siècle, les Antillais ont apporté beaucoup de musique dans leurs bagages. Mais les français ne se sont pas rendu compte que le chaînon manquant entre les États-unis et l’Europe, c’était les Antilles ! Les décideurs ont privilégié les Afro-américains ». L’écrivain et musicien Roland Brival ne cache pas son amertume face à une métropole qui a privilégié la voie « doudouiste », plus simple à contrôler que celle d’une réelle diversité, loin de tout exotisme bon teint, mais sans doute plus proche des discours indépendantistes. A toutes les époques, les Antillais ont été à la fois précurseurs et passeurs, conservant leur accent spécifique tout en adaptant avec aisance aux autres musiques. Pour Vinceno, « les Antillais ont plus de facilités à jouer tous les répertoires. Ils ont l’oreille. C’est sans dout du à notre culture créole ». Albert Lirvat, l’un des mentors de l’époque, précise : « Contrairement aux Cubains, nous avons la chance de pouvoir jouer n’importe quel style. Si on avait eu un conservatoire aux Antilles, on aurait sorti des musiciens extraordinaires ». Sans, ce n’est déjà pas si mal…De Félix Valvert, surnommé « roi de la rumba » dans le Paris des années 30 à Daddy Yod, « prophète » en son genre d’un dancehall à la française au milieu des années 80. Du virtuose Stellio, clarinettiste qui débarque avec la biguine du « serpent maigre » et un sens inné du swing dans le Paris des années folles, à Henri Guédon, qui fera chavirer tambour battant la capitale avec sa salsa. De Liquid Rock, trio en fusion dirigé par Alain Jean-Marie dès les années 60 aux grandes fanfares créoles d’Eddy Louiss…Et que dire de Vélo, véloce tambourinaire qui finira sur les trottoirs de Pointe-à-Pitre le 5 Juin 1984…Paris, terre d’accueilDes orchestres de « jazz » des années 20 aux solistes tels que que le saxophoniste Emilen Antile, le guitariste André Coudouant, le clarinettiste Robert Noisron, le pianiste Michel sradaby qui s’illustrèrent à la suite du bop, les Antilles ont envoyé des bataillons de musiciens, des générations d’excellents instrumentistes, mais pour peupler les longues nuits de séance studio plus que pour exprimer leurs différences de styles. Rares sont ceux qui réussiront à se faire un nom, à passer à la postérité du patrimoine national. Des pianistes en pagaille, des souffleurs en rafale, des tambours en série, des chanteurs d’exception…Des dynasties entières quand on songe aux Louiss, père et fils, à la fratrie Jean-Marie, à la famille Fanfant, de Roger directeur d’orchestre dans les années 20 à Jean-Philippe, qui a traversé le siècle et du mêm coup tout le spectre de la musique noire. Tous ceux-là seront bien là parmi les plus grands, bien peu sur le devant de la scène. Tous iront contre mauvaise fortune aller chercher la reconnaissance à Paris. « et sans doute inconsciemment une respectabilité ; Mais en même temps, ils étaient porteurs de leurs différences, des idées nouvelles nées aux États-unis », souligne Vinceno. L’émigration s’accélère avec l’exposition coloniale de 1931, où les soufflants antillais s’affichent tout pavillon dehors. C’est à la capitale que ces amateurs se professionnalisent, s’inspirent des autres musiques pour créer, même si la biguine tient alors le haut du pavé. Le phénomène va s’amplifier avec la guerre, et l’impossibilité pour les musiciens américains de venir swinguer. « La guerre a permis aux Antillais de remplacer les Américains dans les grands orchestres. Cela s’est fait naturellement d’autant que certains, comme Sam Castendet, avaient déjà gravé des pièces de jazz avant-guerre. Ils jouaient à l’identique. Un musicien comme Mavounzy était capable de tout mémoriser et rejouer, ajoutant un petit vibrato très personnel », analyse Jean-Pierre Meunier. Le jazz, les musique cubaines et autres versions latines n’ont plus aucun secret pour les antillais. Mais l’âge d’or de la biguine se situe dans l’après guerre et les années 1950. C’est l’époque des grands lieux qui font courir le tout-Paris, mais aussi les musiciens américains de passage. Il n’est pas rare d’y entendre les grands jazzmen de passage y boeuffer tard dans la nuit. Il y a la Boule Blanche, la Canne à Sucre, le bal de la rue Blomet…Il y a surtout La Cigale, la grande brasserie de Pigalle qui va brasser toutes les générations jusqu’à sa fermeture, le 28 Septembre 1975.Le wabap d’Al LirvatDu haut de ses 87 printemps, Al Lirvat se souvient de ses vertes années. Sa carrière est exemplaire, son style emblématique. Guitariste autodidacte, il déboule de sa guadeloupe en Décembre 1935. Il est déjà un bon musicien amateur, un compositeur en herbe, mais pas encore le visionnaire loué par tous. Plusieurs rencontres vont s’avérer décisives, à commencer par celle avec Félix Valvert : « Il m’a embauché dans son orchestre pour remplacer son tromboniste qui venait de mourir. Seulement, moi, j’étais guitariste ! J’ai donc tout appris à l’oreille, en travaillant les chorus de Jack Teagarden, JJ Johnson et JC Hingginbotham ». C’est ainsi qu’il se met au jazz américain, initié par son ami Charles Delaunay. Il est vite cité au plus haut dans les classements du Hot Club. Et là, deuxième révélation qui cette fois va révolutionner la biguine. « En février 1948, j’ai assisté comme tous ceux qui étaient curieux au concert de Dizzy avec Chano Pozzo à Pleyel. Bien entendu, dans ce déluge de notes, on n’y comprenais rien ! Mais quand j’ai commencé à piger, tout est devenu limpide. Et je me suis dit : pourquoi ne pas faire pareil avec la biguine ? » Il crée alors le wabap, c’est-à-dire les principes du cubop et du bebop appliqués à la biguine, qu’il modernise en intégrant des assonances et des dissonances, des accords altérés et des rythmes en cinq, six et sept temps. « Le nom m’a été soufflé par Nelly, une danseuse de la Canne à Sucre ». « Doudou pas pleuré » sera le titre phare qui marque une rupture avec la tradition des années 1950. Dès lors, il ne sera jamais plus tout à fait considéré comme un musicien de biguine ni comme un musicien de jazz par les puristes des deux côtés. Entre les deux, ce mélodiste raffiné était surtout en avance de cinquante ans ! Il suffit de se pencher sur ses quelques 250 compositions originales pour mesurer le talent de ce personnage qui, à la fin des années 1960 va encore inventer un nouveau rythme, le kalangué, bientôt suivi par le beka. « Deux temps after beat, deux temps biguine : la parfaite combinaison ! C’était aussi une danse, avec une cavalière et des pas bien précis ». Et de mimer sa danse sous les lambris de sa vaste demeure aux allures de palais habanero. « C’était chouette !». L’expression nous rappelle un autre « Antillais » revenu d’on ne sait où : Henri Salvador, lui aussi guitariste et fin mélodiste. En 2002, Al Lirvat vit toujours à Paris, il est encore absent des encyclopédies de jazz, au même titre que l’immense saxophoniste Robert Mavounzy.Le Tépaz de Ti MarcelÁ deux pas de chez lui, on retrouve un autre rescapé de la belle époque des mazurkas et biguines. Le saxophoniste martiniquais Ti Marcel, de son vrai nom Marcel Louis-Joseph, n’a « que » 72 ans. Lui aussi a débuté en autodidacte, « sur le pipeau de mon cousin », puis sur un biniou troqué contre un biclou. Ti Marcel découvre le jazz en gagnant à la loterie un Tépaz et un 75-78 tours de jazz. « Johnny Hodges, Coleman Hawkins et surtout Don Byas ». Il les rejoue note à note, tant et si bien que très vite on surnomme le jeune homme Don Byas. Le jour où il croise l’Américain aux Trois-Maillets, celui-ci l’invite à « se démarquer de son jeu ». Mais voilà, celui qui affirme avoir joué de tout, « du mambo, du paso doble, des boléros, des guarachas », a pour modèle les grands ténors américains de l’époque : Lester Young et Sonny Rollins, plus que Stellio et Sylvio Siobud…S’il a connu une carrière bien remplie, s’il a joué avec Quincy Jones début 60, Ti Marcel restera pour la mémoire un bon musicien de séance, n’ayant gravé qu’un disque sous son nom. Il ne regrette rien, bien au contraire. « Si j’étais resté au pays, je seraiplus connu, mais moins fort techniquement ». Et le retraité des affaires d’enchaîner quelques chorus chaloupés, du Rollins et une biguine. « Avec un solo de jazz, j’peux pas m’en empêcher ! ».La salsa du démon Guédon.Originaire de Fort-de-France et influencé par Sainte-Marie, « lieu mythique et mystique du bel air, l’équivalent du guaguanco cubain », le touche-à-tout Henri Guédon fut lui aussi un musicien attentif aux nouveaux courants venus des Etats-Unis. C’est ainsi qu’il créera très tôt la contesta, marquée par la musique latine, mais c’est endébarquant en France qu’il prend un temps d’avance sur son époque. Il participe aux prémices de la fusion du Chat qui Pêche avec Loe Maka et Tony Scott et au début des années 1970, de retour de New York, il s’illustre en créant un big band de jazz caraïbes aux fortes consonances salsa. « A Paris, nous avion plus de possibilités, les producteurs étaient plus ouverts », se souvient le quasi-sexagénaire assagi qui réalisa « les premières adaptations créoles de classiques cubains ». C’est à lui que l’on doit la vague zouk, « un mot tiré du créole qui désignait une pauvre paillote, un lieu de perdition qui accueillait toutes les fusions avec les tambours ». Aujourd’hui épuisés, « Cosmozouk » et « Zouk experience » sortirent sur CBS au milieu des années 70.Á écouter ces tourneries insensées, on mesure le contresens historique et esthétique qui va suivre, même si les premiers disques de Kassav, de Malavoi, sont loin d’être sans qualité. « Le zouk ne me gêne pas. Il y en a juste trop, et pas assez bon ». A l’époque, il enflamme L’escale, lieu de rendez-vous des danseurs et transeurs. Avec le recul, celui qui se considérait comme un franc-tireur, l’ami de Pierre Goldman, estime que « cette attitude a fait avancer les choses ». « Je me souviens que le public communautaire nous sifflait. Il nous fallait prendre le maquis ! Mais nous avons montré le chemin aux plus jeunes ». Depuis bientôt vingt ans, le percussioniste-compositeur s’est fait plus discret, favorisant une autre facette de son travail, les arts plastiques. Il n’en reste pas moins créatif, toujours prompt à se lancer dans l’aventure si tant est qu’on lui donne l’envie et la place. La réécoute attentive de disques comme « Afro Blue » et « Afro Temple » est un argument qui devrait achever de convaincre les plus sceptiques…Retour aux racinesSi la fermeture de la Cigale conclut la fin d’une ère, celle d’un jazz antillais aux couleurs de la biguine, c’est à la même époque que débarquent progressivement d’autres musiciens, cette fois plus soucieux de valoriser leurs origines africaines. L’heure n’est pas encore à la world, mais déjà à la « musique racine ». Le ka et la flûte en bambou peuvent enfin desczendre des mornes. Depuis les années 60, quelques maisons (Cellini, Emeraude, Mavounzy) publient des disques de cette musique de « mauvais garçons », mal considérée voire envisagée comme une tache sur les vestons bien propres et lisses de la bourgeoisie typique. « dans le miouvement d’assimilation, le ka était un symbole dérangeant. Pour moi, il est l’affirmation de notre identité », pointe Klod Kiavé, tambourinaire guadeloupéen arrivé en 1994 avec la dernière vague et coleader du groupe Wopso. Q’importe : les temps changent, l’heure est à l’indépendance et les tambours sont là pour rappeler de douloureux souvenirs. En la matière, quelques personalités vont vite s’illustrer : le flûtiste Max Cilla, les percussionistes Robert Loyson, Ti Raoul Grivalliers…Là encore, impossible de tous les citer tant le vivier est riche. Il en est deux pourtant que l’on ne peut passer sous silence : Eugène Mona et Marcel Lollia, plus connu sous le sobriquet de Vélo. Le premier est martiniquais, joue de la flûte et chante comme Fela. Le second est guadeloupéen et frappe les peaux aussi fort, aussi juste, qu’un Patato. L’un et l’autre incarnent l’âme noire qui renaît. La légende de l’un et le mythe de l’autre ne traverseront jamais tout l’océan. Vélo terminera dans le caniveau, Mona dans le quasi oubli. Et pourtant n’importe quel percussionniste antillais vous dira que Vélo était le meilleur marqueur, à la fois le plus ouvert et le plus conscient de ses racines. L’un comme l’autre ont réveillé les consciences. Leur spiritualité va irradier toutes les générations à venir à Paris. D’autant mieux qu’en métropole, l’heure est au free. Les héritiers de Césaire peuvent enfin sortir du ghetto, la musique bwa-bwa ou chouval-bwa raisonner de son plus bel écho. Et là encore, la parenté est évidente avec les musiques noires américaines. « Il existe un sentiment ka comme il existe un sentiment blues », résume Klod Kiavé. « Le boladieul, c'est-à-dire le tambour de bouche dans la musique ka, c’est du scat qui s’ignore », précise Roland Brival. […]Trois livres pour en savoir plus« Félix Valvert, le roi de la rumba » (Ed. New Legend), par Isabelle de Valvert. La biographie du saxophoniste et chef d’orchestre qui en forma plus d’un. Á noter la future parution dans la même collection d’un ouvrage consacré à Al Lirvat. « La Biguine de l’Oncle Ben’s » (Ed. Caribéennes), par Jean-Pierre Meunier et Brigitte Léardée. Avant de devenir le célèbre Oncle Ben’s, Ernest Léardée a traversé le siècle et l’océan pour imposer à Paris le son typique de la biguine.« Musiques & musiciens de la Guadeloupe », par Alex et Françoise Uri. Un ouvrage un peu ancien mais qui a l’intérêt de bien insister sur les racines de la musique antillaise.Jacques DENIS© VIBRATIONS
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La compagnie cévenoleLa biguine martiniquaise revit au pied des Cévennes, grâce à l'Antillais Gérard Tarquin et sa clique métissée qui ont fait d'Anduze un fief des tempos créoles.La biguine avait disparu sous le rouleau compresseur du zouk électrique. Voici ses danses guillerettes et facétieuses ressuscitées, non à Saint-Pierre, au sud de la montagne Pelée où elle est née, mais à Anduze, dans le Gard, au pied des Cévennes, où vit Gérard Tarquin, clarinettiste martiniquais au teint blême, hanté par ses racines nègres. Au sein du groupe Coeur de Chauffe - qui emprunte son nom au nectar de rhum -, il redonne vie aux alliages de tambours bel-air, de figures de carnaval et de mazurka européenne qui ont fait les beaux jours du Bal nègre de la rue Blomet, à Paris, au début du XXe siècle. Les amateurs de jazz New Orleans connaissent bien Tarquin, puisqu'il fut un des fondateurs du groupe Les Haricots rouges, dont le swing un brin désuet se taille un joli succès populaire depuis une quarantaine d'années. « Au fond, se défend-il, nous ne devons pas être si ringards que ça : je me souviens par exemple avoir fui un plateau télé pour aller faire le boeuf avec Sun Ra. D'ailleurs, lorsque dans notre dernier album nous avons adapté Angela, de Saïan Supa Crew, tout le monde a pensé que c'étaient les rappeurs qui s'étaient inspirés de nous et non l'inverse. La créolité de La Nouvelle-Orléans, ne l'oublions pas, est cousine des métissages antillais. » Le goût de Tarquin pour les jam-sessions et son sens de la famille hérité des fêtes martiniquaises de son enfance (dans le 13e arrondissement, à Paris) ont entraîné nombre de musiciens, jeunes ou moins jeunes, dans son sillage. « C'est un gourou », dit Lulu, le batteur des Têtes raides, qui a fait le boeuf avec lui il y a vingt ans, en Seine-et-Marne où tous deux habitaient, puis à Anduze où il est souvent venu le voir avant de décider, il y a trois mois, d'y jeter l'ancre. D'autres potes de l'époque du lycée Rodin à Paris, ou des débuts des Haricots rouges en Seine-et-Marne, ont fait à peu près le même parcours. La plupart d'entre eux se retrouvent dans le groupe Coeur de Chauffe pour sortir la biguine « du folklore distillé dans les musées que sont les maisons de la culture ». « C'est une musique qui parle aux gens et qui les fait bouger », s'emballe Tarquin. « C'est une musique gaie qui donne le goût de vivre », ajoute Joseph Zobel, 90 ans, auteur de La Rue Cases-Nègres, lui même installé à Anduze depuis 1976. Grâce à son fils Roland Zobel dit Zozo, potier et grand amateur de noubas antillaises, nombre de Parisiens, musiciens ou non, se sont pris de passion pour ce verdoyant petit coin du Gard connu pour ses camisards d'autrefois et ses inondations d'aujourd'hui. « Zozo et moi, on s'est trouvés dans la même situation, lui très noir, moi très blanc, aucun de nous deux n'ayant vécu aux Antilles, raconte Tarquin. C'est dans sa superbe maison en surplomb d'Anduze que peu de temps avant sa disparition, à 58 ans - en mars 2004 -, le disque Couleur cachée a été enregistré à haute dose de rhum, boudin, accras et colombo. » Cette bonne ambiance est palpable tout au long de ce CD aux saveurs rétro, où flotte l'esprit d'Eugène Delouche, illustre clarinettiste martiniquais qui fut le maître de Tarquin. Le piment poétique et gouailleur y est distillé par la chanteuse Maura Michalon, venue du lyrique, qui sait retrouver l'âpreté des biguines du « temps longtemps » (comme on dit en créole), et l'accordéoniste-vocaliste Roland Pierre-Charles, ex-membre de La Perfecta, groupe culte antillais des années 70, qui insuffle à l'ensemble une énergie goguenarde et rageuse aux frontières du rock. Tous les morceaux interprétés sont des grands classiques signés Ernest Léardée, Alexandre Stellio, Léona Gabriel, Al Lirvat, Loulou Boislaville... Sauf Couleur cachée, la chanson-titre écrite par Gérard Tarquin, qui laisse libre cours à son blues de « sang-mêlé » et à son goût du balancement chaloupé : « Biguine Saint-Pierre bien cadencée /Mon Dieu ce que j'en ai rêvé /C'est dans mon sang, c'est dans mon âme /Oui mais je suis né à Paname. »par Eliane Azoulay - Télérama n° 2916 - 30 novembre 2005, ffff
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Frémeaux & Associés est le premier éditeur sonore du patrimoine créole. La direction de la réédition de toute l’histoire de la musique antillaise a été confiée à M. Jean-Pierre Meunier, spécialiste de la musique et de l’histoire des Antilles.Ce travail a été honoré de l’ensemble des distinctions de la presse World Music, comme de la presse classique ou jazz. Frémeaux & Associés est particulièrement sensible aux nombreux courriers reçus depuis les Antilles de la part d’auditeurs heureux d’avoir pu retrouver la mémoire de leur histoire (biguine, valses & mazurkas créoles, naissance du zouk et du mambo…)
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Une réédition formidable qui met enfin en lumière l’éclosion de la biguine à Paris dans les années trente ( « Biguine 1929-1940 », Frémeaux)… […] La biguine est née dans ces terres néo-colonisées que sont les Antilles français (Guyane, Guadeloupe, Martinique). Les musiques issues de ces « poussières d’îles », métissages complexes et spécifiques, seront les fers de lance de la reconstitution de communautés fragmentées et déracinées. Une musique, une dérision du quotidien, une déviation des codes culturels coloniaux par l’accentuation rythmique (et polyrythmique), la fusion de l’emprise du terroir et de la palilalie des musiques à tradition orale. Biguine et jazz, tous deux afro-américains, reposent sur les mêmes fondements sociaux. Il semble à tous ces titres que jazz et biguine soient des musiques jumelles. Elles ne l’ont que tardivement reconnu. Nos îles, isolées l’une de l’autre et toutes tendues vers leurs métropoles respectives, vivront un développement culturel à « faible convergence » comme l’a écrit Denis Constant, avec trois axes musicaux que l’on peut retrouver sur chacune d’entre elles. D’abord les sources Africaines : Laghia, Bel-air, Lérose, Calenda, Haute-taille…Ensuite une inspiration européenne : valse, quadrille, mazurka, boléro, biguine. En fin, une musique à tendance syncrétique ou fusionnelle : cadence-lypso originaire de Haïti, afro-cubain. L’intérêt, le rapprochement naturel entre Caraïbes et États-unis est à l’origine de l’enrichissement mutuel de ces musiques. Se rappeler du contexte, le grand mouvement panafricaniste des années vingt, mené par les philosophes et les politiques (Marcus Garvey). Mais ce rapprochement n’eut pas lieu autour du golfe du Mexique. C’est Paris, lieu de convergence des jazzmen américains et des musiciens antillais, qui a servi de décor. Peu d’éléments de mémoire nous restent des années d’avant guerre, en ce qui concerne la biguine, si ce n’est par la tradition orale perpétrée notamment dans les « vidés » du carnaval…Nous savons qu’elle a mûri à Saint-Pierre (en Martinique), Basse-Terre et Pointe-à-Pitre (en Guadeloupe). En revanche des témoignages sur le renouveau de cette musique depuis 1920 sont précis et parfois gravés (le disque compilation « Biguine » ou le livre sur Ernest Léardée La biguine de l’oncle Bens de Jean-Pierre Meunier et Brigitte Léardée aux Éditions Caribéennes). Les grands précurseurs du renouveau de 1929 à 1940, que l’on retrouve sur « Biguine », furent Stellio, Lancry, AlLirvat, Léona Gabriel, etc. Cette compilation des 78 tours de l’époque contient un livret remarquable de concision et de d’histoire, et j’y ai réellement reconnu et retrouvé l’âme de nos îles…Ensuite, après 1945, de Robert Mavounzy à Bib Monville, en passant par Alain Jean-Marie, Mario Canonge ou Chyco Jehelman, la biguine s’est enrichie de la musicalité des harmonies modernes. Le traitement des mélodies, les découpages rythmiques, les possibilités d’improvisation sont autant d’emprunts à la culture, à l’esprit jazz. […] Aujourd’hui, la symbiose entre jazz et biguine s’accentue, autour des musiciens déjà cités avec bien sûr Alain Jean-Marie qui a réalisé tout récemment un merveilleux « Biguine Reflexions ». Après avoir goûté la musique fusion, Alain Jean-Marie joue bebop, puis jazz classique…Il fouille aujourd’hui dans notre patrimoine antillais à la recherche de la « machine à remonter le temps », selon son expression. Avec Malavoi, groupe phare « tout public », l’impact déborde les plus ardents défenseurs d’une approche jazz.Claude SOMMIER - JAZZMAN
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Clarinettist and bandleader Ernst was a leading figure on the French Carribean music scene in Paris by the 50s, having been a member of Stellio’s band when the music first got onto wax at the end of the 20s. The first CD of this two-disc collection is a textbook example of how good this music can be, a collection of mainly driving, endlessly inventive biguines, including some older items from the Antillean repertoire. Unfortunately the second CD is much more inconsistent, featuring the band playing « tropical » music (a hazard for Carribean bands in the 50s) behind a succession of vocalists of varying ability and aptitude ; Gilles Sala and André Salvador (brother of the better known Henri) are fine, but the others … Buy this one of the first CD ; the second is for historical interest rather than listening pleasure. Norman DARWEN – ROCKNREEL
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After the Second World War the French Carribean biguine underwent a period of modernisation, with clarinettists/bandleaders Castendet and Léardée, both of whom had recorded in the thirties, two of the main protagonists. Sam’s set is a joy from beginning to end, surprisingly modern in approach and in places quite similar to the sound of fifties calypso. He is on drums for all but one of the eighteen titles, all of wich were made for Columbia and he recreates all six titles  from his 1949 session for the Music Monde label. His lyrics are often scathing, pointed, humorous and sometimes dealing with the, er, earthier side of life (in French or Créole, of course), whist Maurice Noiran handles clarinet duties and trombonist Al Lirvat adds vibrant playing that is as distinctive as any in the biguine canon. As half of « Martinalès et Alberto » Al, alongside his Corsican wife Marthe Alessandrini, also supplies sprightly créole vocals  to seven titles . Supplementing these numbers and completing the reissue of all Castendet’s pre-war titles by Fremeaux are a biguine and a rumba recorded in 1936 as by « Jam Castendet » and including trumpeter Bobby Jones, a veteran of Will Marion Cook’s Southern Syncopated Orchestra. Ernest Léardé’s double CD is a much more varied affair, containing many biguines, but as was common with Black bands in Europe at the time he also recorded in other « tropical styles »  (designations on the original labels include « samba », « bolero », « Afro-cubain » and many more). Though the first CD is Léardé’s, and the first twelve titles (half a dozen each from 1952 and 1954) are absolute classics – including « Ces zazous Là », a version of the calypso known in English as « Brownskin Gal » - the second finds him working as accompanist to several vocalists. Some are better than others : Antillean Gilles Sala is fine, Spaniard Severiano Alvarez is « a romantic » vocalist, and Les Sœurs Bordeau and Simone Alma are not entirely devoid of merit, even if only in the accompaniments, despite the latter performing what is designated a « Blues créole ». Singer/guitarist André Salvador is the brother of the better-known entertainer Henri, the man responsible for introducing rock and roll into France. The titles here constitute André’s complete discography and for someone looking for the carribean sound, they are maddeningly inconsistent. Included also, for the sake of completeness (as Ernest Léardée is not present), is André’s very worthy version of Lionel Hampton’s « Hey ! Ba Ba Re Bop », recorded in December 1946. The CD closes with a fourteen-minute excerpt from an interview with Ernest, who died in 1988, aged 92. As stated, the Sam Castendet release is a real gem ; Ernest Léardée’s is more variable in quality though there is enough fine material to make purchase woth considering if you have a taste for the vintage sounds of French Carribean. Norman DARWEN-BLUES &RHYTHM
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Il était chanteur, fantaisiste, excellent guitariste , mais il n’y avait pas de place pour deux Salvador dans la variété française. D’autant qu’André ressemblait à s’y méprendre à son cadet Henri.Arrivés ensemble en France en 1929, les deux frères s’initient de concert à la guitare et débutent en duo en 1937 dans les cabarets parisiens. Fin 1941, Henri part pour l’Amérique du Sud avec Ray Ventura. A son retour quatre ans plus tard, les carrières des deux Salvador ne se croiseront plus. Tandis que le plus jeune accède à la notoriété, l’aîné ramasse quelques miettes, en province ou en Afrique du Nord, où il est annoncé comme «le fantaisiste atomique» ou «la trompette humaine».Moins enjôleur. Mais Henri garde ombrage de la concurrence, soupçonnant son frère (ou ses impresarios) d’entretenir la confusion... La carrière d’André ralentira, jusqu’à s’effacer, au profit du sport où il excelle (ski,arc,arts martiaux). Après dix ans au Canada, il s’éteint en France dans l’anonymat, en 2003.Il aura fallu attendre 2007 pour entendre sur disque la modeste œuvre gravée (1) par ce frère caché, et découvrir son histoire, sous la plume de Jean-Pierre Meunier, dans un passionnant livret. André Salvador est un chanteur moins enjôleur que son frère mais non moins convaincant, et il est admirablement soutenu par l’orchestre de biguine d’Ernest Leardée. Il y a plus troublant : en 1946, André grave sur 78-tours le classique Hey Ba Ba Rebop de Lionel Hampton, avec l’orchestre d’André Ekyan. Avec une énergie prérock’n’roll inédite dans la France de l’époque. Pendant ce temps, toujours avec Ray Ventura, son aîné Henri joue un swing plus proche de Glenn Miller que de Big Joe Turner." par François-Xavier GOMEZ - LIBERATION
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"Il y a un temps de la créolité dans lequel la musique a été plus déchirante, plus poignante, plus blessée. Je l’associais à ces histoires de calypso très ancien (le fameux Mango vert des Trinidadiens à New York en 1912), un peu de ce que nous a laissé Stellio dans les années 30… Voici qu’on en retrouve encore l’écho dans ce que Frémeaux publie d’Ernest Léardée. A l’ouverture du premier des deux CD, un Tout’ moun pleuré qui sonne très inter-caribéen, avec un je ne sais quoi de vigoureusement dansant dans le couplet et de furieusement lacrymogène dans les refrains à deux clarinettes (Sylvio Siobud et Ernest Léardée). Et c’est de 1952.Survivance ou tradition, je ne sais pas, mais il y a dans ces enregistrements-là quelque chose qui n’est assurément pas de la même eau de ce qui s’entendra dix ans plus tard. On est même plutôt dans les couleurs de vingt ans plus tôt. Evidemment, Léardée se souvient de son heure de gloire avec son compagnon de traversée Alexandre Stellio, alors que le calypso explose partout en Occident. D’où mémoire, d’où convergence…Et c’est sublime, d’une tristesse enjouée comme on ne sait plus la rendre, je ne sais pas pourquoi. Sur le même album, on aurait pu se passer des danses sud-américaines, mais on est époustouflé par l’exhumation des enregistrements d’André Salvador (le frère aîné, beau talent et carrière douloureuse). Ah, que tout cela est beau…" par Bertrand DICALE - Chroniqueur au FIGARO
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« Biguine, mambo, samba et boléro… Le violoniste, clarinettiste et saxophoniste martiniquais Ernest Léardée (1896-1988) fit les beaux jours du Bal nègre de la rue Blomet, à Paris, des dancings des bords de Marne et des bals de province, avant de sillonner les casinos de la côté normande, et d’enregistrer quelques-uns des 78-tours ici compilés. Gaieté frondeuse et énergie gouailleuse sont au rendez-vous. Au chant officie André Salvador, le frère d’Henri, qui possède la même piquante fantaisie que son cadet. » TELERAMA – Sélection Noël.
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Jean-Pierre Meunier poursuit son entreprise de réédition de la musique antillaise enregistrée en France, avec Ernest Léardée, d'abord violoniste dans l'orchestre Stellio, puis clarinetiste dirigeant sa propre formation au début des années 50. Ces rares enregistrements Riviera, Festival et Saturne nous permettent d'entendre aussi Simone Alma. Cet album nous propose en outre l'intégrale des disques d'André Salvador (1913-2003) dont la ressemblance avec son frère Henri était, physiquement et vocalement étonnante. On sait qu'Henri se facha définitivement avec son frère aîné (Grand Prix du disque 1947) car il faisait un peu d'ombre à sa propre carrière... PHONOSCOPIES
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« Violoniste, saxophoniste et prolifique compositeur, Ernest Léardée est un géant de la musique antillaise arrivé à Paris de sa Martinique natale à la fin des années 20. Ce pilier du fameux « Bal Nègre » de la rue Blomet dans le 15ème arrondissement fut l’inventeur, de la biguine créole. Ce double CD rassemble les 78 tours enregistrés après la Deuxième Guerre mondiale, qui marquent une nouvelle évolution de la biguine sous influences cubaine et latino-américaine. Cha cha cha, mambo, baïon, samba et guaracha qui triomphent alors. On retrouve aussi l’intégrale du chanteur André Salvador, grand frère et rival malheureux d’Henri auquel il ressemble étonnamment et qui grava huit faces avec l’orchestre Léardée. » J-P. B. - MONDOMIX
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Liste des titres
  • Piste
    Titre
    Artiste principal
    Auteur
    Durée
    Enregistré en
  • 1
    Tout Moune Pleure
    Siobud
    00:02:32
    1952
  • 2
    Nana
    Siobud
    00:02:59
    1952
  • 3
    Douvan Pote Doudou
    Siobud
    00:02:41
    1952
  • 4
    Ces Zazous-Là
    Siobud
    Ramon Don
    00:02:38
    1952
  • 5
    Eulalie
    Siobud
    00:02:55
    1952
  • 6
    A Karukera
    Siobud
    Liferman Georges
    00:02:40
    1952
  • 7
    Carnaval à La Martinique
    Noiran
    Ramon Don
    00:02:35
    1952
  • 8
    Ce Filon
    Ernest Léardée
    00:02:44
    1954
  • 9
    Moin Aime Ti Fi Y A
    Ernest Léardée
    00:02:55
    1954
  • 10
    Oui C'est Samba
    Ernest Léardée
    00:02:52
    1954
  • 11
    Oue Oue
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:44
    1954
  • 12
    Gade Chabine La
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:56
    1954
  • 13
    La Belle Amelie
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:56
    1950
  • 14
    Moin Aime Ti Fi Y A
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:04
    1951
  • 15
    Tu Dulce Douceur d'Un Beau Rêve
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:24
    1951
  • 16
    Terre de Feu
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:35
    1951
  • 17
    Mambocito
    Ernest Léardée
    Domenico A. Di
    00:03:08
    1954
  • 18
    Bayo Coco
    Ernest Léardée
    Berry L.
    00:02:59
    1954
  • 19
    Macaco
    Ernest Léardée
    Domenico A. Di
    00:02:57
    1954
  • 20
    Samba Do Brazil
    Ernest Léardée
    Suelto R.
    00:03:21
    1954
  • 21
    Mieux Que Toi
    Ernest Léardée
    Domenico A. Di
    00:03:16
    1954
  • 22
    Bonne Année
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:52
    1954
  • Piste
    Titre
    Artiste principal
    Auteur
    Durée
    Enregistré en
  • 1
    Rever d'Un Baiser
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:46
    1951
  • 2
    Haiti Chérie
    Ernest Léardée
    00:03:09
    1951
  • 3
    Le Chant des Bongos
    Ernest Léardée
    Calmon
    00:02:53
    1951
  • 4
    Je Cours Après Mon Coeur
    Ernest Léardée
    Gottlieb R.
    00:02:54
    1952
  • 5
    Rythme des Antilles
    Ernest Léardée
    Sala Gilles
    00:02:55
    1952
  • 6
    Dolorosa Cancion
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:03
    1951
  • 7
    Linda Maria
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:31
    1951
  • 8
    Moin Aime Ti Fi Y A
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:35
    1953
  • 9
    Tout Moune Pleure
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:22
    1953
  • 10
    Petite Fleur Fanée
    Ernest Léardée
    Salvador A.
    00:02:42
    1951
  • 11
    Quand J'étais Petit Garcon
    Ernest Léardée
    Salvador A.
    00:02:46
    1951
  • 12
    Lamoula Créole
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:09
    1951
  • 13
    Mambo Mambo
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:02:49
    1951
  • 14
    Chocolat à La Vanille
    Ernest Léardée
    Beauregard Abel
    00:02:42
    1951
  • 15
    Aux Caraïbes
    Ernest Léardée
    Beauregard Abel
    00:03:06
    1951
  • 16
    Yengoue
    Ernest Léardée
    Beauregard Abel
    00:03:05
    1951
  • 17
    Guaracha Ma Mya
    Ernest Léardée
    Leardee Ernest
    00:03:22
    1951
  • 18
    Hey Ba Ba Re Bop
    Ernest Léardée
    Hammer C.
    00:02:53
    1946
  • 19
    Ernest Léardée Raconte
    Ernest Léardée
    00:13:41
    1983
Livret

ERNEST LEARDEE

ERNEST LEARDEE
RYTHMES DES ANTILLES (1951-1954)

Avec l’Intégrale ANDRÉ SALVADOR



Ernest Léardée
Le compositeur et chef d’orchestre martiniquais Ernest Léardée, décédé en 1988 à l’âge de 92 ans, nous a laissé un récit fort détaillé de sa longue vie de musicien (La Biguine de l’Oncle Ben’s, par Jean-Pierre Meunier et Brigitte Léardée, Éditions Caribéennes, 1989). Il fut pendant dix ans violoniste dans l’orchestre d’Alexandre Stellio, de 1919 à la Martinique jusqu’en 1929 à Paris. C’est dans cette formation légendaire qu’Ernest Léardée fait ses premiers enregistrements chez Odéon en octobre 1929. Il grave ensuite une série de disques à son nom chez Salabert en 1930 et 1931, avec son “Orchestre Antillais du Bal Blomet” (réédition Frémeaux & Associés, coffrets STELLIO et BIGUINE volumes 1, 2 et 3). L’activité discographique de Léardée s’arrête alors durant vingt ans pour ne reprendre qu’après la guerre, au début des années cinquante. C’est à cette période particulière que le présent album est consacré. Ernest Léardée était né le 9 décembre 1896, dans le quartier populaire des Terres-Sainville à Fort-de-France. Il était le dernier d’une fratrie de cinq enfants, deux garçons et trois filles, tous de pères différents. Leur mère Stéphanie Balthazar avait épousé sur le tard Philippe Léardée, un marin à la retraite devenu gardien du phare de la Pointe des Nègres à Fort-de-France. Celui-ci reconnaît le petit Ernest et lui donne son nom devant l’État-civil. Ernest a six ans quand explose la Montagne Pelée en 1902, détruisant Saint-Pierre et y faisant 30 000 victimes. Quelques semaines plus tard, une autre éruption projette une grêle de scories sur Fort-de-France, pourtant distante de plus de trente kilomètres, provoquant une effroyable panique. Ernest sera marqué toute sa vie par le souvenir de ce jour de terreur suivi peu après du décès de sa mère malade. En juillet 1905, son père adoptif meurt à son tour. Orphelin à neuf ans, Ernest est pris en charge par sa sœur Yaya. Commence alors une existence difficile. Après l’école et pendant les vacances, le jeune garçon s’ingénie à gagner quelque argent par toutes sortes de petits “jobs” exécutés pour des artisans de la ville. Il est tour à tour porteur d’eau, chasseur de colibris, matelassier, maçon, cordonnier…
Son destin change du jour où il est pris en affection par Marius Collat, menuisier ébéniste et luthier qui l’engage comme apprenti. À dix ans, Ernest abandonne l’école. Marius Collat lui apprend la menuiserie mais aussi la musique et il l’aide à fabriquer son premier violon. Ernest accompagne bientôt son patron dans les bals et les réunions électorales de la Martinique. Il le quitte sur un coup de tête en 1909 pour suivre un cornettiste brésilien qui recrutait un orchestre pour la Dominique. Au terme d’un contrat de deux mois, Ernest revient dans son île et n’ose pas affronter la colère de son ancien patron. Il trouve un emploi d’apprenti chez un coiffeur nommé Isambert Veille. Celui-ci le recommande à son demi-frère, le clarinettiste Léon Apanon qui l’engage dans son orchestre au dancing des “Folies Bergères” de Fort-de-France. Tout en exerçant son métier de coiffeur, Ernest devient un musicien familier des “casinos” de la ville : Dancing Palace, Casino Bagoé, Grand Balcon… En 1913, Ernest rachète le fonds de commerce d’Isambert Veille grâce à l’aide financière d’un oncle. À dix-sept ans, il devient son propre patron au 61 rue Schoelcher à Fort-de-France. En mai 1916, il est exempté du service militaire par le Conseil de Réforme de la Martinique à cause d’une mauvaise constitution physique. Il échappe ainsi au sort de milliers d’Antillais massacrés en Europe lors de la première guerre mon­diale. En 1919, le clarinettiste Alexandre Stellio, âgé de 34 ans, revient dans son île natale après un séjour de vingt années en Guyane. René Didier, entrepreneur et homme d’affaires, lui demande de créer l’ambiance musicale des films muets au nouveau cinéma Gaumont de Fort-de-France, salle moderne de 400 places. Stellio engage Léardée pour l’accompagner au violon. Les deux amis deviennent inséparables et se produisent aussi au Dancing Palace et au Sélect Tango. En juin 1924, Ernest Léardée épouse Angèle Luizia Maroudaye, déjà mère de leur enfant de quatre mois. À cette époque, parvient à la Martinique la rumeur de l’Exposition Coloniale qui se prépare à Paris. Léardée convainc Stellio d’aller tenter sa chance de l’autre côté de l’Atlantique. Les deux compagnons s’associent au tromboniste guyanais Archange Saint-Hilaire et engagent le batteur et chanteur Crémas Orphélien ainsi que le pianiste et violoncelliste Victor Collat. Pour trouver l’argent du voyage et du séjour, Léardée met en gage son salon de coiffure. Les cinq musiciens quittent la Martinique sur le “Pellerin de la Touche” dans la soirée du 27 avril 1929. Ils arrivent le 9 mai à Paris où leur accueil a été préparé de longue date par deux amis, Blérald et Laviolette. Le samedi 11 mai 1929, le “Stellio’s Band” inaugure le Bal de la Glacière, boulevard Auguste Blanqui. C’est un succès immédiat mais le bal doit fermer au bout de deux mois à cause des plaintes du voisinage. L’orchestre joue en juillet 1929 au “Canari”, au sous-sol de l’Alcazar (8 Faubourg Montmartre), puis à partir de septembre au “Rocher de Cancale”, restaurant dancing du quai de Bercy, face à la gare d’Austerlitz. Les affaires marchent bien. Stellio et Léardée abandonnent l’idée d’un retour à la Martinique et font venir leurs épouses à Paris. L’orchestre grave ses premiers disques chez Odéon en octobre et décembre 1929 (cf. album STELLIO FA 023). Mais un différend éclate à propos de la répartition des royalties et l’association est rompue.
Saint-Hilaire repart à la Martinique et Léardée quitte Stellio. Début 1930, il forme un nouvel orchestre pour le “Bal Nègre” du 33 de la rue Blomet, succédant au pianiste martiniquais Jean Rézard des Wouves qui avait créé ce bal en 1924. Léardée grave chez Francis Salabert les premiers disques à son nom et publie un recueil de 10 biguines créoles pour le piano. C’est alors qu’il délaisse le violon pour la clarinette et le saxophone ténor. Durant l’Exposition Coloniale de 1931, le “Bal Colonial de la rue Blomet” est une curiosité de la Capitale qui attire des milliers de touristes. En novembre 1931, Ernest Léardée ouvre son propre cabaret, “l’Élan Noir”, au 124 boulevard Montparnasse. Il le dirigera jusqu’en juin 1933. On le retrouve ensuite à “La Nuit Cubaine” jusqu’en janvier 1934, au “Villon-Holahée” (47 boulevard Saint-Michel) de février 1934 à juin 1935, puis au “Mirage” (9 rue Delambre) de juillet 1935 à août 1937. De septembre 1937 à janvier 1938, Ernest Léardée anime le dancing du “Chalet du Lac” à Saint-Mandé. En février 1938, avec une nouvelle formation, il part pour une tournée en Allemagne, en Autriche et en Hongrie. Après quelques soirées dans un cabaret juif de Budapest, les musiciens se heurtent au harcèlement raciste et antisémite de la police locale et doivent s’enfuir précipitamment. Le 17 mars 1938, cinq jours après l’annexion de l’Autriche par les forces nazies, Ernest est arrêté au poste frontière de Salzbourg. Il est libéré et peut revenir en France grâce à l’intervention providentielle d’une autrichienne qu’il avait connue quelques années plus tôt à Paris. Fin mars 1938, Léardée se produit à “La Féria” (12 rue Victor Massé à Paris) puis il fait la saison d’été à La Baule comme saxophoniste dans l’orchestre du danseur Mayamba à “La Potinière Hawaïenne”. De septembre 1938 à juin 1939, Ernest Léardée dirige l’orchestre du “Rio”, le dancing de l’hôtel Bellevue, 5 rue Jean Roisin à Lille. À partir du 13 juillet 1939, nouvelle saison d’été à La Baule comme chef d’orchestre de “La Potinière Hawaïenne” jusqu’au 2 septembre 1939, date du déclenchement de la seconde guerre mondiale. De retour à Lille, Léardée joue à partir du 5 octobre au “Miami”, le cabaret-dancing de l’Hôtel Carlton. Son pianiste est le jeune Jack Diéval, tout frais émoulu du Conservatoire de Douai, qui deviendra plus tard une célébrité du jazz. Le 19 mai 1940, les forces allemandes sont aux portes de la ville. C’est le départ en catastrophe. Au terme d’un voyage mouvementé, le hasard conduit Léardée dans l’Yonne, au hameau du Deffand près de Saints-en-Puisaye. Conquis par la beauté et la tranquillité de ce coin de campagne, il loue une maison et s’y installe pendant toute la durée de la guerre. Il se convertit aux travaux de la terre, élève des porcs et de la volaille, reprend son métier de coiffeur et donne des cours de musique aux villageois. À la fin de la guerre, Ernest s’installe à Fontenay-sous-Bois avec l’intention d’y ouvrir un salon de coiffure mais il est vite rejoint par la musique. En novembre et décembre 1945, avec les guitaristes Pierre Louiss et Valentin Gérion, il est saxophoniste au “Potomac”, club américain installé dans un grand hôtel de la rue de Lyon à Paris.
À partir de janvier 1946 et durant sept ans, Léardée anime avec son orchestre les bals du samedi et du dimanche après-midi à la célèbre guinguette “Chez Maxe”, 162 quai de Polangis à Joinville, sur les bords de la Marne. Il se produit le soir dans divers cabarets de Paris : “Le Sérail” (29 rue du Colisée) en juin 1946, “La Canne à Sucre” (4 rue Sainte-Beuve) de juillet à octobre 1946, “La Boule Blanche” (33 rue Vavin) de décembre 1946 à février 1947. Puis il se consacre à des soirées privées et des bals. Il fait aussi des doublages de films et prend des cours d’harmonie. À partir de novembre 1948, le vendredi et le samedi soir, il fait partie de l’orchestre animé par Jenny Alpha au “Cercle de la France d’Outre-Mer” (6 Square Rapp). Le 1er septembre 1949, Ernest Léardée entre à la SACEM comme compositeur. D’avril à septembre 1950, il se produit au cabaret “Le Bosphore” (18 rue Thérèse). À partir d’octobre 1950, il participe avec Gilles Sala à l’émission “Rythmes et Charmes des Antilles” qui passe à la radio tous les samedis de 7h à 7h30 et il en compose l’indicatif. Le succès de cette émission le décide à faire de nouveaux disques. En 1951, il enregistre avec Gilles Sala chez Ducretet-Thomson et avec André Salvador chez Festival et Saturne. En janvier 1952, il grave trois disques de biguine pour Eddie Barclay sous la marque Riviera. Le 26 mai 1952, Léardée est admis comme auteur à la SACEM. Le 18 octobre 1952, débute sur le Poste Parisien l’émission “Visages de Soleil” animée par France Danielly chaque samedi de 17h20 à 18h00, émission qui deviendra “Au delà des Mers” à partir de septembre 1953. L’activité d’Ernest Léardée se partage alors entre le Cercle de la France d’Outre-Mer, les bals, galas, émissions de radio, séances d’enregistrement et matinées de “Chez Maxe”. Le 21 décembre 1952, le dancing est entièrement détruit par un incendie. Dès le 18 janvier 1953, Ernest Léardée débute un nouveau contrat au “Chalet de Champignol”, quai de Champignol à la Varenne Saint-Hilaire. Il y animera les matinées de week-ends jusqu’en janvier 1958. Durant les saisons d’été depuis 1951, son orchestre et sa chanteuse Lola Berry sont au programme des casinos de la côte normande : Cherbourg, Coutainville, Saint-Pair-sur-Mer… En janvier 1954, nouvelle séance de six biguines pour Eddie Barclay.
Le 15 février 1954, Ernest Léardée est inscrit comme éditeur professionnel à la SACEM. Le 2 novembre 1954, il ouvre sa maison d’édition : “Les Rythmes Nouveaux”, au 14 rue Mauconseil à Fontenay-sous-Bois. Le siège se déplace en 1957 dans les anciens locaux de Vincent Scotto, 3 rue Gustave Goublier à Paris. En juin 1955, l’orchestre Léardée participe, au Jardin des Tuileries, à la 8e Kermesse aux Étoiles présidée par la Maréchale Leclerc de Hauteclocque. Le 18 janvier 1958, le contrat du Chalet de Champignol se termine. Léardée et son orchestre se déplacent alors “Chez Grosnier”, autre dancing des bords de Marne, 7 quai de la Varenne (aujourd’hui quai Winston Churchill) à La Varenne-Saint-Hilaire. À partir du 14 mai 1960, l’orchestre se produit 10 avenue de Verdun à Brévannes, au Casino de cette petite localité au sud-est de Paris. Mais l’établissement est fermé fin octobre après le décès des deux gérants dans un accident d’automobile. En juillet 1961, Léardée devient directeur du Casino de Saint-Pair-sur-Mer, fonction qu’il occupera durant cinq ans. Le casino est ouvert les mois d’été. Le reste de l’année, Léardée continue d’animer de multiples bals et galas en région parisienne. En janvier 1962, il se retire de l’édition musicale. Début 1966, à la suite de difficultés financières, le casino de Saint-Pair est vendu. Infatigable en dépit de ses 70 ans, Léardée reprend pour trois mois la gérance de “Chez Grosnier” à La Varenne, qu’il rebaptise “Léardée Dancing Club”. Puis en mai 1966, pour l’unique fois de sa vie, il retourne passer trois semaines dans sa Martinique natale. De 1966 à 1970, Léardée fait des doublages de films, participe encore à quelques bals et soirées avec sa chanteuse Tety Selva, accompagne le chanteur Christian Juin et songe enfin à sa retraite. En août 1970, il est le fameux interprète de la première publicité télévisée en France pour le riz “Uncle Ben’s”, séquence qui sera suivie de deux autres, en 1973 et 1975. Après cette prestation réussie qui le remet pour un temps sous les feux de l’actualité, Ernest Léardée tombe peu à peu dans l’oubli. Un documentaire sur sa vie est tourné pour la télévision en 1987 par Christiane Succab-Goldman et Jean-Pierre Krief (Le Roman de la Biguine). Ernest Léardée est décédé d’un cancer à son domicile de Fontenay-sous-Bois, 7 rue Gaston-Charle (Val-de-Marne), dans la nuit du 12 au 13 avril 1988. Il repose, avec sa clarinette et son violon, au cimetière communal de cette ville, tombe 1073 ter, allée centrale, 13e division.


André Salvador
Étrange destin que celui d’André Simon Salvador, chanteur et comédien aujourd’hui oublié mais qui eut son heure de célébrité après la guerre de 1939-45. Sa popularité se trouva peu à peu éteinte à la fin des années cinquante par le succès montant de son frère et presque sosie Henri, son cadet de quatre ans. Leur père Clovis Salvador, de lointaine ascendance espagnole, et leur mère Antonine Paterne, caraïbe de pure souche, étaient tous deux nés en Guadeloupe. Après leur mariage, ils avaient émigré en Guyane où Monsieur Salvador, nommé Percepteur des Contributions, était devenu un notable de Cayenne. André vient au monde dans cette ville le 27 octobre 1913, suivi de sa soeur Alice en 1915 et de son frère Henri le 18 juillet 1917. On pratique la musique en famille. Papa joue du violon et de la trompette. Maman chante et joue du piano. Antonine est aussi le boute-en-train de la maison, vive, dynamique, toujours le mot pour rire, répandant autour d’elle la fantaisie et la bonne humeur. Elle transmettra ce don à ses deux fils. Tous les enfants apprennent le piano. André fait preuve d’une étonnante facilité musicale. À l’école primaire des Sœurs de Saint-Joseph de Cluny, André commence une scolarité pleine de promesses. Mais arrivé au collège, il consacre tout son temps à la musique, au détriment de ses études. On lui supprime les leçons de piano. C’est le 16 août 1929 (et non en 1924 comme l’indique Henri dans ses souvenirs) que toute la famille débarque au Havre par le paquebot “Pérou” pour s’installer à Paris. Le père a la ferme intention de faire suivre à ses fils de solides études. Ses vœux ne seront pas exaucés. André ne décroche aucun diplôme. Dès l’âge de 17 ans, il commence à travailler comme garçon de bureau chez Chaffoteaux à Paris puis dans diverses compagnies d’assurances. Il devient ensuite apprenti mécanicien, électricien, livreur d’aspirateurs, poseur de paratonnerres… Mais ce qui le passionne avant tout, c’est la musique. Pendant l’Exposition Coloniale de 1931, André travaille le jour et danse la nuit. Son cousin le guitariste guyanais Roland Paterne est l’un des premiers adhérents du Hot-club de France créé en 1932 par Hugues Panassié. En mars 1934, il offre à André une banjoline, instrument hybride formé d’un manche de mandoline sur une caisse de banjo. C’est une révélation : “J’apprends tout seul à faire vibrer cette caisse à l’unisson de mon âme” raconte André avec exaltation. Roland lui fait découvrir le jazz. Quelques mois plus tard, André s’achète une vraie guitare, mais à quatre cordes, instrument qu’il pratiquera toute sa vie. À l’exemple de son frère, Henri se met lui aussi à travailler la guitare (à six cordes) avec acharnement. Non seulement les deux garçons sont mordus et doués pour la musique, mais ils montrent des dispositions rares pour le chant et la comédie, racontent des histoires hilarantes et improvisent des sketches. Leur destin se joue en octobre 1934 quand, à l’instigation du cousin Roland, le duo remporte un concours de chanteurs amateurs au Palais Berlitz, boulevard des Italiens à Paris. Premier prix : un contrat d’une semaine, qui sera prolongé d’autant. Nantis d’une telle carte de visite, il leur est ensuite facile de trouver un engagement, à une époque bénie où cabarets, boîtes de nuit et music-halls de tous ordres connaissaient une activité débordante.
Les deux frères débutent en janvier 1935 au “Villon”, cabaret-dancing fréquenté par les étudiants du Quartier Latin. En septembre 1935, ils passent au “Rodéo”. En octobre, André part faire son service militaire à Saverne, dans le 10e Bataillon de Chasseurs à Pieds. Un an plus tard, revenu à la vie civile, il travaille avec Henri au “Mirage”, la boîte de nuit d’Ernest Léardée à Montparnasse. Les deux garçons sont remarqués par le patron du “Jimmy’s Bar” (4 rue Huyghens) qui les engage fin novembre 1936. Ils sont accompagnés du pianiste Marcel Mazelin et du batteur hollandais Martin Sterman, originaire de Curaçao par son père. Pendant plus d’un an, aux côtés d’artistes comme Johnny Hess, Ada “Bricktop” Smith, Mabel Mercer… les frères Salvador contribueront au succès du “Jimmy’s” avec leurs chansons et sketches musicaux. En 1937, c’est au tour d’Henri de faire son service militaire. De 1937 à 1938, André travaille au “Journal”, à la “Villa d’Este” et au “Chapeau Rouge” (4 rue Arsène Houssaye) à Paris. Le 17 août 1938, le patron du Jimmy’s ouvre une réplique de son cabaret à Biarritz. Les deux frères y sont à l’affiche. En 1939, André joue à nouveau au “Chapeau Rouge” avec le guitariste américain Isidore Langlois. Fin août 1939, André se trouve à Biarritz quand éclate la guerre. Il est mobilisé au 10e BCP de Saverne. Après la débâcle et le début de l’occupation allemande, il rentre à Paris en octobre 1940 et retrouve sa place au Jimmy’s. Il y fait revenir son frère, démobilisé à Biarritz. Mais en décembre 1940, les deux musiciens sont congédiés – comme l’explique André dans ses notes – pour un sordide motif racial ins­piré par le climat de l’époque. Henri repart à Biarritz. Le 15 mars 1941, André franchit la ligne de démarcation et arrive à Megève, en zone non occupée. Il est engagé dans l’orchestre du violoniste Bernard Hilda et joue deux semaines à “L’Isba” de Megève. Il suit l’orchestre au “Maxim’s” de Nice d’avril à mai 1941, avec le pianiste Albert Lasry et le contrebassiste Fred Ermelin. André y fait venir son frère, aussitôt engagé par Bernard Hilda. En juin 1941, Bernard Hilda et ses musiciens vont jouer au “Relais” de Cannes. En septembre, le chef d’orchestre Ray Ventura, sur le point de quitter la France, découvre Henri au “Relais” et lui propose de partir avec lui. Henri saute sur l’occasion. Quelques prestations sur la Côte d’Azur puis l’orchestre Ventura s’embarque en décembre 1941 pour le Brésil via l’Espagne. Henri ne reviendra en France qu’en décembre 1945 après la Libération, au terme d’un long périple en Amérique du Sud. Cette séparation de quatre années fera que les deux frères ne se produiront plus jamais ensemble, poursuivant désormais leur carrière chacun pour soi.
Fin septembre 1941, le “Relais” ayant fermé, André quitte Bernard Hilda pour revenir au “Maxim’s” de Nice, d’abord dans l’orchestre de Roger Lucchesi puis avec sa propre formation de janvier à février 1942. Il se marie en mars 1942 et deviendra papa d’une petite fille Micheline en décembre. Après un passage à “l’Embassy” de Marseille de mars à juin 1942, André Salvador anime le Thé en Musique de l’Hôtel Ruhl de Nice dans le quintette de Fred Ermelin chaque après-midi de juin 1942 à février 1943. Le soir, il passe au “Christie” de Nice jusqu’en décembre 1942, puis au “Sésame” de Monte Carlo, puis à “L’Oasis” de Cannes. En février 1943, l’arrivée des Allemands sur la Côte d’Azur contraint André à se réfugier à Villard-de-Lans avec sa femme et sa fille. Il fait quelques galas dans la région, notamment à Grenoble (avec Joseph Reinhard) en juin, et à Aix-les-Bains en juillet. Il se résout ensuite à rentrer à Paris où on l’entendra notamment à “l’Heure Bleue” d’avril à juillet 1944.
Après la Libération, André Salvador travaille au “Jimmy’s” de Biarritz durant l’été 1945, à “l’Aiglon” et au “Club de la Presse” à Paris fin 1945 puis à “l’Équipe” et au “Tilbury” de Megève début 1946. Après une période à vide, le succès est à nouveau au rendez-vous en juillet 1946 quand André devient la ve­dette de “La Jungle” (ex Oasis), 71 bis rue d’Antibes à Cannes. La presse indique : “La publicité porte en sous-titre : Toute l’ambiance du Jimmy’s de Paris. Et c’est exact. Les voitures obstruent la rue et il y a une ambiance du Tonnerre de Dieu”. Le 20 août 1946, André Salvador participe avec Édith Piaf à “la Nuit des Petits Lits de la Victoire” au Palais de la Méditerranée de Nice. La saison d’été finie, il rentre à Paris pour débuter en solo le 5 novembre 1946 au “Ménestrel”, 6 rue Robert Estienne, cabaret ouvert près des Champs-Élysées par le saxophoniste et clarinettiste Robert Ekyan. Le mois suivant, André Salvador joue et chante dans l’orchestre de celui-ci au “Beaulieu”, 168 rue du Faubourg St-Honoré. C’est alors qu’est réalisé chez Odéon l’enregistrement explosif de “Hey ba ba rebop” qui obtiendra le grand prix du disque en 1947. Début janvier 1947, André Salvador fait une apparition à “l’Ismaïlia”, restaurant chic de l’avenue Matignon, avant de prendre trois mois de vacances à Megève pour se consacrer presque entièrement à l’entraînement et à la compétition de ski. Fin mars, il passe durant une semaine à “La Malmaison” de Bruxelles, accompagné par l’orchestre de Rudy Bruder. Puis à partir du 2 avril 1947, ce sont deux mois avec l’orchestre d’André Ekyan au Thé et au Night-Club du Casino Municipal de Nice. Plusieurs soirées seront retransmises en direct dans l’émission “Au Bar des Vedettes” de la radio de Nice. Retour le 7 juin pour un mois à “La Malmaison” de Bruxelles, puis à “La Jungle” de Cannes de juillet à septembre 1947. De novembre 1947 à janvier 1948, André se produit en Suisse, au “Grillon Dancing” et à “La Boîte à Musique” de Genève, puis à “l’Hôtel du Parc” de Champéry. Il est à “L’Équipe” de Megève en février, à Val d’Isère en mars, puis au “John’s” de Lyon en avril 1948. Troisième saison d’été à “La Jungle” de Cannes de juillet à septembre 1948, avec l’orchestre de Léo Clarens. On le retrouve ensuite à “l’Ancienne Belgique” d’Anvers (oct. 48), à “la Rose Rouge” de Paris (nov.-déc. 48), au “Bar Royal” de Saint-Gervais les Bains (déc. 48 - fév. 49) où il continue de pratiquer son sport favori, le ski. De mars à septembre 1949, ce sera une longue tournée en Afrique du Nord : le “Bagdad” (avec Philippe Brun) et le “Belvédère” à Tunis, le “Club” et l’Opéra d’Oran, le Théâtre Aletti, le “Santa Monica” et la “Salle Bordes” (avec Hubert Rostaing) à Alger, le “Don Quichotte”, le “Jardin d’Été” et le “Cabaret Rustique” à Casablanca, le “Marignan”, la “Plantation” et la “Caravelle” à Rabat, la brasserie “L’Atlas” à Agadir...
Retour à Marseille le 1er octobre 1949 pour le tournage (du 14 octobre au 24 décembre) de la comédie musicale “La Maison du Printemps”, premier film français en couleurs naturelles (procédé Gevacolor) réalisé par Jacques Daroy d’après une pièce de Fernand Millaud. Le film est présenté à la critique parisienne le 19 janvier 1950 au cabaret “La Matelotte” des Champs-Élysées. Sa sortie officielle aura lieu à Marseille le 25 avril lors d’une soirée de gala au Cinéma “Le Capitole”. Mais avant cela, la pièce est créée le 4 mars au Théâtre Michel à Paris dans une mise en scène de Jacques-Henri Duval, avec André en personne dans son rôle inénarrable de Washington, valet créole et musicien. Les représentations dureront jusqu’en mai 1950. André Salvador tourne en avril le deuxième film de Henri Verneuil “On demande un bandit”, moyen métrage avec Jean Carmet d’après un sketch burlesque de Max Régnier et Pierre Ferrary. En juin 1950, André fait l’affiche des “Bouffes du Nord” à Paris. Pendant le premier semestre 1950, il est aussi, avec le Régisseur Albert, l’invité régulier de l’émission “Silence... Antenne” sur le poste “Paris Inter” chaque lundi à 20h30. Après un passage en Espagne début juillet, André Salvador fait partie, durant l’été 1950, de la grande tournée de Line Renaud et l’orchestre Loulou Gasté dans l’ouest et le sud de la France. Le spectacle proposé par Johnny Stark présente une dizaine d’artistes et parmi eux le chanteur Philippe Clay à ses débuts. Un marathon de presque deux mois qui ira de Granville à Nice en passant par Cherbourg, Bayeux, Domfront, Saint-Malo, Hyères, Bandol, Toulon, Grasse, Montpellier, Royat, Saint-Étienne, Brive, Pau, Luchon, Bayonne, Oloron, Toulouse... avec chaque jour sa nouvelle étape. La presse est enthousiaste : “André Salvador est une sorte de cocktail exotique composé de rires éclatants autant qu’imprévus, d’humour, de fantaisie déchaînée, de rythme frénétique, le tout noyé dans une gentillesse un peu enfantine mais désarmante. Et c’est ainsi qu’André Salvador a su conquérir toute la sympathie, toute l’amitié du public, lequel a toujours eu un faible pour les grands enfants pétris de talent. Salvador chante, danse, mime des sketches désopilants, grimace entre deux éclats de rire et s’amuse autant que le public. Cette pile électrique est aussi compositeur auteur. Toutes les veines, quoi ! Et voilà pourquoi l’étoile d’André Salvador brillera de plus en plus et parviendra à se faire une belle place au firmament des grandes vedettes”. En décembre 1950, retour à Alger, au cabaret “Terminus”. L’année 1951 est marquée par des tournages de courts métrages (“Leçon d’humour dans un parc”, “Chanson sur mesure”, “Fantaisie pour clarinette”, “Aux confins d’une ville”) et du long métrage “Si ça vous chante” de Jacques Loew avec Pierre Dudan, Raymond Bussières et Annette Poivre. Mais aussi des enregistrements avec Ernest Léardée, des passages à la radio, et la chanson “Si j’étais une cigarette”, création d’André Salvador popularisée par Éliane Embrun. En octobre 1951, nouvelle tournée en Afrique du Nord : “Casino de la Corniche” d’Alger et “Copacabana” d’Oran. Le premier trimestre 1952 est consacré à des galas en France avant un quatrième passage au Casino de la Corniche d’Alger en avril, puis au Casino de Canastel fin juin. En 1953, c’est le tournage du film “La Famille Cucuroux” d’Émile Couzinet. Les années suivantes, André se produit dans des bals et galas, notamment avec Léardée et l’association “La Solidarité Antillaise” de Victor Légitimus. En juin 1955, il est l’une des vedettes de la 8e “Kermesse aux Étoiles”, le grand spectacle populaire organisé au Jardin des Tuileries de Paris pour les œuvres sociales de la 2e DB.
Mais dès cette époque, André Salvador a du mal à fidéliser son public. Il faut dire que les difficultés étaient nées de la concurrence suscitée par la carrière montante de son frère Henri à son retour en France après la Libération. Les deux artistes se télescopent en permanence : même présentation, même style, même répertoire, même tempérament survolté, et une ressemblance étonnante qui crée la confusion tant chez le public que chez les journalistes. Déjà en 1950 pouvait-on lire dans le magazine “Carrefour” du 14 mars : “André, il y a dix ans, était plus célèbre qu’Henri. Mais aujourd’hui on redécouvre André qui est la réplique d’Henri à moins que le contraire ne soit logique, puisque André est né avant Henri... Cette ressemblance fait que des producteurs s’empressent d’engager André dans des rôles prévus pour Henri parce qu’il est moins cher... pour l’instant.” Une friction qui tourne bientôt à la rivalité. André décroche le Grand Prix du Disque en 1947, Henri de même en 1949. En 1950 sortent à quelques semaines d’intervalle les films “Nous irons à Paris” et “La Maison du Printemps”, le premier avec Henri, le second avec André. Si bien qu’Henri se croit obligé de remettre les choses en place, comme le rapporte Richard Balducci dans l’hebdomadaire “Flash” du 6 juin 1950 : “Henri Salvador a envoyé (par l’intermédiaire d’un huissier) une lettre de protestation au producteur du film La Maison du Printemps. Une des vedettes du film est André Salvador, frère aîné du précédent. Henri prétend qu’il est le seul SALVADOR capable de signer quoi que ce soit”. André tente de marquer sa différence en permutant ses nom et prénom pour devenir Salvador ANDRÉ. Pendant un temps, il se créera même une autre apparence, se laissant pousser la moustache, arborant une pipe et une nouvelle coiffure. Mais les journalistes et les professionnels du spectacle ont déjà désigné leur cheval gagnant. Car si les frères Salvador sont sans conteste deux musiciens et comédiens d’un exceptionnel et égal talent, Henri possède une dose infiniment supérieure de séduction alors qu’André ne craignait pas de déranger par sa franchise et sa spontanéité, pratiquant avant l’heure un genre comique sans concession, touchant parfois à l’extravagance et à la provocation.
Malgré ses efforts, André perd peu à peu les faveurs de la presse et voit les contrats se raréfier, son public l’oublier. Il aura encore la joie d’être sous les feux de la rampe avec Joséphine Baker dans la revue “Paris mes Amours” à l’Olympia en 1959. Dans les années soixante, il continue de se produire comme chanteur et animateur dans les casinos de province et les cabarets de Paris, notamment à “La Canne à Sucre” de Montparnasse. Il devient aussi champion de tir à l’arc. En 1966, un cousin des Antilles le fait venir à la Martinique pour animer les fêtes de fin d’année à l’Hôtel Bakoua, en compagnie du pianiste Michel Pacquit. Son contrat sera prolongé jusqu’en avril 1967. De là, on lui propose un engagement à l’Exposition Universelle de Montréal “Terre des Hommes”, à partir de juillet 1967. Il y rencontre le pianiste et chanteur martiniquais Marius Cultier en compagnie duquel on le verra souvent à “La Cabane à Rhum”, jusqu’en 1969. Conquis par le pays et ses habitants, André Salvador décide de ne pas quitter le Canada. Il y restera encore plus de dix ans en marge de la musique, vivant dans un mobile home, proche de la nature, en quête de ses lointaines racines indiennes. Il gagne sa vie par toutes sortes de petits métiers : ouvrier dans les travaux publics (chantier du métro de Montréal), préparateur de véhicules dans un grand garage… Il devient citoyen canadien. Ayant mis une croix sur son passé, il revient à Paris au début des années 1980, change de nom pour s’appeler André Jacart et s’installe dans un modeste studio de la rue Wurtz. Il consacre le principal de son temps au tir à l’arc et aux arts martiaux, puis à l’écriture de souvenirs, de réflexions philosophiques et de poèmes. Le 24 juin 2003, à l’hôpital de la Salpêtrière, André Salvador décède dans l’anonymat à presque 90 ans. Selon son vœu, son corps a été incinéré le 2 juillet 2003 au crématorium d’Arcueil où ses cendres ont été aussitôt dispersées au jardin du souvenir. André Salvador était un homme d’une générosité absolue, sensible, attachant, non-conformiste par religion, facétieux, déconcertant parfois par son esprit de répartie et ses réactions d’écorché vif. D’une activité sans relâche, amoureux de la vie, il était exigeant avec lui-même autant qu’avec les autres, impitoyable envers toutes les formes de domination et de bêtise humaines. Son éclectisme l’avait conduit à devenir un athlète accompli, un sportif de haut niveau dans les disciplines les plus variées : tir à l’arc (champion de France), ski, cyclisme, équitation, arts martiaux… Ajoutons enfin qu’à force de recherche et de travail personnel, André Salvador était passé maître en écriture et composition musicales. Les cent cinquante manuscrits qu’il a déposés à la SACEM sont de petites merveilles de précision, de rigueur, d’originalité harmonique et mélodique qui attendent d’être redécouvertes aujourd’hui.


À propos de la présente sélection :
Les deux CD de ce coffret présentent les enregistrements réalisés en 78 tours par l’orchestre d’Ernest Léardée de 1951 à 1954. Nous y avons ajouté (plage 13 du CD 1) une biguine composée et chantée par Léardée dans l’orchestre du trompettiste guadeloupéen Abel Beauregard en 1950. La décennie qui suit la fin de la seconde guerre mondiale est marquée par une profonde mutation des musiques de danse. La France se laisse emporter par la vitalité des rythmes afro-cubains et sud-américains arrivés d’outre-Atlantique. Les musiciens antillais doivent s’adapter aux goûts des danseurs et la biguine cède le pas aux nouvelles danses tropicales : samba, guaracha, mambo, baïon, cha-cha-cha, boléro… La démocratisation de la TSF à la même époque participe au développement de cette mode. Nombreuses et suivies sont les émissions à faire voyager dans les pays lointains. Par la magie de la musique, elles apportent rêve et évasion dans l’intimité de chaque foyer, contribuant aux succès musicaux et à la popularité des orchestres. Ernest Léardée assure l’illustration musicale des émissions de la réalisa­trice France Danielly, présentées par Bernard Marçay. En 1951, il enregistre de nombreux disques de danse, le plus souvent chantés, pour les marques Saturne, Festival et Ducretet-Thomson. On y remarque les interventions pleines de poésie du Guadeloupéen Valentin Gérion à la guitare électrique. Les inter­prètes vocaux sont Gilles Sala, l’Espagnol Severiano Alvarez, André Salvador ou le trompettiste trinidadien Michel Wyatt, quand ce n’est pas Léardée lui-même. Le hasard d’une rencontre dans un studio de la rue Burq à Paris lui fait réaliser un disque avec les ravissantes duettistes françaises Mireille et Huguette Bordeau qui avaient mené une revue musicale à Mexico deux ans plus tôt. Autre rencontre insolite en 1953 : celle de la chanteuse Simone Alma (1908-2000) qu’on entendait souvent à la radio à cette époque mais qui a peu enregistré. Les deux biguines de Léardée qu’elle chante en créole avec beaucoup de naturel et de sentiment, accompagnée du flûtiste Roger Bourdin et du pianiste Pierre Devevey, sont une curio­sité rare et un moment de bonheur réjouissant. En janvier 1952, Léardée enregistre six biguines instrumentales pour la marque Riviera d’Eddie Barclay. Une autre séance a lieu deux ans plus tard, avec la participation vocale de Léardée dans deux morceaux. Publiées d’abord en 78 tours, les deux séances seront regroupées en 1954 sur l’un des premiers microsillons commercialisés en France par Eddie Barclay, promoteur des dernières techniques du son nées aux USA. L’intégralité de ces enregistrements, réalisés avec l’une des meilleures formations d’Ernest Léardée, figure en tête du CD 1. Ils sont émaillés d’ardentes improvisations de clarinette par Sylvio Siobud et Maurice Noiran, et de solos incisifs à la guitare métallique à résonateur par le musicien aveugle Claude Martial. Le piano est tenu par Raymond “Ray” Gottlieb, familier des musiques cubaines et antillaises depuis la fin des années 1920. L’orchestre comprenait aussi le batteur Bruno Martial et le contrebassiste Lionel Louise. En 1954, Léardée réalise pour Decca et pour la petite marque Radium (plages 17 à 22 du CD 1) des enregistrements de mambo et de samba en moyenne formation avec sections de cuivres et saxophones. La chanteuse est Lucienne “Lola” Berry qui était à l’époque la compagne de Léardée et animait tous les bals avec lui. Accordons une mention particulière aux enregistrements d’André Salvador, qui n’eut pas la chance de son frère Henri et dont la discographie reste confidentielle. Après le succès de “Hey ba ba rebop” avec André Ekyan en 1947, c’est grâce à Léardée qu’il put faire de nouveaux disques quatre ans plus tard. Ce sont les seuls témoignages qui nous restent des multiples facettes de son talent. Tour à tour tendre et sentimental dans “Aux Caraïbes”, ou débordant d’énergie et de fantaisie dans “Mambo Mambo”, il nous donne aussi un échantillon de la finesse et de l’originalité de son jeu quand il s’accompagne à la guitare. Pour compléter cet album et que chacun puisse entendre la voix de ce personnage captivant qu’était Ernest Léardée dans son rôle de conteur heureux de partager son histoire, nous avons ajouté un extrait d’une interview où il raconte en détail son enfance difficile et ses débuts de musicien à la Martinique. La musique d’Ernest Léardée, à l’orée des années cinquante, est une musique de divertissement sans prétention, à laquelle les puristes reprocheront ses défauts : la mièvrerie de certaines paroles ou encore des faiblesses d’interprétation vocale, notamment du point de vue de la justesse. Mais ces quelques imperfections font partie du paysage, elles lui apportent un peu de son sel et de son charme, et c’est pourquoi nous n’avons pas voulu les écarter. Au lendemain d’une guerre abominable dont les plaies étaient encore à vif, cette musique est le reflet d’une époque remplie de joie, d’espoir et d’un formidable optimisme, dont beaucoup gardent encore le souvenir.
Jean-Pierre MEUNIER
© 2007 Frémeaux & Associés / Groupe Frémeaux Colombini SAS
Remerciements : 
Pour les informations communiquées, les encouragements, les prêts ou dons de documents, disques et photos, nous exprimons toute notre gratitude à : Valentin et France Gérion, Nelly Gérion-Ajdenbaum, Dany Lallemand, Ernest Léardée, Brigitte Léardée, Robert Maulus, Matthieu Moulin, Roland Paterne, Gérard Roig, Micheline et Claude Saillant-Salvador, Alice Salvador, André Salvador, Clovis Salvador.


english notes

Ernest Léardée
The Martinique composer and band leader Ernest Léardée, who died in 1988 aged 91, left an in-depth account of his long life as a musician. For ten years he was violinist in Alexandre Stellio’s orchestra, from 1919 in Martinique until 1929 in Paris. While in this legendary band, Ernest Léardée made his debut recordings for Odéon in October 1929. He then cut a series of discs in his name for Salabert in 1930 and 1931, with his ‘Orchestre Antillais du Bal Blomet’ (Frémeaux & Associés re-issue, boxed sets STELLIO and BIGUINE volumes 1, 2 and 3). Léardée’s discographical activity subsequently stalled for twenty years, but continued after the war in the early 1950s. This album focuses on this particular period.
Ernest Léardée was born on 9 December 1896 in Fort de France. He was the youngest of five children, two boys and three girls, all having different fathers. Their mother Stéphanie Balthazar later married Philippe Léardée, a retired sailor working as lighthouse keeper at La Pointe des Nègres in Fort de France. Ernest Léardée was six when Mountain Pelée erupted in 1902 and  the volcano destroyed Saint Pierre, killing 30 000 people. Throughout his life he remembered this tragic episode, shortly followed by the death of his sick mother. In July 1905 it was his stepfather’s turn to pass away. Orphaned at the age of nine, Ernest was taken in by his sister Yaya. His life then became hard. But things changed when he was taken under the wing of Marius Collat, a cabinet and violin maker, who hired him as an apprentice. Marius Collat taught him carpentry and music and helped him to make his first violin. Ernest was soon accompanying his boss in balls and political meetings in Martinique. At the age of thirteen, he left him to follow a Brazilian cornettist who needed an orchestra for Dominica. At the end of a two-month contract, Ernest returned to his island and found work as an apprentice hairdresser. He continued to play the violin in balls in Fort de France, alongside clarinettist Léon Apanon. In 1913, Ernest managed to buy his own hairdressing business. Exempted from military service by the Martinique Reform Council in 1916, he was not sent to fight in Europe during the First World War.


In 1919, clarinettist Alexandre Stellio, aged 34, returned to his native island after spending over twenty years in French Guyana. He hired Léardée to accompany him on the violin during silent movies shown at the Gaumont cinema in Fort de France. The two friends became inseparable and often played in the town’s main dance halls. On 27 April 1929, they left Martinique for France with an orchestra comprising trombonist Archange Saint-Hilaire, singer Crémas Orphélien and pianist and cellist Victor Collat. They were immediately successful everywhere they played the beguine in Paris:  the ‘Bal de la Glacière’, the ‘Canari’, the ‘Rocher de Cancale’, etc. The orchestra cut its first discs for Odéon in October and December 1929 (cf. album STELLIO FA 023). However Léardée left Stellio following a disagreement concerning the division of royalties. In early 1930, he founded his own orchestra to play in the famous ‘Bal Nègre’ in Rue Blomet. It was at this point he swapped his violin for the cla­rinet and tenor saxophone. In November 1931, Ernest Léardée opened his own cabaret, ‘L’Elan Noir’ in the Montparnasse district. He ran it until June 1933. He could then be found at ‘La Nuit Cubaine’ until January 1934, the ‘Villon-Holahée’ from February 1934 to June 1935, then at the ‘Mirage’ from July 1935 to August 1937. From September 1937 to January 1938, Ernest Léardée hosted the ‘Chalet du Lac’ in Saint-Mandé. He then toured Germany, Austria and Hungary, the latter tour being interrupted by the annexation of Austria by the Nazis. Léardée was again in France in March 1938 and was billed in Parisian cabarets and in casinos on the Atlantic Coast during the summer months, and in Lille’s top hotels in northern France. On 19 May 1940 Hitler’s army was in Lille and Léardée had to flee. During all the hostilities of World War II Léardée retired away from music in a small village in the countryside. After Liberation, he moved to Fontenay-sous-Bois near Paris and again set up as a musician. For seven years he led the orchestra of the famous guinguette ‘Chez Maxe’ in Joinville on the banks of the river Marne. At night he played in various Parisian cabarets and in the ‘Cercle de la France d’Outre-Mer’, along with singer Jenny Alpha. In October 1950, Ernest Léardée began hosting a weekly radio show, ‘Rythmes et Charmes des Antilles’. He recorded new discs with the Guadeloupian singer Gilles Sala and with André Salvador, the elder brother of Henri Salvador. In December 1952, ‘Chez Maxe’ was totally destroyed by a fire. For another eight years, Ernest Léardée led his orchestra in two other dance-halls on the banks of the Marne, the ‘Chalet de Champignol’ from January 1953 to January 1958 and then ‘Chez Grosnier’ from 1958 to 1960. During the summer seasons, his band and his singer Lola Berry performed in casinos on the Normandy coast: Cherbourg, Coutainville, Saint-Pair-sur-Mer, etc. In 1954, Ernest Léardée founded his own publishing company, ‘Les Rythmes Nouveaux’. From 1961 to 1966, he managed the Casino in Saint-Pair-sur-Mer in summer. The rest of the year, he continued to play in numerous balls and galas in the Paris region. From 1966 to 1970, Léardée dubbed films, performed in more dances and parties with his new singer Tety Selva, accompanied singer Christian Juin and, at the age of 74, began thinking about retiring. In August 1970, he was the famous interpreter in France’s first televised advertisement for ‘Uncle Ben’s’ rice, which was to be followed by two others in 1973 and 1975. Ernest Léardée died of cancer, passing away in his home in Fontenay-sous-Bois in the night of 12-13 April 1988. A few months previously, a documentary about his life, filmed in 1987 by Christiane Succab-Goldman and Jean-Pierre Krief (Le Roman de la Biguine), enabled viewers to discover him once again.


André Salvador
A strange fate was in store for singer and actor André Simon Salvador, who is now sadly forgotten. His popularity gradually faded in the late fifties due the growing success of his brother (and almost his splitting image), Henri Salvador, four years younger than André. André was born in Cayenne in French Guyana on 2 October 1913, to be followed by his sister Alice in 1915 and his brother Henri on 18 July 1917. T
he entire family arrived in Paris in August 1929. The two boys, hardly gifted for academic studies, soon discovered their passion for music and the guitar, assisted by a cousin who introduced them to jazz. But they also showed rare talent for singing and acting, telling jokes and improvising sketches. In October 1934, they won an amateur singing contest organized in the Palais Berlitz in Paris. The two brothers were hired in January 1935 in the ‘Villon’, a cabaret/dance hall frequented by the Latin Quarter students. Following his military service, André worked with Henri at the ‘Mirage’, Ernest Léardée’s nightclub in the Montparnasse district. They were spotted by the boss of ‘Jimmy’s Bar’, who hired them in late November 1936. On 17 August 1938, the manager of Jimmy’s opened a replica of his cabaret in Biarritz. André and Henri were on the bill until war was declared in late August 1939. After the debacle and start of German occupation, André and Henri returned to Jimmy’s in October 1940 but were fired in December for racial reasons. In March 1941, André was hired in the orchestra of violinist Bernard Hilda, in Megève and then in Nice. André asked his brother to join him. As a duo they played in Bernard Hilda’s orchestra at ‘Maxim’s’ in Nice from April to May 1941, then in the ‘Relais’ in Cannes from June to September 1941. It was at this point of time that Henri was spotted by band leader Ray Ventura who was about to leave for Brazil. Henri left France in December 1941 to return only in December 1945 after Liberation. The brothers never played together again, each choosing to follow their individual paths.


In late September 1941, André returned to ‘Maxim’s’ in Nice, first in the orchestra led by Roger Lucchesi then in his own band from January to February 1942. After appearing in the ‘Embassy’ in Marseille from March to June 1942, André Salvador hosted the ‘Thé en Musique’ at the Hôtel Ruhl in Nice each afternoon from June 1942 to February 1943. At night he played in various cabarets in Nice, Monte Carlo and Cannes. In February 1943 the Germans arrived on the Côte d’Azur, forcing him to take refuge in Villard-de-Lans before returning to Paris. After Liberation, André Salvador worked at ‘Jimmy’s’ in Biarritz during summer 1945, in ‘L’Aiglon’ and the ‘Club de la Presse’ in Paris and then at ‘L’Equipe’ and the ‘Tilbury’ in Megève in early 1946. During summer 1946 he was highly successful in ‘La Jungle’ in Cannes. He then worked in Paris in the orchestra of saxophonist and clarinettist Robert Ekyan. It was then he recorded ‘Hey ba ba rebop’ for Odéon, a disc which won an award in 1947. From 1947 to 1949, André Salvador performed in ski resorts in the Alps (Megève, Saint-Gervais, Val d’Isère) in the winter and on the Côte d’Azur (Nice, Cannes) in summer with periods spent in Belgium (Brussels, Anvers), Switzerland (Geneva, Champéry) and Paris (L’Ismaïlia’, ‘La Rose Rouge’). From March to September 1949, he toured extensively in North Africa:  Tunis, Oran, Alger, Casablanca, Rabat and Agadir. In October 1949, André Salvador went to Marseilles to start the shooting of his debut film, ‘La Maison du Printemps’, a musical by Jacques Daroy. Just before the release of the movie, the play was staged in Paris with André himself playing his role of Washington, a Creole valet and musician. In June 1950, André starred in the music-hall, the ‘Bouffes du Nord’ in Paris. In summer 1950, he participated in Line Renaud’s extensive tour covering west and south France. André Salvador won over the public with his rhythm, humour, fantasy as well as with his talent as a crooner. During the years to follow, he again went to Algeria, appeared in several films, recorded discs with Ernest Léardée, took part in radio shows, performed in dances and galas, and composed songs, some of which became hits.


But from then on, André Salvador and his brother Henri were rivals. Crushing each other, they shared the same style, repertory, excitable nature and were surprisingly similar in appearance which led to confusion. Despite his efforts, André was gradually downgraded by the press and public. For regardless of the brothers’ exceptional and equal talent as musicians and actors, Henri boasted more seduction whereas André’s frankness and spontaneity as a comedian was sometimes excessive and was conside­red as provocative. In 1959, he was Josephine Baker’s partner in the show ‘Paris mes Amours’ billed at the Olympia in Paris. During the sixties, André Salvador appeared in casinos in the French provinces and in the West Indian cabaret ‘La Canne à Sucre’ in Montparnasse. In late 1966, he performed in Martinique and then, as from July 1967, in the Universal Exhibition ‘Terre des Hommes’ in Montreal. André stayed almost 15 years in Canada, living off menial jobs and he became a Canadian citizen. He returned to Paris in the early eighties, using the sobriquet André Jacart. He then spent most of his time doing archery and martial arts, then wrote his memoirs, philosophical works and poems. André Salvador passed away on 24 June 2003 in the Salpêtrière hospital. He was almost 90. André Salvador was generous, sensitive, engaging, non-conformist, facetious, and sometimes disconcerting as he was quick at repartee. His eclecticism made him a quality sportsman in various domains: archery (champion of France), skiing, cycling, horse-riding, martial arts, etc. He left over one hundred compositions which are pure gems showing precision, rigour, harmonic and melodic originality and which are now waiting to be rediscovered.
Regarding the present selection :

The decade following the Second World War witnessed a great change in dance music. After the beguine, France followed the new tropical rhythms:  samba, guaracha, mambo, baïon, cha-cha-cha, bolero, etc. which were often broadcast on the radio. This is the music, recorded on 78s by Léardée from 1951 to 1954, which is featured in this boxed set. The vocalists are Gilles Sala, the Spanish Severiano Alvarez, André Salvador and the Trinidadian trumpeter Michel Wyatt, when it is not Léardée himself. We must also point out the two atypical discs recorded by the Soeurs Bordeau and singer Simone Alma. The first twelve titles of CD 1 are the entire result of two particularly successful sessions made for Eddie Barclay for the Riviera label. They include some fiery improvisations by clarinettist Sylvio Siobud and Maurice Noiran and sharp guitar solos by the blind musician Claude Martial. On the piano is Ray Gottieb, a regular of Cuban music since the early thirties with Don Barreto. Regarding André Salvador’s recordings, we must add that he wasn’t as lucky as his brother Henri and that his discography remains confidential. Tender and sentimental in ‘Aux Caraïbes’ or gushing with energy and fantasy in ‘Mambo Mambo’, he also offers finesse and originality in his playing when he plays the guitar. The selection closes with an extract of an interview in which Léardée speaks of his tough childhood and his debuting years as a musician in Martinique. Ernest Léardée’s music in the early fifties is for entertainment without pretence. In the aftermath of a terrible war, still on the minds of all, it portrays a period of joy, hope and wonderful optimism.

English adaptation by Laure WRIGHT from the French text of Jean-Pierre MEUNIER
© 2007 Frémeaux & Associés / Groupe Frémeaux Colombini SAS


CD Ernest Leardee RYTHMES DES ANTILLES (1951-1954) avec l’intégrale ANDRÉ SALVADOR © Frémeaux & Associés (frémeaux, frémaux, frémau, frémaud, frémault, frémo, frémont, fermeaux, fremeaux, fremaux, fremau, fremaud, fremault, fremo, fremont, CD audio, 78 tours, disques anciens, CD à acheter, écouter des vieux enregistrements, albums, rééditions, anthologies ou intégrales sont disponibles sous forme de CD et par téléchargement.)

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