![]() |
![]() |
|
|
|
Le monde instrumental d’Alain Goraguer Jazz et musiques de films 1956-1962 Pianiste de jazz qui fit ses débuts aux côtés de Boris Vian et Serge Gainsbourg, arrangeur génial et fin compositeur de musiques de film, Alain Goraguer est une figure incontournable de la musique française de la seconde moitié du XXe siècle. Réalisée par Olivier Julien, cette rétrospective 3 CD revient sur les jeunes années du compositeur et met en lumière les premiers enregistrements parus sous son nom (ou pseudonyme) d’un monde libre de ses factures chansons et jazz. Patrick Frémeaux As a jazz pianist he made his debuts alongside Boris Vian and Serge Gainsbourg, and then showed himself to be an arranger of genius, and also a skilled composer of film music. Alain Goraguer has since become an unavoidable icon for French music in the second half of the 20th century. This 3CD retrospective compiled by Olivier Julien concentrates on the composer’s early years, throwing light on the first recordings (made either under his own name or a pseudonym) of a world freed from its “chanson” and “jazz” identities. Patrick Frémeaux LE MONDE INSTRUMENTAL D’ALAIN GORAGUER JAZZ ET MUSIQUES DE FILMS 1956-1962 Par Olivier Julien Si l’on connaît le rôle d’un auteur (l’écriture de paroles) et celui d’un compositeur (la musique), le rôle des arrangeurs est souvent sous-estimé voire ignoré. Aux hasards de la production musicale française, on croise le nom d’Alain Goraguer associé à un large panel d’artistes tels que Brigitte Fontaine, Les Quatre Barbus, Les Trois Menestrels, Brigitte Bardot, Salvatore Adamo, Boby Lapointe, Annie Girardot, Georges Moustaki, Catherine Sauvage, France Gall, Isabelle Aubret, Magali Noël mais surtout Serge Gainsbourg pour ses six premiers albums et l’intégralité de la carrière de Jean Ferrat (sous le pseudonyme de Milton Lewis). L’arrangeur est celui qui « met en forme » la chanson en écrivant notamment la partition pour chacun des instruments intervenant, il « habille » la mélodie à laquelle il contribue souvent et donne corps aux chansons. Ce coffret revient sur la carrière instrumentale d’Alain Goraguer à travers les disques qu’il signa de son propre nom ou encore sous le pseudonyme de Laura Fontaine ! Alain Yves Réginald Goraguer, dit Alain Goraguer, est né le 20 août 1931 à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Son père est militaire de carrière et sa mère femme au foyer. La famille déménage pour Riom dans le puits de Dôme puis à Lyon. Sa mère est musicienne et pratique le piano « Elle chantait très bien », son père militaire de carrière n’est pas mélomane et plaisantait sur le fait que « La musique c’est du bruit ». Alain Goraguer s’initie d’abord au violon puis au piano qui lui apparaît être un instrument plus complet : « Le piano c’est plus agréable, c’est comme un orchestre. » Il a pris des cours particuliers sans jamais côtoyer le conservatoire et aime l’improvisation qui pour lui constitue « Un chemin normal pour la composition ; l’improvisation c’est fugitif, il n’en reste rien et puis si le thème se répète ce n’est plus de l’improvisation. », c’est là qu’intervient la composition. Grâce à la complicité de son père, il n’aura pas besoin de faire son service militaire ; à vingt-deux ans, il rencontre Jacques Diéval qui deviendra crucial pour sa carrière, « C’est un très grand pianiste de Jazz, très important pour moi. » il adore improviser dans le style de musique classique pour son plaisir car il y a une plus grande liberté. Pour Jacques Diéval, « Le Jazz c’est vraiment l’élément le plus important avec le Swing mais cela permet moins de liberté car malheureusement nous sommes limités : il y a des canevas : de douze mesures pour le Blues, de trente-deux mesures pour les Chorus, des morceaux qu’on appelle des Anatoles. » Jacques Diéval convainc Alain Goraguer de venir à Paris et le prend dans son cours de piano et de Jazz « Je lui dois énormément » Alain aime le Jazz d’Art Tatum et surtout celui d’Oscar Peterson, qui « l’a beaucoup influencé. » Boris Vian Alain Goraguer accompagne une chanteuse du nom de Simone Alma qui cherche des chansons Jazzy ; elle prend alors rendez-vous avec Boris Vian et c’est ainsi qu’Alain et Boris font connaissance ; ils sympathisent de suite et deviennent très amis. « Quelques jours plus tard il m’appelle pour m’expliquer qu’il travaille avec un garçon qui s’appelle Jimmy Walter et que ce dernier n’est pas toujours libre pour l’accompagner dans les galas, il me propose alors de l’accompagner. » Ils travaillent également ensemble à écrire des chansons telles que « La java des bombes atomiques, des trucs comme ça… Fais-moi mal Johnny ! (pour Magali Noël), C’était une relation très agréable et amicale. Boris m’a apporté beaucoup, nous étions très amis… jusqu’à sa mort pendant la projection de J’irai cracher sur vos tombes dont j’avais signé la musique J’y étais, il était assis juste devant moi… Une bien triste chose. » Go..Go..Goraguer Boris Vian était directeur artistique chez Philips et avait planifié de faire un disque de Jazz avec Alain Goraguer comme pianiste, Christian Garros à la batterie et Paul Rovère à la basse. Un premier EP (45 tours Philips 432.106 NE) comprenant quatre titres : Les lavandières du Portugal (André Popp / Roger Lucchesi), With the Wind and the Rain In Your Hair (Clara Edwards / Jack Lawrence), L’homme et l’enfant (Jack Shaindlin / René Rouzaud) et Star Eyes (Don Raye / Gene De Paul) paraît début 1956. Boris Vian signe le texte d’introduction au verso du disque : Ce jeune pianiste – dont c’est le premier enregistrement – est bien parisien puisqu’il est né en pleine banlieue, à Rosny-sous-Bois pour préciser. Mais il a vécu longtemps à Nice et c’est pourquoi son nom est encore peu familier aux amateurs de Jazz de la capitale qui comme chacun sait (est-ce un bien, est-ce un mal ?) font les réputations dans ce domaine. Il a pourtant voici quelques années remporté au Tournoi des Amateurs une brillante seconde place. Brillante, car la première était revenue à René Urtréguer, qui depuis s’est qualifié dans les tout premiers rangs des musiciens de Jazz Français. Mais seconde tout de même… et voilà pourquoi… depuis, le monde du Jazz n’avait plus entendu de parler de lui. Il travaillait assidûment le piano et l’harmonie sous la direction d’éminents spécialistes. Le résultat, c’est qu’il possède à l’heure actuelle une technique parfaitement remarquable et notamment, ce que les musiciens dans leur langage nomment La pêche, c’est à dire une puissance d’attaque caractéristique. Dans les présents enregistrements se manifestent en outre un sens de la dynamique et des nuances que l’on appréciera encore mieux dans le 33 tours 30cm qui paraît également sous l’étiquette Phillips (N 77.307 L). Sur les seize thèmes enregistrés en trois séances, on trouvera ici With the Wind and the Rain In Your Hair et Star Eyes qui datent de la première séance - On peut noter un peu plus de nervosité… ça s’appelle le trac ! - et deux morceaux populaires qui n’en constituent pas moins deux bon thèmes de Jazz : Les lavandières du Portugal (mais oui…) et L’homme et l’enfant, qui furent mis en boite au cours de la troisième et ce fut de façon particulièrement détendue. Tous deux sont en effet des first takes, des premières prises. C’est Paul Rovère à la basse et Christian Garros à la batterie qui entourent Gogo – tel est son surnom usuel – Dans sa prestation, puisque tel est le terme consacré – par l’usage (et si vous voulez que je mange le morceau, je crois bien que c’est Frank Ténot qui par l’utilisation systématique qu’il fit, un temps, de ce vocable, doit être rendu responsable de son emploi…) Go..Go..Goraguer Parallèlement paraît l’album Go..Go..Goraguer (33 tours 30 cm Philips N77.307 L) pour lequel Boris Vian se fend d’un nouveau texte non dénué d’humour : Il y a deux façons de le faire courir : le mettre en présence d’un okapi. d’un singe, d’un ornithorynque, voire même d’un simple chien, ou lui indiquer négligemment l’endroit où il trouvera un bon piano. Car il déteste tous les animaux, sauf cette bête noire ou jaune a trois pattes et à quatre-vingt-huit dents que l’on fabrique chez Pleyel, Erard ou Steinway. Alain, Yves, Réginald Goraguer, Gogo pour ses familiers, est bien parisien puisqu’il est né en pleine banlieue, à Rosny-sous-Bois, le 20 août 1931, de père breton et de mère corse. Le Réginald dont il refuse avec obstination de se parer lui vient d’ancêtres anglais dénommés Graiger. Il a sous la main un pseudonyme tout trouvé s’il désire un jour jouer de l’orgue de cinéma, chose assez peu probable, car c’est un engin qu’il abomine presque autant qu’un quadrupède ordinaire. Sans nous attarder sur une enfance au cours de laquelle il n’inventa ni la géométrie ni le calcul tensoriel ni le moteur à explosions (car il considérait que si d’autres l’avaient fait et bien fait, mieux valait s’attacher à l’étude de problèmes moins désolants), précisons que dès l’âge de onze ans, Alain Goraguer se mit à l’étude du violon. Nous n’oserons affirmer que cette idée lui vint spontanément, car il ne parait pas, à l’heure actuelle, manifester un goût bien net pour le martyre. Toujours est-il que de onze à quinze ans. A.Y.R.G. taquina un stradivarius de bon ton. A cette époque, il se trouvait à Nice. (Le métier du père de notre ami exigeait de périodiques déplacements de toute la famille.) Et c’est à Nice qu’il commença le piano. Il abandonna donc sans remords le violon. Passa, peu après, ses bacs, et fit, à vingt ans, une rencontre décisive, celle du pianiste Jacques Diéval, de passage à Nice, et qui lui conseilla fermement de tout lâcher pour le piano. La responsabilité initiale de Diéval étant ainsi solidement établie en ce qui concerne le présent disque, ajoutons que Goraguer a conservé à son égard une reconnaissance sans fissures. On a tort de croire que les musiciens se déchirent et se dévorent entre eux. Les bons musiciens se soutiennent toujours, bien au contraire. (Cette phrase anodine en apparence, va provoquer bien des réconciliations, je n’en doute pas.) Sur les conseils de Diéval, Gogo se rendit alors à Paris et le travail sérieux commença. D’abord avec Diéval, puis avec Raoul Gola, un professeur dont l’éloge n’est plus à faire ; dans le même temps, Alain étudiait l’harmonie avec Julien Falk. Très peu de temps après, Goraguer se classait second au tournoi de jazz amateur, manifestant ainsi un goût délibéré pour cette forme d’art que les béotiens nomment encore parfois « musique de sauvages » et qui n’est telle que pour leurs oreilles de demeurés. Assez timide et trop modeste, notre homme s’est peu mité au monde des musiciens de jazz; lorsqu’une vedette occupe la scène, il préfère l’écouter plutôt que de s’en faire écouter. Une conception qui en vaut une autre, mais qui est assez peu courante dans ce milieu. Et depuis, il n’a pratiquement pas cessé de travailler son instrument. Pour vivre, il accompagne des tours de chant. Ça lui permet de se coucher plus tôt que s’il jouait dans des boites, et de rester en forme physiquement. Seuls ceux qui l’approchent savent ce qu’il peut faire avec ses dix doigts. Et quelquefois, ceux qui l’approchent rencontrent la compréhension et la confiance d’une grande marque de disques. Philips par exemple, qui lui accorde trente centimètres de microsillon, le nombre de séances nécessaire et un preneur de son comme Fatosine, c’est-à-dire comme il n’y en a peu. Avec Paul Rovère à la basse et Christian Garros à la batterie, voici le premier enregistrement d’un pianiste qui a quelque chose à dire… Vous êtes prêts ? Alors… Go Go ! Goraguer ! Sans entrer dans le détail de chaque plage, on notera que deux d’entre elles sont des compositions de Goraguer (British Soup et Gogo’s Googles). Il ressort immédiatement de l’audition de ce disque (on nous pardonnera d’entrer dans ces détails, mais certaines qualités techniques peuvent parfois échapper aux non-initiés) que Gogo possède ce qui manque à presque tous les pianistes actuels en France (une demi-douzaine de « cracks » exceptés) et que appelle la « pêche » en argot de musiciens. C’est-à-dire, une netteté et une puissance d’attaque qui sont le « coup de patte » des grands jazzmen. A ce propos, il est intéressant de relever parmi les musiciens préférés de Goraguer les noms de Duke Ellington (et en tant que pianiste), de Tatum, de Garner, de John Lewis, notamment. De Fat’s aussi, bien sûr. Parmi les musiciens français, outre Diéval dont il apprécie la finesse, Gogo a une haute estime pour Martial Solal et Maurice Vander, sans oublier René Urtreger. On appréciera en outre une grande originalité, dans les introductions notamment, une « dynamique » très étendue et une virtuosité qui se manifeste non pour elle-même mais toujours au service d’une interprétation d’ensemble de chaque thème. Ceci en dépit d’un trac qui géra fort l’ami Gogo durant la première séance. Naturellement, on jouera au petit jeu des influences… Et l’on risque fort de s’y casser le nez, car si l’on trouve évidemment des traces du jeu de certains maîtres du jazz dans ces douze interprétations, on serait bien en peine de nier qu’elles sont liées et fondues par un tel tempérament qu’il mérite déjà le nom de style. C’est à cette époque qu’Alain Goraguer invente le personnage de Laura Fontaine : « J’ai enregistré quelques disques sous le nom de Laura Fontaine, cela marchait assez bien d’ailleurs puis le bruit s’est rependu qu’il s’agissait de moi et on a arrêté. » Il n’en reste pas moins un superbe album Piano-bar par Laura Fontaine et son quartette (33 tours 30 cm Fontana 680.009 TL - 1958) dans lequel à part un titre cosigné avec Boris Vian, il reprend des standards de Jazz : I Only Have Eyes for You (H.Warren / Al Dubin), My Funny Valentine (Rodgers / Hart), Bewitched (Rodgers / Hart), Deed I do (W.Hirsh / F.Rose), I Didn’t Know what Time it Was Me (Rodgers / Hart), Lovely to Look at (Jerome Kern), Rose Room (A. Hickman / H.Williams), Cocktails for Two (Jonnston / Coslow), Smoke Gets in Your Eyes (Jerome Kern), Lullaby of Broadway (Warren), Nous avions vingt ans (Alain Goraguer / Boris Vian), You Go to My Head (H.Gillepsie – F.Coots), Where or When (Rodgers / Hart), There’s a Small Hotel (Rodgers / Hart), puis sort un EP 4 titres (45 tours EP Fontana 460.047 TE Deluxe - 1959) avec deux titres ne figurant pas sur l’album : My Heart Belongs to Daddy (Cole Porter) et La vie mondaine (The Lady is a Tramp) (Rodgers / Hart – J.Plante). Le magazine Marie-Claire édite quelques disques et pour sa troisième référence sous le titre Un soir chez vous avec Jacqueline Joubert (speakerine et présentatrice de télévision) Cent idées pour réussir vos soirées - Marie-Claire le disque-magazine de minuit (45 tours EP Philips MC3 - 1958) fait appel à Alain Goraguer pour réinterpréter quatre succès du moment : Witch Doctor (docteur miracle) (Hubert Ithier / Ross Bagdasarian), La ballade irlandaise (Eddy Marnay / Emil Stern), When (Viens) (André Salvet - Guy Bertret / Jack Reardon - Paul Evans), Qu’on est bien (Guy Béart) Serge Gainsbourg « Un directeur artistique de chez Philips m’a téléphoné pour me dire qu’il voulait me faire rencontrer quelqu’un “que tu vas beaucoup apprécier sur le plan musical”. J’ai donc rencontré Gainsbourg dans le bureau de ce directeur, cela a très bien fonctionné tout de suite et on est devenus très amis ; heureuse rencontre, on avait beaucoup de points communs et donc cela marchait très bien, c’est pas explicable, on pense pareil. Il avançait des choses et je lui montrais.Il y avait une osmose totale» En 1958, après avoir collaboré au premier album de Serge Gainsbourg : Du chant à la une !, Alain Goraguer va proposer quatre interprétations des titres du premier album de Gainsbourg sous le titre Du jazz à la une ! (45 tours EP Philips 424.107 - 1958) : Ce mortel ennui, Le poinçonneur des Lilas, La femme des uns sous le corps des autres et Du jazz dans le ravin. Alain Goraguer participera aux six premiers albums de Serge Gainsbourg ainsi qu’à l’enregistrement de plusieurs de ses interprètes Le plus gros succès a été Poupée de cire, poupée de son. « J’ai fait les arrangements » France Gall a chanté directement sur l’orchestre sous la direction d’Alain Goraguer ; certains critiqueront la place trop importante de l’orchestre ce que France Gall réfute. « Avec Serge Gainsbourg, nous avons cosigné quelques titres dont L’eau à la bouche. Parmi les interprètes de Gainsbourg il y avait Brigitte Bardot, très agréable à travailler, très sérieuse et très sympa. » Alain Goraguer arrangera une douzaine de titres pour Bardot et signera la musique de Les omnibus. La mode du Hula-Hoop Présentation du disque Hula-Hoop par la chanteuse Paola : « Je vous présente Gogo : 1m65 environ, la mise impeccable, le regard malicieux derrière ses lunettes, une dent de devant cassée comme celle d’un petit garçon tombé à la récréation, un léger zézaiement, bref : un type sympathique quoi. Gogo ? Mais Gogo quoi ? Oh c’est vrai, pas très orthodoxe cette présentation, excusez-moi : Alain Yves Réginald Goraguer, violoniste à 11 ans, pianiste à 20, chef d’orchestre aujourd’hui. Et quel chef d’orchestre ! Écoutez plutôt Hula hoop. Entraînant n’est-ce pas ? Voilà qui donne envie de danser, mais attention ! Pas n’importe quelle danse, Il s’agit de Hula-hoop… » (Collection Top Réalités Jeunesse 45 tours SP Philips 372.617 F - 1958) Alain Goraguer développera à nouveau le thème du Hula Hoop accompagné par Les Fontana pour une très rare compilation nommée DANSE-PARTY N °26 - Pour danser quand le chat n’est pas là (45 tours SP Philips 372.620 F - 1958) avec les morceaux Hoopa Hoola qu’il signe lui-même et Youpie Youp signé Charles Greanet et Bob Davie. Alain Goraguer compositeur et arrangeur de musiques de films En 1957, Alain Goraguer signe ses premières musiques de films pour le réalisateur Pierre Kast, tout d’abord pour le court-métrage Le Corbusier, l’architecte du bonheur puis le long métrage : Amour de poche avec Jean Marais et Jean-Claude Brialy. Malheureusement ces deux bandes originales ne seront pas gravées sur disque. La première musique de film d’Alain Goraguer à faire l’objet d’une distribution (45 tours EP Fontana 460.579 ME - 1958) est Le piège, film de Charles Brabant avec Raf Vallone, Magali Noël et Charles Vanel, bien que la musique soit signée Maurice le Roux, on fit appel à Alain Goraguer pour les séquences de Jazz : « Un des meilleurs pianistes de Jazz français qui se double d’un excellent arrangeur-compositeur. Voici en haute-fidélité, la version intégrale de ces séquences » comme l’indique le dos du 45 tours. On retrouve quatre morceaux qui vont du slow au cha-cha-cha : Cora, Paricia, Bélinda, Amanda. Sur les recommandations de Boris Vian, Alain Goraguer signe la musique de l’adaptation de son roman J’irai cracher sur vos tombes, réalisé par Michel Gast, six thèmes seront gravés sur disque (45 tours EP Philips 432.400 BE – 1959) : Blues de Memphis, Générique, Thème d’amour, Thème de Liz, Blues de Memphis et Surprise-partie au bord de l’eau. Après l’enregistrement du deuxième album de Gainsbourg simplement nommé N°2, les deux acolytes se retrouvent pour la musique du film Les loups dans la bergerie d’Hervé Bromberger. Le disque (45 tours EP Philips 432.447 BE – 1960) comprend cinq thèmes : Générique, Fugue, Les loups dans la bergerie, Cha cha cha du loup et Les loups dans la bergerie (final). Gainsbourg écrira des paroles sur Cha cha cha du loup pour son EP Romantique 60. Le duo enchaîne avec ce qui deviendra le premier vrai succès de Serge Gainsbourg, la musique du film L’eau à la bouche de Jacques Doniol-Valcroze dont il interprète le thème principal, le disque (45 tours EP Philips 432.492 BE - 1960) comprend L’eau à la bouche, Black March, Judith, Angoisse ; Gainsbourg mettra également en paroles le titre Judith pour son disque Romantique 60. Toujours la même année, Georges Delerue signe la bande originale du film Le bel age de Pierre Kast à l’exception d’un titre signé Goraguer : Nous avions vingt ans (45 tours EP Versailles 90 M 135 - 1960). Il enchaîne alors avec le film Les héritiers de Jean Laviron avec Roger Pierre, Jean-Marc Thibault et Jacqueline Maillan. Le disque comprend six thèmes : Générique, Jazz de Chine, Aux écoutes, Tel père, tel fils, L’amour et l’argent et Attente. Alain Goraguer s’allie le temps de deux EP au percussionniste cubain Humberto Canto pour un groupe éphémère nommé pour l’occasion Los Goragueros ; le second EP contient deux instrumentaux : Papa aime maman (Jo Moutet / Robert Chabrier) et La plume de ma tante (Al Hoffman - Dick Manning / Jacques Plante) (45 tours EP Philips - 424.190 PE - 1960) Alain Goraguer multiplie les arrangements pour différents artistes : « J’ai également travaillé avec Bobby Lapointe, un personnage très particulier, très spécial… Charmant garçon, il était dans la vie comme on se doute qu’il est par rapport à ses chansons, un personnage intéressant » « En 1962, j’ai rencontré Jean Ferrat, une grande amitié s’est nouée tout de suite et après j’ai fait toute sa carrière comme orchestrateur et arrangeur… Nuit et brouillard est la chanson qui m’a le plus touché mais je n’étais pas du tout proche de lui politiquement ce qui ne changeait rien à notre amitié. » « J’ai signé des arrangements sous le nom de Milton Lewis, (particulièrement pour Jean Ferrat et pour le cinéma) c’était la mode des arrangeurs anglo saxons… du marketing. » Rauber et Goraguer aux deux orchestres Pour la première fois dans l’histoire du disque, chacun de ces enregistrements a été réalisé non pas avec un orchestre mais avec deux orchestres, et deux chefs d’orchestre-arrangeurs Voici comment ; Au cours d’une première séance, on enregistre uniquement la section jazz et les rythmes, un peu comme pour un accompagnement chant, c’est à dire que l’arrangeur laisse en « blanc » la mélodie et se concentre sur la base rythmique d’accompagnement. Au cours d’une deuxième séance, on enregistre les cordes (trente musiciens) suivant le procédé du rerecording. On procède alors à la délicate opération du mixage de la bande magnétique trois pistes pour arriver à superposer ces deux enregistrements en un synchronisme parfait, mais une oreille avertie ne peut s’y tromper ; aucun arrangeur au monde ne pourrait avoir à la fois le punch de cette section rythmique et la qualité d’écriture de ces violons. Les auteurs de ce tour de force musical et technique sont pour le jazz, Alain Goraguer et pour les cordes François Rauber. L’un et l’autre sont bien connus de tous les musiciens professionnels et unanimement salués comme des « chefs de file » (33 tours 30 cm Philips 77.169 - 1962). « Deux amis metteurs en scène : Serge Korber et Claude Bernard-Aubert qui avaient fait des films qui avaient eu de beaux succès, n’avaient plus de contrat et pour s’en sortir, ils avaient fait du porno tous les deux et c’est par amitié que je les ai suivi, comme on ferait de la musique au mètre. » Il signe ces musiques sous le pseudonyme de Paul Vernon (clin d’œil à Boris Vian qui avait écrit sous le pseudonyme de Vernon Sullivan). Alain Goraguer a principalement œuvré dans les musiques de films et a composé près de cent bandes originales. Sa composition la plus connue est certainement pour La planète Sauvage ; film d’animation pop et philosophique de René Laloux et Topor sorti en 1973 après quatre ans de production. Les compositions psychédéliques d’Alain Goraguer ciselées sur les images du film en ont fait un classique et le disque trouve sa place dans toutes les phonothèques dignes de ce nom après avoir été redécouvert par une nouvelle génération. Si sa collaboration avec Serge Gainsbourg fut fructueuse, il est aujourd’hui reconnu que concernant les musiques de films (et uniquement les musiques de films), c’est Alain Goraguer qui faisait la majorité du travail et les nouvelles rééditions le créditent désormais d’une co-écriture ce qui d’après l’intéressé est « plus juste ». Olivier JULIEN © FRÉMEAUX & ASSOCIÉS 2020 English summary THE INSTRUMENTAL WORLD OF ALAIN GORAGUER JAZZ AND FILM MUSIC 1956-1962 While the role of a songwriter (the author of the lyrics) and that of a composer (the writer of the music) is no secret, the role of the arranger is often underestimated, if not unknown. Investigating various aspects of music production in France can uncover the name of Alain Goraguer as part of associations with an immense palette of artists with names as familiar as Brigitte Fontaine, Les Quatre Barbus, Les Trois Menestrels, Brigitte Bardot, Salvatore Adamo, Boby Lapointe, Annie Girardot, Georges Moustaki, Catherine Sauvage, France Gall, Isabelle Aubret or Magali Noël. But Goraguer’s name was above all associated with Serge Gainsbourg (for the latter’s first six albums), and, under the pseudonym “Milton Lewis”, the entire career of singer Jean Ferrat. The arranger is the musician who gives “form” to a song, notably by writing a score for each instrument that contributes to it; the arranger “dresses” the melody (often contributing to it) and gives a song its flesh. This set gives an insight into Alain Goraguer’s instrumental career by looking back at the records he made under his own name… and even those he made under the pseudonym Laura Fontaine! Alain Goraguer worked mainly in film music and he has composed nearly one hundred original soundtracks. His best-known composition is most certainly his music for the “La Planète Sauvage”, an animated film made by René Laloux and Topor. The movie was both pop and philosophical, and it was released in 1973 after spending four years in production. The chiselled psychedelic music that Goraguer composed to accompany the film’s images made the production a classic. And the resultant record, rediscovered by a whole new generation, deserves a place in any collection worthy of the name. While Goraguer’s collaboration with Serge Gainsbourg was an extremely fruitful one, today it is widely recognized that where film music is concerned (and only film music), it was Alain Goraguer who did most of the work, and so new editions now credit him as the co-composer, which, as Alain himself puts it, “is only fair.” DISCOGRAPHIE CD1 : ALAIN GORAGUER, SON TRIO ET SON ORCHESTRE Alain Goraguer et son trio n°1 1 - Les lavandières du Portugal (André Popp / Roger Lucchesi) 2 - With the Wind and the Rain in Your Hair (Clara Edwards / Jack Lawrence) 3 - L’homme et l’enfant (Jack Shaindlin / René Rouzaud) 4 - Star Eyes (Don Raye / Gene De Paul) Avec Alain Goraguer au piano, Paul Rovère à la basse et Christian Garros à la batterie 45 tours EP Philips 432.106 NE - 1956 Go..Go..Goraguer 5 - Gogo’s Goggles (Alain Goraguer) 6 - Darn that Dream (Eddie De Lange / Jimmy Van Heusen) 7 - Demain je dors jusqu’à midi (Jean Nohain / Mireille) 8 - It’s Easy to Remember (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 9 - Stella by Starlight (Ned Washington, Victor Young) 10 - You and the Night and the Music (Howard Dietz / Arthur Schwartz) 11 - Love or Infatuation (Frederick Hollander / Sam Coslow) 12 - You Are too Beautiful (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 13 - What is this Thing Called Love (Cole Porter) 14 - Prelude to a Kiss (Duke Ellington) 15 - British Soup (Alain Goraguer) 16 - The Nearness of You (Hoagy Carmichael / Ned Washington) Avec Alain Goraguer au piano, Paul Rovère à la basse et Christian Garros à la batterie 33 tours 30 cm Philips N77.307 L - 1956 Alain Goraguer et son orchestre - Slow et Fox - Du jazz à la une 17 - Ce mortel ennui (Serge Gainsbourg) 18 - Le poinçonneur des Lilas (Serge Gainsbourg) 19 - La femme des uns sous le corps des autres (Serge Gainsbourg) 20 - Du jazz dans le ravin (Serge Gainsbourg) Avec Alain Goraguer au piano, Christian Garros à la batterie et Paul Rovère à la contrebasse 45 tours EP Philips 424.107 - 1958 Collection Top Réalités Jeunesse - Hula-Hoop 21 – Hou-la-la-houp (Alain Goraguer) Alain Goraguer et son ensemble 45 tours SP Philips 372.617 F – 1958 Danse-party n°26 - Pour danser quand le chat n’est pas là 22 - Hoopa Hoola - Hula-Hoop (Alain Goraguer) 23 - Youpie Youp - Hula-Hoop (Charles Greanet - Bob Davie - Jacques Plante) Alain Goraguer, son ensemble et les Fontana 45 tours SP Philips 372.620 F – 1958 Los Goragueros – Cha Cha Cha 24 - Papa aime maman (Jo Moutet / Robert Chabrier) 25 - La plume de ma tante (Al Hoffman - Dick Manning / Jacques Plante) Alain Goraguer et son orchestre 45 tours EP Philips – 424.190 PE - 1960 CD2 : ALAIN GORAGUER – BANDES ORIGINALES DE FILMS Bande originale du film Le piège de Charles Brabant 1 - Cora - fox (Alain Goraguer) 2 - Patricia - slow fox (Alain Goraguer) 3 - Belinda - cha-cha-cha (Alain Goraguer) 4 - Amanda - slow (Alain Goraguer) Alain Goraguer et son orchestre 45 tours EP Fontana 460.579 ME - 1958 Bande originale du film J’irai cracher sur vos tombes de Michel Gast 5 - Blues de Memphis (Alain Goraguer) 6 - Générique (Alain Goraguer) 7 - Thème d’amour (Alain Goraguer) 8 - Thème de Liz (Alain Goraguer) 9 - Blues de Memphis (Alain Goraguer) 10 - Surprise-partie au bord de l’eau (Alain Goraguer) Alain Goraguer et son orchestre 45 tours EP Philips 432.400 BE - 1959 Bande originale du film Les loups dans la bergerie d’Hervé Bromberger 11 - Générique (Serge Gainsbourg) 12 - Fugue (Serge Gainsbourg) 13 - Les loups dans la bergerie (Serge Gainsbourg) 14 - Cha cha cha du loup (Serge Gainsbourg) 15 - Les loups dans la bergerie (Serge Gainsbourg) Musique de Serge Gainsbourg, arrangements et direction : Alain Goraguer 45 tours EP Philips 432.447 BE - 1960 Bande originale du film L’eau à la bouche de Jacques Doniol-Valcroze 16 - L’eau à la bouche - cha-cha-cha (chant : Serge Gainsbourg) 17 - Black March - blues (Serge Gainsbourg) 18 - Judith - slow-rock (Serge Gainsbourg) 19 - Angoisse - slow-fox (Serge Gainsbourg) Musique de Serge Gainsbourg, arrangements et direction : Alain Goraguer 45 tours EP Philips 432.492 BE - 1960 Bande originale du film Le bel âge de Pierre Kast 20 - Nous avions vingt ans (Alain Goraguer) Alain Goraguer et son orchestre 45 tours EP Versailles 90 M 135 - 1960 Bande originale du film Les héritiers de Jean Laviron 21 - Générique (Alain Goraguer) 22 - Jazz de Chine (Alain Goraguer) 23 - Aux écoutes (Alain Goraguer) 24 - Tel père, tel fils (Alain Goraguer) 25 - L’amour et l’argent (Alain Goraguer) 26 - Attente (Alain Goraguer) Alain Goraguer et son orchestre 45 tours EP Versailles 90 M 300 - 1960 Un soir chez vous avec Jacqueline Joubert 27 - Witch Doctor (docteur miracle) (Hubert Ithier / Ross Bagdasarian) 28 - La ballade irlandaise (Eddy Marnay / Emil Stern) 29 - When (Viens) (André Salvet - Guy Bertret / Jack Reardon - Paul Evans) 30 - Qu’on est bien (Guy Béart) Alain Goraguer et son orchestre Cent idées pour réussir vos soirées - Marie-Claire le disque-magazine de minuit 45 tours EP Philips MC3 - 1958 CD3 : ALAIN GORAGUER sous le pseudonyme de LAURA FONTAINE ET SON QUARTETTE RAUBER ET GORAGUER AUX DEUX ORCHESTRES Laura Fontaine et son quartette - Piano-bar 1 - I Only Have Eyes for You (Harry Warren / Al Dubin) 2 - My Funny Valentine (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 3 - Bewitched (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 4 - Deed I do (Walter Hirsh / Fred Rose) 5 - I Didn’t Know what Time it Was Me (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 6 - Lovely to Took at (Jerome Kern) 7 - Rose Room (Art Hickman / Harry Williams) 8 - Cocktails for Two (Arthur Jonnston / Sam Coslow) 9 - Smoke Gets in Your Eyes (Jerome Kern) 10 - Lullaby of Broadway (Harry Warren) 11 - Nous avions vingt ans (Alain Goraguer / Boris Vian) 12 - You Go to My Head (Harry Gillepsie - John Frederik Coots) 13 - Where or When (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 14 - There’s a Small Hotel (Richard Rodgers & Lorenz Hart) 33 tours 30 cm Fontana 680.009 TL - 1958 Laura Fontaine et son quartette - Slow-fox 15 - My Heart Belongs to Daddy (Cole Porter) 16 - La vie mondaine (The Lady is a Tramp) (Richard Rodgers & Lorenz Hart - Jacques Plante) 45 tours EP Fontana 460.047 TE Deluxe - 1959 Rauber et Goraguer aux deux orchestres 17 - Accordéon (Serge Gainsbourg) 18 - Le jazz et la java (Claude Nougaro / Jacques Datin d’après un thème de Joseph Haydn) 19 - Toi et moi (Jacques Datin / Maurice Vidalin) 20 - Père est bath (François Rauber - Alain Goraguer / Jacques Brel) 21 - Begin the Beguine (Cole Porter) 22 - Jambalaya “On the Bayou” (Hank Williams - Fernand Bonifay) 23 - Derniers baisers “Sealed with a Kiss” (Peter Udell - Gary Geld - Pierre Saka) 24 - Quand on cesse d’’aimer (Leny Escudero) 25 - Une petite fille (Jacques Datin - Claude Nougaro) 26 - L’amour et l’eau claire (Alain Goraguer / François Rauber - Jacques Datin) 27 - Bon vent ma jolie (Colette Mansart - Jean Dréjac) 28 - All the Things You Are (Jerome Kern) 33 tours 30 cm Philips 77.169 - 1962 |
|
|
|
|||||||
|
|