Al Lirvat And His Cigal'S Band - Paris 1955
Al Lirvat And His Cigal'S Band - Paris 1955
Ref.: FA5215

AL LIRVAT INCLUDED BENNY WATERS

Ref.: FA5215

Direction Artistique : JEAN-PIERRE MEUNIER

Label : Frémeaux & Associés

Durée totale de l'œuvre : 50 minutes

Nbre. CD : 1

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Présentation

"1955. La Brasserie de la Cigale ou Harlem à Paris. Entre Dixieland, Middle Jazz et Rhythm n’ Blues, le sextet du tromboniste guadeloupéen Al Lirvat nous offre un feu d’artifice de groove et de swing. Rare performance du saxophoniste américain Benny Waters, au meilleur de sa forme. Un document exceptionnel et historique à tous points de vue."
Jean-Pierre Meunier

"1955. The Brasserie de la Cigale was the Parisian Harlem.  Influenced by Dixieland, Middle Jazz and Rhythm ‘n Blues, the sextet led by the Guadeloupian trombonist Al Lirvat presents a pyrotechnic display of groove and swing.  A rare performance by the American saxist Benny Waters, on excellent form.  An exceptional and historic document in every way." 

Jean-Pierre Meunier
Al Lirvat (tb), Benny Waters (ts, ss, cl), Childebert Mourinet (as), Pierre Jean-Louis (p), René James (b), Harold Smith (dm), Georgie Smith (voc).
Production : Frémeaux & Associés avec le soutien d'Al Lirvat. (antilles, créole, caraîbes, biguine, french west indies).
Droits : Groupe Frémeaux Colombini SAS.



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Presse
Pour écouter du jazz antillais après-guerre, il n’y avait pas que la Cigale ! Dans un petit immeuble au 4 rue Sainte-Beuve près de Montparnasse se tenait La Canne à Sucre, où le tromboniste et guitariste Albert, ou Al Lirvat, né en 1916 à Pointe à Pitre, composa l’une de ses plus belles chansons (« Mi Belle Journée » qui mériterait d’être un standard) et inventa le Wabap, réponse guadeloupéenne au Cubop afro-cubain ! Indissociable de Robert Mavounzy, Lirvat théorisa la rencontre du jazz et de la tradition biguine, après avoir été traumatisé par le concert de Dizzy Gillespie à Pleyel en 1948. Le trombone ? Il s’y était mis un peu par hasard lors de son arrivée à Paris treize ans plus tôt : c’était le seul pupitre vacant de l’orchestre de Felix Valvert, guadeloupéen comme lui, et pour cause… son tromboniste venait de décéder ! Taulier de la Cigale jusqu’à sa fermeture, engagé dans la préservation d’un patrimoine qu’il avait contribué à rénover et enrichir. Lirvat publia en 2002 un dernier disque en guise de testament, passant le flambeau du Wabap à la génération des Mario Canonge, Eric Vinceno et Alain Jean-Marie, qu’il avait lancé dans son orchestre en 1973, soit au lendemain de son arrivée en métropole. Composé à Pointe à Pitre alors qu’il était adolescent, « Touloulou », du nom de ce petit crabe rouge vif vivant aux Antilles, restera l’un de ses plus grands tubes. David KOPERHANT  - JAZZ NEWS
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Frémeaux & Associés est le premier éditeur sonore du patrimoine créole. La direction de la réédition de toute l’histoire de la musique antillaise a été confiée à M. Jean-Pierre Meunier, spécialiste de la musique et de l’histoire des Antilles.Ce travail a été honoré de l’ensemble des distinctions de la presse World Music, comme de la presse classique ou jazz. Frémeaux & Associés est particulièrement sensible aux nombreux courriers reçus depuis les Antilles de la part d’auditeurs heureux d’avoir pu retrouver la mémoire de leur histoire (biguine, valses & mazurkas créoles, naissance du zouk et du mambo…)
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En ces années-là, lorsqu’ un amateur avait dépensé toutes ses économie entre le club de St Germain et le Blue Note, il lui restait une seul solution afin d’assouvir son vice : aller pour le prix d’une consommation écouter les « Antillais » à la Cigale. Sous le signe de l’éclectisme s’y pratiquait un jazz roboratif de première qualité. Nous est offert aujourd’hui l’opportunité de revenir sur ces moments de bonheur et, un demi siècle plus tard, s’imposent toujours la qualité des arrangements d’Al Lirvat (Route 66, I’m in the mood for love, When the saints) et la valeur des solistes. Benny Waters qui, sur Blues in the Groove ou Yes ! The Cigal Sing again damerait le pion à l’illinois Jacquet ; Chidebert Mourinet proche de l’excellent Robert Ma-Vounzy ; Pierre Jean Louis, surprenant pianiste ( Two Baboons) et Al Lirvat lui-même, tromboniste de valeur et personnage-clef du jazz parisien qui révéla Michel Sardaby, Alain Jean Marie et André Condouant. Il est bon de pouvoir lui rendre tribut aujourd’hui.Alain TERCINET – JAZZMAN
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De 1955 à 1961, le tromboniste guadeloupéen Al Lirvat a dirigé l’orchestre de la Brasserie de la Cigale, qui comptait dans ces rangs le saxophoniste Benny Waters. Il existe peu d’enregistrements de ce septette, qui naviguait entre middle jazz du dixieland. Celui-ci, datant de 1955, témoigne d’une des facettes du jazz que l’on pouvait entendre alors à Paris.P.P - JAZZ MAGAZINE
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Il était une fois, à Paris, au cœur de Pigalle, une brasserie pittoresque où, pour le prix d’une bière pression, on pouvait déguster, sans modération, jusqu’au bout de la nuit, un jazz explosif sous l’impulsion du tromboniste guadeloupéen Al Lirvat entourés de musiciens également domiens. Cette brasserie où se côtoyaient, dans une ambiance détendue et joyeuse, soldats américains, prostitués et jazzophiles se nommait « La Cigale ». Pendant vingt ans, de 1955 à 1975, cette boite, aux parfums de Harlem, fut un haut lieu du jazz de la capitale. Al Lirvat s’est éteint, voici un an, à l’âge de 91 ans, après avoir enregistré un centaine de disques, soixante-dix-huit-tours et microsillons, des trésors aujourd’hui introuvables. Raison de plus pour acquérir l’album qu’il a gravé à Paris, en 1955, à la tête de son orchestre de La Cigale où figurent, exceptionnellement, le fougueux saxophoniste américain Benny Waters à la fois disciple de Bechet, de Hawkins. Une réédition que l’on doit aux Editions Frémeaux soucieuses de la sauvegarde de la belle mémoire musicale. C’est toute l’ambivalence de la jam session permanente à la Hampton que l’on retrouve dans ce CD à travers une douzaine de thèmes, pour la plupart des standards, de « Route 66 » à « When the Saints » où la sonorité puissante, chaleureuse et cuivrée du tromboniste leader fait merveille ! Si le présent album révèle tout le talent du jazzman Al Lirvat, il ne faudrait pas oublier l’impulsion déterminante qu’il a donné à la musique antillaise, favorisant l’essor du jazz caribéen dont Michel Sarbady, André Condouant, Alain Jean-Marie, Mario Canonge et quelques autres demeurent aujourd’hui les plus illustres représentants . LE JOURNAL DU DIMANCHE
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"Back around the time that this set was originally recorded, Paris was the jazz capital of Europe, attracting many Americans, some of whom settled there – but this CD shows that there was no lack of talent from elsewhere to be found in the French capital. The Brasserie De La Cigale was a prestigious club (though a flyer reproduced in the excellent and detailed booklet states, “We are a ‘café’, not a ‘night club’”) featuring musicians on long residencies and despite being a studio recording, this CD apparently captures the sound and ambience very well. I can certainly believe it. Al Lirvat, who died last year aged 91, was a highly accomplished trombonist from Guadeloupe in the Caribbean, equally at home with biguine as with jazz, though the focus of this set is firmly on the latter. His band comprises fellow Guadeloupeans Childebert Mourinet on alto sax and pianist Pierre Jean-Louis, bassist René James from Madagascar, and Trinidadian brothers Harold (drums) and Georgie Smith (vocals) – oh, and on tenor and soprano saxes and clarinet, Benny Waters.Brighton, Maryland born Benny Waters had settled in France by the time of this session but he had taught future Duke Ellington baritone saxist Harry Carney, worked with Charlie Johnson’s and Fletcher Henderson’s bands and played on numerous recording sessions prior to World War II; post-war he had toured and recorded for a couple of years with Roy Milton and that influence certainly surfaces on a couple of items on this excellent blowing session. Most obvious of course is ‘Blues In The Groove’, a fine riffing instrumental, though the swinging Lirvat composition ‘No Work Today’ also finds Waters essaying R’n’B licks on his tenor sax. ‘Swinging’ does in fact nicely describe much of this album. There are also a couple of languid ballads, an excellent soprano sax feature for Waters on the opening ‘Summertime’, and Georgie Smith comes across sub-Louis Armstrong with his singing on ‘Yes! The Cigal Sings Again’; he also sings on ‘Saints’, really just an excuse for everyone to take a chorus or two.This music was originally issued by the largely classical label Urania Records, and it seems most records were sold in the club itself. The sound quality is excellent, and any student of jazz in Europe – or lover of Benny Waters’ music - is recommended to pick up a copy."by NORMAN DARWEN - BLUES & RHYTHM
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Pigalle, alors haut lieu cinématographique, offrait au promeneur dans les années 1950 et 1960 (et même jusqu’en 1975) toutes sortes d’endroits où il pouvait pour une bière (ou autre chose) écouter de la musique vivante, jouée par des vrais gens sur des vrais instruments. La Cigale  était l’un de ces endroits qui justifiait à lui seul une sortie jusqu’à l’heure du dernier métro. L’orchestre d’Al Lirvat y régnait en petit maître. Le jazz le plus simple (non simpliste), le plus direct, le plus sincère aussi, s’y faisait entendre. Le tromboniste guadeloupéen y était entouré de musiciens pleins de santé: entre autres, Benny Waters (mort à 96 ans), Michel Sardaby (toujours en activité) ou le regretté Robert Mavounzy, mystérieusement décédé. En février 1955 l’animateur d’une petite maison de disques, Uriana, à l’idée d’enregistrer cette formation familière aux Parisiens noctambules. Paraissent ainsi quatre 33 tours 17 cm aux pochettes noir et blanc devenues depuis des raretés insignes, le distributeur Tahlia Disques ayant rapidement fait faillite. On ne saurait donc trop remercier Jean-Pierre Meunier et Patrick Frémeaux de mettre à disposition dans des conditions superlatives l’ensemble de ce qui a été  enregistré et d’apporter toute la documentation souhaitable sur cette formation devenue légendaire qui a conquis au jazz avec entrain et décontraction plusieurs générations. Y sont en particulier reproduites les quatre fameuses pochettes des vinyles Urania (dont seul le UJLP 802 fut un peu distribué). Davantage qu’un événement musical, il s’agit de la résurrection de temps disparus restés chers à tous ceux qui les vécurent, charmeurs à ceux qui en découvrirent les traces émouvantes. CLASSICA REPERTOIRE
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Liste des titres
  • Piste
    Titre
    Artiste principal
    Auteur
    Durée
    Enregistré en
  • 1
    Summertime
    Lirvat Al
    00:03:46
    1955
  • 2
    Give Over The Cheat
    Lirvat Al
    00:03:12
    1955
  • 3
    Route 66
    Lirvat Al
    00:04:43
    1955
  • 4
    Don't Blame Me
    Lirvat Al
    00:06:03
    1955
  • 5
    No Work Today
    Lirvat Al
    00:03:25
    1955
  • 6
    It's Wonderful To Be In Love
    Lirvat Al
    00:04:11
    1955
  • 7
    I'm In The Mood For Love
    Lirvat Al
    00:06:28
    1955
  • 8
    Two Baboons
    Lirvat Al
    00:03:24
    1955
  • 9
    Blues In The Groove
    Lirvat Al
    00:03:39
    1955
  • 10
    Yes The Cigal Sings Again
    Lirvat Al
    00:05:37
    1955
  • 11
    When The Saints Go Marchin' In
    Lirvat Al
    00:03:27
    1955
  • 12
    Original Dixieland One Step
    Lirvat Al
    00:02:52
    1955
Livret

AL LIRVAT

AL LIRVAT and his Cigal’s Band


Paris 1955
featuring BENNY WATERS


AL LIRVAT ET SON ORCHESTRE DE LA CIGALE
Si d’aventure, au début des années soixante-dix à la tombée de la nuit, vos pas de promeneur parisien vous avaient conduit jusqu’au boulevard de Rochechouart, entre Barbès et Pigalle, vous auriez été saisi de plein fouet, au passage d’une brasserie jetant sa lumière crue sur le trottoir, par les accents percutants d’un orchestre et de sa musique stimulante. Comme beaucoup de curieux, vous vous seriez arrêté un moment pour admirer à travers la vitre la  prodigieuse vitalité des musiciens puis, conquis par l’ambiance, vous seriez entré pour déguster, devant un verre de bière, l’un des meilleurs jazz de la Capitale. La Cigale, brasserie-concert unique en son genre, était à sa disparition en 1975 le dernier endroit où, pour le prix d’une consommation, on vous offrait un véritable spectacle de musique vivante. Son animateur le tromboniste guadeloupéen Al Lirvat, en s’y produisant à maintes reprises depuis 1942, avait fait la célébrité de ce lieu historique du jazz à Paris.
Le présent enregistrement se situe en février 1955. Après dix ans d’absence de la scène du jazz, période durant laquelle il s’était consacré à la biguine avec Sam Castendet à “La Canne à Sucre” puis en indépendant à “La Cabane Cubaine”, Al Lirvat jouait à La Cigale depuis un mois. Pour la première fois de sa vie, il n’était plus simple musicien mais chef et arrangeur d’un orchestre de jazz. Il avait été engagé par Pierre Rémérand, le nouveau gérant qui, en octobre 1951, avait racheté le fonds de commerce du “Père Drapier”, le créateur de la formule pendant l’occupation allemande. Al Lirvat succédait au trompettiste américain Jack Butler et il avait conservé une partie de son orchestre : le pianiste Pierre Jean-Louis, le saxophoniste alto Childebert Mourinet, tous deux guadeloupéens, et surtout le fabuleux clarinettiste et saxophoniste Benny Waters, âgé de 53 ans, grande figure de la “Golden Swing Era” aux États-Unis de 1925 à 1942. Al Lirvat leur avait adjoint le bassiste malgache René James, le batteur trinidadien Harold Smith et, pour les parties vocales, le frère aîné de ce dernier, Georgie Smith, qui avait travaillé comme batteur et chanteur avec Willie Smith “The Lion”, Bill Coleman, Louis Armstrong… La diversité d’origine des musiciens, tous Noirs, n’était pas le moindre attrait de ce sextet, l’un des plus étonnants de l’histoire du jazz à Paris. Sous l’impulsion de son chef, l’ensemble distillait chaque soir un jazz vigoureux, direct et explosif, au swing ininterrompu et envoûtant, puisant son énergie tout à la fois dans le dixieland, le middle jazz et le rhythm and blues, à contre-courant du mouvement West Coast qui commençait à faire sa place dans les caves de la rive gauche à Paris. Par chance extraordinaire, une nouvelle maison de disques voulut immortaliser ces instants d’exception. La séance eut lieu le 17 février 1955 à la salle Adyar, 4 square Rapp à Paris. La prise de son fut confiée à André Charlin (1903-1983), ingénieur acousticien de renom, pionnier de la Haute-fidélité et de la stéréophonie en France, lequel adopta une technique de pointe. Il en sortit quatre microsillons de 17 cm de diamètre, offrant un relief sonore d’une qualité inégalée à l’époque, avec la particularité d’une vitesse de 33 tours au lieu des 45 tours jusque là réservés à ce petit format. Mal­heureu­sement la société Thalia Disques, distributrice de la marque Urania, rencontra des difficultés financières. Les dis­ques furent mis en vente sur place à La Cigale et quelques clients seulement purent se les procurer, ce qui explique leur extrême rareté. Outre la performance, la cohésion des musiciens, l’originalité des arrangements élaborés par Al Lirvat en un savant do­sage de classi­cisme et de modernité, ces enregistrements sont un précieux témoignage de l’ambiance musicale de La Cigale où, à l’image des plus célèbres boîtes de Harlem, se pressaient amateurs de jazz de toutes conditions et de toutes origines pour en ressortir la tête bourdonnante et l’âme ravie. Ce sont aussi des exemples uniques du talent de Pierre Jean-Louis et Childebert Mourinet, musiciens pleins de promesses mais qui restèrent dans l’ombre. Pierre Jean-Louis, cousin germain de Moune de Rivel par son père, était un pianiste doué d’une technique brillante et d’une grande finesse, cultivant l’art de la dissonance et de la facétie avec des sonorités proches de Thélonius Monk et de Bud Powell. Il avait gagné l’estime du trompettiste Bill Coleman qu’il avait accom­pagné durant son séjour en Suisse en 1953. Pierre Jean-Louis avait aussi joué avec Don Byas. Il devait décéder en 1972, victime de son addiction à l’alcool. Ces disques apportent enfin un nouvel éclairage sur la personnalité du saxophoniste Benny Waters, disciple de Coleman Hawkins au ténor, de Sidney Bechet au soprano (écouter “Summertime”), mais aussi virtuose incroyable de la clarinette comme on s’en rendra compte à l’audition de “Original Dixieland One-step”. Venant compléter une discographie trop peu représentative de l’envergure de ce musicien, ces documents sont le maillon qui manquait.
La formation continuera de se produire à La Cigale durant un an et demi sans changement. En juillet 1956, Pierre Jean-Louis est remplacé par la pianiste Gaby Laurent. En septembre, le saxophoniste ténor Harry Perret succède à Benny Waters parti en tournée. En avril 1957, c’est au tour de René James d’être remplacé par Luc Davis, contrebassiste et chanteur. Puis en septembre 1957, Al Lirvat présente un ensemble complètement remanié. Outre son chef au trombone, il comprend Marcel Louis-Joseph (ts), Émilien Antile (as), Michel Sardaby (p), André Condouant (b) et Guy Duteil (dm). Al Lirvat conduira cet orchestre jusqu’en décembre 1961, avec une interruption d’un mois en février 1959 pour une tournée en Afrique, puis une autre d’un an de décembre 1959 à janvier 1961 pour accompagner Joséphine Baker à l’Olympia, faire une tournée en Grèce puis figurer dans le film “Paris Blues”. Al Lirvat reviendra à La Cigale en juin 1969, cette fois comme sideman de Benny Waters avant de reprendre la direction de l’orchestre en janvier 1970. Entre-temps, les destinées de la brasserie avaient encore changé de mains, reprises par André Rouel fin 1959 puis par Madeleine Buyse en 1962. Aux côtés d’Al Lirvat, on entendra le formidable saxophoniste Robert Mavounzy de 1970 jusqu’à sa mort en mars 1974 dans des circonstances non élucidées. La Cigale, subissant comme tant d’autres établissements la crise du spectacle, ferme définitivement ses portes le soir du dimanche 28 septembre 1975, dans une mémorable salve d’adieu. Ainsi disparaissait ce qui avait été non seulement un haut lieu du Jazz à Paris, mais encore une véritable institution.
Al LIRVAT
Le tromboniste guadeloupéen Al Lirvat, décédé en juin 2007, pourrait n’être, à l’instar de Stellio à la clarinette, qu’un interprète et un créateur parmi les plus éloquents et les plus inspirés de la musique traditionnelle des Antilles et de son fleuron la biguine. Chef d’orchestre et arrangeur, animateur de cabarets parisiens et d’innombrables soirées dansantes, il a abondamment contribué au succès des musiques tropicales auprès du public français de Métropole. Éminent tromboniste de jazz, ouvert à tous les courants classiques et modernes venus d’outre-atlantique, découvreur de talents (Alain Jean-Marie, Michel Sardaby, André Condouant, Marcel Louis-Joseph...), sa notoriété auprès des amateurs de jazz en France, en dépit d’une audience confidentielle, rejoint celles de Sidney Bechet, Claude Luter, Claude Bolling... pour ne citer que ceux-là. Doué d’un sens supérieur du rythme et de la mélodie, habile et savant harmonisateur, on lui doit des compositions immortelles qui se transmettront de génération en génération. Al Lirvat est assurément tout cela à la fois. Pourtant, il est bien plus encore : sa curiosité, son imagination, sa capacité d’inno­vation, son besoin insatiable de trouver des formules de plus en plus élaborées, captivantes et inédites ont fait de lui le musicien qui, par ses idées d’avant-garde, a donné une impulsion détermi­nante à l’évolution de la musique des Antilles. En créant la Biguine Wabap dès 1950, Al Lirvat a inauguré la fusion de la biguine et du jazz contemporain, fusion dont le principe, aujourd’hui en plein essor, a permis au jazz  caribéen de devenir un style à part entière, propre à cette partie du monde. Le présent album montre Lirvat sous un jour peu connu mais non moins convaincant : celui d’un pur jazzman, à l’égal des meilleurs chefs d’orchestre américains. D’autres disques complèteront cette vision d’un artiste dont on commence seulement à saisir la pleine dimension.
C’est durant la première guerre mondiale, le 12 février 1916, dans le Faubourg d’Ennery à Pointe-à-Pitre, qu’une jeune Guadeloupéenne du nom de Léontine Eugène-Eustase donne naissance à un garçon qu’elle prénomme Adolphe, Albert. Du fait d’une inscription fautive à l’État-civil, celui-ci serait né en réalité deux jours plus tôt comme l’intéressé ne manquait jamais de le rappeler. Le petit Albert est reconnu par son beau-père André Lirvat qui, malheureusement, partira combattre dans les tranchées. Rentré en Guadeloupe après l’Armistice de 1918, vivant mais gazé, ce père adoptif, les poumons malades, décèdera deux ans plus tard. Âgé de quatre ans, Albert est confié à la soeur de sa mère, sa marraine, mariée à Savinien Léogane qui tenait un commerce d’instruments et de partitions de musique Place de la Victoire à Pointe-à-Pitre. Les époux Léogane seront des parents attentionnés pour le jeune enfant, subvenant à ses besoins et à son éducation jusqu’à la fin de ses études. Albert est très tôt initié à la musique par son oncle qui, après un essai à la mandoline et au violon, lui offre un banjo alto. Durant ses études secondaires au Lycée Carnot de Pointe-à-Pitre, Albert forme avec ses camarades un orchestre amateur : “Los Creolitos”. Il com­mence à composer des airs dont certains sont encore populaires aujourd’hui. Fin décembre 1935, titulaire de son baccalauréat de philosophie, Albert Lirvat traverse l’Atlantique sur le “Pellerin de la Touche” pour entrer à l’École Centrale de TSF 12 rue de la Lune à Paris. Durant sa vie d’étudiant, il continue à jouer de la guitare en amateur, fréquente les bals antillais mais aussi le club de football du Docteur Zizine (le Racing-club Antillais). Albert y rencontre le guitariste martiniquais Pierre Louise (futur père d’Eddy Louiss) avec qui il enregistrera en juillet 1939 deux duos de guitare de toute beauté (réédition Frémeaux & Associés FA 069). Dans la nuit du 15 avril 1939, rue de la Huchette à Paris, faisant un remplacement à la guitare dans l’orchestre de Stellio, il est témoin de l’accident cérébral qui causera le décès du célèbre clarinettiste le 24 juillet 1939. Son diplôme d’ingénieur radio en poche, Albert Lirvat repart en Guadeloupe début août 1939. À peine débarqué, la seconde guerre mondiale éclate. Son sursis étant terminé, il est envoyé en Martinique pour y recevoir une instruction militaire de six mois. Volontaire pour suivre une formation d’élève-officier, on le renvoie en Métropole en avril 1940 à destination de l’École des Transmissions de Rochefort. Il arrive en pleine débâcle, alors que les Allemands envahissent la France. Après avoir erré d’une ville à l’autre durant plusieurs semaines, Albert Lirvat est démobilisé à Paris en août 1940. Sans argent, sans travail, il se retrouve dans une situation difficile. Il a l’idée d’aller demander de l’aide à son ami le saxophoniste et chef d’orchestre Félix Valvert qu’il avait connu à “La Boule Blanche” en 1936. Manquant d’un tromboniste dans son orchestre, celui-ci, connaissant la valeur du musicien, lui propose de l’engager à condition qu’il se mette au trombone. Il lui fournit un instrument. Ainsi commence la carrière d’Albert Lirvat, devenu musicien professionnel avant même que de connaître l’instrument. Il se met aussitôt au travail, apprenant par lui-même durant toute l’année 1941, subsistant par de petits boulots (dépanneur radio, aide cuisinier dans un restaurant...).
En février 1942, une première tournée de l’orchestre de Félix Valvert s’arrête à Dijon au bout de quinze jours à la suite d’un heurt avec les troupes d’occupation. Valvert organise pour ses onze musiciens une seconde tournée en zone non occupée à partir de mai 1942 : Aix-en-Provence, Nice, Hyères, Marseille, Carry-le-Rouet... Après la dispersion de l’orchestre en septembre, Albert Lirvat remonte à Paris. En novembre 1942, à l’instigation du saxophoniste Robert Mavounzy, il rejoint l’Ensemble Swing du batteur camerounais Fredy Jumbo qui jouait depuis cinq mois à “La Cigale”, brasserie-concert du quartier de Pigalle dont le patron Monsieur Drapier venait de lancer le concept (cf. coffret “Swing Caraïbe”, FA 069). La formation composée de musiciens antillais enregistre une série de disques chez Polydor et donne plusieurs concerts à la Salle Pleyel et à l’École Normale de Musique sous l’égide du Hot-Club de France. Al Lirvat enregistre aussi pour la marque “Swing” de Charles Delaunay avec le clarinettiste Hubert Rostaing et le pianiste Léo Chauliac. En 1944, l’orchestre de La Cigale est dirigé par le batteur martiniquais Sam Castendet. Après la Libération, la formule “Jazz en brasserie” reprend de plus belle, grandement appréciée par la nouvelle clientèle des soldats américains. Au référendum annuel de la revue “Jazz Hot” dans la catégorie trombone, Al Lirvat, dont la technique n’a cessé de progresser, est à la seconde place en 1944 et il arrive en tête en 1945. À partir de 1946, il quitte la scène du jazz pour suivre l’orchestre de Sam Castendet dans les clubs de danse et les cabarets antillais (Villa d’Este, Pavillon d’Arme­nonville, Canne à Sucre...). Cette année-là, Albert rencontre Marthe Alessandrini, chan­teuse d’origine corse avec laquelle il crée un numéro de duettistes créoles sous le nom de “Martinales y Alberto”. Ils seront mari et femme jusqu’à la mort de celle-ci en août 1979. Ils s’installent dans un pavillon de la belle époque, 9 bis rue du Hainaut à Paris, qui restera le domicile d’Albert Lirvat jusqu’à la fin de sa vie. De 1947 à 1953, Albert Lirvat complète ses connaissances musicales grâce aux leçons de sa belle-mère, professeur de piano classique. Il étudie l’harmonie, la composition, l’orches­tration dans des ouvrages théoriques. Après avoir entendu le grand orchestre be-bop de Dizzy Gillespie à la Salle Pleyel en février 1948, il rêve de moderniser la biguine et compose en 1950 ses premières biguines “Wabap”. De 1946 à 1954, Lirvat fait preuve d’une intense activité discographique : biguine traditionnelle avec Sam Castendet et Alphonso, biguine Wabap dans des ensembles variés en collaboration avec Robert Mavounzy. Al Lirvat revient au jazz et devient chef d’orchestre de la Cigale de janvier 1955 à décembre 1961, avec une pause d’un an en 1960. En 1962 commence une longue association avec le saxophoniste et clarinettiste martiniquais Barel Coppet. Du fait de la crise subie par les orchestres pour trouver des engagements stables, Al Lirvat est amené à créer en avril 1965, au retour d’une tournée aux Antilles avec Barel Coppet, un trio instrumental et vocal “Le Trio des Îles” (guitare, clarinette, percussions) qui passe chaque soir dans plusieurs cabarets de Paris. Après le départ définitif de Barel Coppet à la Martinique en 1968, Al Lirvat revient à La Cigale en juin 1969 jusqu’à sa fermeture en septembre 1975, et il enregistre deux microsillons de jazz.
Arrivé à la soixantaine, Al Lirvat diversifie ses activités. Il donne des cours particuliers, fait du Théâtre (“L’Échange”, Théâtre de la Ville, 1976), figure dans des films, passe dans des clubs de jazz, sans cesser de composer des œuvres toujours plus originales. Il dirige l’orchestre de “La Canne à Sucre” de septembre 1976 à août 1977, participe à des spectacles antillais et comédies musicales à Paris (“Ballets Martiniquais” en 1977, “L’Île Heureuse” de Ronnie Aul à l’Élysée Montmartre puis à Mogador en 1980). En 1979, Al Lirvat reçoit le trophée des “Maracas d’Or” pour son 33 tours “Biguine Wabap” paru chez Déesse. Ses prestations en public se font plus rares. En trio avec José Benjamin et Marcel Dorina, il assure l’animation musicale dans de nombreux restaurants. Le 15 novembre 1990, avec un orchestre réuni spécialement pour l’occasion, il donne un concert inoubliable, filmé par RFO, au premier Festival de Jazz de Pointe-à-Pitre. En 1992, il tient l’un des rôles principaux du film “Siméon” réalisé par Euzhan Palcy. En novembre 1993, Al Lirvat se produit en quartet au “Petit Opportun” à Paris. On le voit pour la dernière fois en public en mai 1994, à 78 ans, pour un concert au Centre Mathis de Paris. Puis, souffrant d’insuffisance cardiaque et atteint d’une surdité handicapante, il cesse de jouer de son instrument. Al Lirvat n’est pas oublié pour autant. Le 21 octobre 1997 à l’Auditorium des Halles, la Mairie de Paris lui rend un vibrant hommage et lui remet la Médaille de Vermeil de la Ville. Al Lirvat reçoit le grade de Chevalier dans l’Ordre National du Mérite en mai 1998. Il est distingué par la SACEM de Guadeloupe en mars 2002. Un disque de ses dernières compositions est publié cette année-là par le bassiste Éric Vinceno. Un passionnant documentaire sur sa vie est réalisé par Cécile Baquey en 2003 pour RFO. Al Lirvat décède à l’Hôpital Lariboisière à Paris le 30 juin 2007, âgé de 91 ans. Son corps a été incinéré le 6 juillet lors d’une émouvante cérémonie au Crématorium du Père Lachaise. Al Lirvat nous laisse un héritage d’une centaine de disques (78 tours et microsillons) et deux cents oeuvres déposées à la SACEM.
BENNY WATERS
Par sa prodigieuse vitalité, sa carrière professionnelle battant tous les records de durée, son ouverture aux différents courants musicaux qu’il a traversés, son esprit d’indépendance tout comme le charisme et la truculence de son personnage, Benny Waters est un saxophoniste atypique dans l’histoire du jazz. Il jouait encore en public à l’âge de 96 ans, deux mois avant sa mort survenue en 1998.Benny Waters nous a laissé un récit circons­tancié de sa vie dans son livre : “The Key to a Jazzy Life”, publié à compte d’auteur en 1985. Ce document fourmillant d’anecdotes permet de reconstituer une chronologie où subsistent encore de nombreuses imprécisions. Benny Waters est né le 23 janvier 1902 à Brighton, petit village dans la campagne du Maryland aux États-Unis. Il était le cadet de sept enfants dans une famille pieuse et musicienne. Son père, sa mère et ses trois soeurs chantent à l’église, et ses trois frères pratiquent plusieurs instruments. À l’âge de cinq ans, Benny découvre la clef cachée de l’orgue familial et apprend seul à le maîtriser. Ayant surpris les merveilleuses dispositions de son fils, sa mère déjà malade consacre ses dernières forces à lui donner une éducation musicale dans les règles. Benny se révèle enfant prodige au piano, puis il apprend la clarinette sur un modèle en mi bémol, peu courant et particulièrement difficile, que son frère aîné Clarence lui avait offert. À l’âge de huit ans, il commence à jouer dans l’orchestre de musique militaire dirigé par ce dernier. En 1910, à la mort de sa mère, Benny part vivre chez la sœur de celle-ci à Haverford, près de Philadelphie en Pennsylvanie. Elle est l’épouse d’un Noir fortuné qui possède une importante entreprise de maçonnerie. La cantatrice Marian Anderson venait régulièrement dîner chez eux. Au bout de deux ou trois ans, toute la famille de Benny vient à son tour s’installer dans la région de Philadelphie. Benny joue de la clarinette dans les deux orchestres de son frère aîné : l’orchestre familial “The Brother’s Band” et un autre d’une quinzaine de musiciens formé d’éléments de plusieurs villes voisines. Devenu virtuose de la clarinette, Benny Waters se met aux saxophones : alto, soprano, ténor. Ce dernier instrument fera sa renommée, tant comme soliste que comme musicien de pupitre. De 1918 à 1921, il est étudiant au Lycée de Philadelphie. Après un passage dans l’orchestre de danse de Lonnie Polk, il fait pour la première fois partie d’un véritable orchestre de jazz, celui du clarinettiste Charlie Miller. Ce sont aussi ses débuts de musicien professionnel. Pendant trois ans, il parcourt la Pennsylvanie, revenant trois jours par semaine au “Waldorf Castle” de Philadelphie. De 1922 à 1924, ayant quitté le lycée, Benny fréquente le Conservatoire de Boston (New England Conservatory). Il y apprend le solfège, l’harmonie, la composition et l’orchestration. Il gagne sa vie en donnant des cours particuliers de clarinette. Parmi ses 70 élèves figure Harry Carney, futur saxo baryton de Duke Ellington. Un jour, engagé au “Lamp’s Club” de Boston dans l’orchestre du pianiste Tom Whaley, Benny joue en compagnie de l’altiste Johnny Hodges âgé de 16 ans et tombe en extase devant la sonorité et la maturité du jeune prodige. Ils se lient d’amitié et se produisent quelque temps en duo au thé en musique d’un grand hôtel de Boston, se mettant chacun au piano et au saxophone à tour de rôle. Faute d’une assiduité suffisante, Benny quitte le Conservatoire de Boston sans diplôme mais non sans avoir acquis des bases musicales solides et définitives. En 1924, il figure dans divers orchestres à Philadelphie, Atlantic City, puis à New York pour un show de deux semaines au “Lafayette Theatre”.
C’est de 1925 à 1932, dans le “big band” du pianiste Charlie Johnson, que se développe la stature du futur Benny Waters. Devenu arrangeur de l’orchestre après le départ de Benny Carter, il écrit deux arrangements chaque semaine durant deux ans. Au niveau des meilleurs ensembles de Harlem, Charlie Johnson s’était attaché des musiciens aussi considérables que Jabbo Smith, Benny Carter, Sidney de Paris... Il se produisait le plus souvent au “Small’s Paradise” de New York, revenant faire les saisons d’été à Atlantic City. Après la dissolution de l’orchestre en 1932 pour cause de dépression économique, Benny Waters passe dans diverses formations de renom : Stuff Smith à Chicago, Louis Metcalf à New York... Début 1935, il est engagé comme ténor dans l’orchestre de Fletcher Henderson, succédant au saxophoniste Coleman Hawkins. Cette période est assombrie par une forte dépendance à l’alcool (dont Benny ne se délivrera qu’en 1969) qui lui confère une réputation de voyou. Six mois après son arrivée, il se casse le bras lors d’une rixe en état d’ébriété. C’est la rupture de son contrat avec Fletcher Henderson. Il fait huit mois d’hôpital et six mois de rééducation. Quand il peut jouer à nouveau fin 1936, Benny Waters est repris par Charlie Johnson à l’alto. L’année suivante, il fait six mois comme clarinettiste dans l’orchestre du flûtiste Alberto Socarras. De 1938 à 1940, il joue le plus souvent à New York dans l’orchestre du trompettiste Hot Lips Page, ou dans des hôtels pour le violoniste Norwood Fenner puis pour le pianiste Dave Martin. Il travaille ensuite avec Claude Hopkins (1940-41), avec Hot Lips Page à nouveau au “Kelly’s Stable” et à “l’Apollo Theater” de New York (1941), puis il remplace Teddy Buckner chez Jimmie Lunceford, jouant durant un an et demi au “Renaissance Ballroom” de New York puis au “Trianon Ballroom” de Los Angeles (1942-43). En compagnie de sa seconde femme, la pianiste Lorraine Faulkner, il dirige ensuite son propre orchestre durant quatre ans (1943-46), d’abord au “Red Mill” dans le Bronx à New York, puis à San Diego en Californie. Durant deux ans (1947-48), Benny Waters fait partie du “Roy Milton’s Rhythm-and-Blues Band”, d’abord à Los Angeles, puis en tournée dans tous les USA. À partir de 1949, il joue de la clarinette et du soprano dans l’orchestre dixieland du tromboniste Jimmy Archey, au “Ryan’s” de New York puis au “Savoy” de Boston. La carrière de Benny Waters prend un nouveau cap quand l’orchestre de Jimmy Archey s’envole pour l’Europe en 1952. Après quelques concerts en Suisse, la tournée s’arrête à cause d’une organisation défaillante. L’orchestre se sépare. Jimmy Archey rejoint le pianiste Earl Hines de passage en Europe. Les autres musiciens repartent aux USA. Benny Waters, quant à lui, intègre en décembre 1952 la formation du trompettiste Bill Coleman qui passait à ce moment-là au “Chiquito” de Berne, un club très connu en Suisse. Benny et Bill se connaissaient depuis 1931 pour avoir travaillé ensemble dans l’orchestre de Charlie Johnson. De 1953 jusqu’à fin février 1954, au sein du “Bill Coleman and his Swing Stars”, Benny Waters participe à toute une série de concerts passant par la Suisse, l’Allemagne, la Belgique, la France, l’Afrique du Nord, avec quelques pauses à Paris.
C’est en mars 1954 que Benny Waters est engagé à “La Cigale” de Paris dans la formation du trompettiste Jack Butler. L’année suivante, la direction de l’orchestre est transférée à Al Lirvat qui réalise la présente séance d’enregistrement. Début 1957, Benny Waters repart en tournée avec Bill Coleman en Italie. De retour à Paris, il revient à “La Cigale” avec Jack Butler en 1960 puis de 1962 à 1968. Après le départ de celui-ci en 1969, il reçoit la direction de l’orchestre. Puis au bout d’un an, en janvier 1970, souhaitant prendre son indépendance, Benny Waters repasse le flambeau à Al Lirvat. Il se produit ensuite uniquement en freelance et en soliste dans le circuit des nombreux festivals de jazz en Europe. Entre 1980 et 1985, il revient à New York pour quelques concerts. À la fin des années 1980, Benny Waters s’associe à la chanteuse Polya Jordan, phénomène vocal du blues et du gospel en France, et il fait avec elle de nombreux passages très remarqués dans les clubs parisiens. En 1992, atteint de la cataracte mais toujours vaillant en dépit de ses 90 ans, Benny Waters s’en retourne vivre à New York pour se faire soigner. L’opération est un échec. Devenu à moitié aveugle, il ne se décourage pas de vouloir faire sa place aux Etats-Unis et continue de se produire seul ou au sein d’un groupe de vétérans connu sous le nom de “The Statesmen of Jazz”. En 1996, Benny Waters est décoré dans l’ordre de la Légion d’Honneur par le Ministre de la Culture en France. En 1997, pour célébrer ses 95 ans, il se produit durant trois soirées consécutives au Birdland de Manhattan, concert public d’où sortira son dernier disque. Le 11 août 1998, peu après son installation à Columbia dans le Maryland, Benny Waters décède à l’hôpital de cette ville à l’âge de 96 ans.


CHILDEBERT MOURINET
Childebert Mourinet vient au monde le 26 décembre 1924 à Trois-Rivières (Guadeloupe). Il est élevé à Basse-Terre par son père, tonnelier et accordéoniste. À sept ans, il joue du triangle dans l’orchestre de quadrille familial où figure aussi son grand-père Arson au tambour de basque. Il s’initie à la batterie sur un instrument de sa fabrication. Dès l’âge de neuf ans, il se produit comme batteur avec les clarinettistes Auguste Nerplat et Ernest Machares. À dix-sept ans, il apprend la trompette, instrument qu’il délaissera quelques années plus tard pour se tourner vers le saxophone alto, son instrument définitif. Childebert Mourinet acquiert une solide renommée en Guadeloupe et crée en 1948 l’orchestre “Lotus Jazz” de Basse-Terre. Poussé par la volonté de faire carrière dans la musique, il quitte son île et débarque à Marseille en 1949. Après une expérience écourtée dans cette ville, il rejoint Paris où, sans travail et sans relations, il connaît des jours difficiles. Pendant un mois, accompagné d’un guitariste, il fait la manche “Chez Adrienne”, un restaurant créole de l’avenue du Maine à Montparnasse. Il trouve un engagement au “Tambourin” de la rue Vavin durant six mois, puis au “Plumeau”, boulevard Raspail, durant trois mois. Un soir à “La Roulotte”, 62 rue Pigalle, il entend pour la première fois le saxophoniste Robert Mavounzy. Ébloui par la virtuosité et le génie du musicien, il se fixe comme objectif de parvenir à l’égaler. Il prend des cours auprès d’un professeur et se met à travailler l’harmonie, la lecture et la technique de l’instrument, faisant rapidement d’énormes progrès. Fin 1950, Childebert remplace le batteur dans l’orchestre du trompettiste martiniquais Joseph Florentiny à “La Cigale”. Il joue aussi de l’alto à “La Rose Rouge”, rue de la Harpe. Le saxophoniste de Florentiny ayant fait faux bond, Childebert le remplace au pied levé en 1951 et devient aussitôt une figure de “La Cigale”. Il continuera de s’y produire dans la formation du trompet­tiste martiniquais Hubert Pontat (1952), puis avec le trompettiste américain Jack Butler (1953-54) puis avec Al Lirvat (1955-57). Il jouera ensuite au “Jimmy’s” de Montparnasse (1957-59), à “La Canne à Sucre” dans l’orchestre de Luis Angel (1959-60), puis à “L’Ajoupa”, dancing du boulevard Barbès (1961). Il participe en outre à de nombreux bals et galas. En 1961, le travail commençant à manquer pour les musiciens à Paris, Childebert Mourinet (sous le pseudonyme de Chil’ Debeer) décide de partir en Belgique avec sa femme la chanteuse Luce Mornay qu’il avait connue à Paris en 1958. Il s’installe pendant 7 ans à Bruxelles où son orchestre anime les principaux dancings de la ville et des environs : “Les Anges Noirs” (1961-63), “La Dolce Vita” (1964), “Les Folies Parisiennes” à la Porte de Namur (1964-68). Cette période est entrecoupée d’un séjour de quatre mois en Guadeloupe, à l’occasion du Carnaval 1966, au cours duquel il se produit au “Zombi”, boîte de nuit de la commune de Baillif, près de Basse-Terre. Il enregistre quelques 45 tours chez Célini. Mais ce séjour ravive la nostalgie du pays. En 1968, c’est le retour définitif en Guadeloupe. Childebert Mourinet se met peu à peu en retrait de la musique. Il ouvre un commerce et s’investit dans cette nouvelle activité. Il ne négligeait pas toutefois de donner ses conseils aux jeunes musiciens et de se joindre à eux pour le plaisir chaque fois que l’occasion se présentait. Quelques années plus tard, il dirige un night-club, “Le Geyser”, sur la commune de Bouillante. On l’entendra une dernière fois en public sur la scène du Centre des Arts de Pointe-à-Pitre lors d’une jam-session au Festival International du Saxophone organisé par Germain Cécé en janvier 1996. Quelques jours après, le 9 février 1996, il décède subitement dans la commune de Trois-Rivières à l’âge de 72 ans. Childebert Mourinet fait partie de cette école du bop guadeloupéen dont les figures marquantes furent les saxophonistes Robert Mavounzy et Émilien Antile. Dans la lignée de ces derniers, son jeu se caractérise par la prolixité et la vélocité du discours mélodique dans un cadre harmonique libéré. Il s’en différencie cependant par sa prédilection pour le growl. À la fin de sa carrière, pour des motifs purement professionnels, Childebert Mourinet se consacrait essentiellement à la musique de danse qu’il enrichissait de tout son savoir-faire acquis dans le jazz.


HISTOIRE DE LA FILIALE FRANÇAISE DES DISQUES URANIA
C’est le 14 décembre 1951 qu’est constituée selon acte sous seing privé la société Thalia Disques, SARL au capital de 1 million de francs dont le siège social se trouvait 40 rue Lauriston, Paris 16e. M. Ernest Lederer, industriel, apporte 80% des capitaux. M. Jean de Rohozinski, chef d'orchestre âgé de 32 ans, fournit les 20% restant et reçoit la fonction de gérant de la société (annonce n° 7141 du “Publicateur Légal” du 20 déc. 1951). L’entreprise a pour objet “l'enregistrement d’œuvres artistiques musicales, la fabrication, la vente, l’importation et l’exportation de disques et appareils phonographiques”. Le 24 décembre, la société est inscrite au registre analytique du commerce de la Seine sous la référence 367 409 B. Le 5 mars 1952, le siège social est transféré au 3 rue de Monttessuy à Paris 7e. Les marques Thalia et Urania sont publiées le 20 mai 1952 au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle “pour désigner des disques phonographiques en tous genres, de tous modèles et en toutes matières ; appareils phonographiques en tous genres, simples ou combinés avec des appareils de radio ; électrophones et toutes autres machines parlantes”. Un nouveau gérant, Pierre Béranger âgé de 64 ans, est nommé le 23 juin 1952. Les critères d’excellence de la marque sont affichés dans la profession de foi figurant sur les catalogues parus de 1952 à 1954 : “Le rêve des discophiles est enfin réalisé avec Urania qui présente ses disques de longue durée – Microsillons 33 tours – permettant l'audition d'un enregistrement exécuté selon la perfection même des possibilités techniques actuelles. Déjà, un matériel ultramoderne sert à ces enregistrements et, bientôt, le “three dimensionnal sound system” permettra enfin d’atteindre la Haute Fidélité Totale. Dès aujourd’hui vous pourrez, avec Urania, avoir la merveilleuse impression de la présence d’un orchestre, d’un ensemble lyrique, chez vous, dans votre salon. Les enregistrements Urania, la plupart inédits, d’un haut intérêt musical, sont réalisés à Paris, Rome, Milan, Munich, New York, Vienne, etc. par une équipe de spécialistes travaillant pour la Société. Vous écouterez, avec Urania, les meilleurs artistes, les plus grands orchestres, les plus beaux monuments de la musique ancienne et contemporaine, dont beaucoup d’opéras enregistrés pour la première fois sur des disques de longue durée.” La société Thalia Disques réalisa par elle-même plusieurs disques microsillons parus sous la marque Urania, dont le présent enregistrement d’Al Lirvat. Mais l’essentiel de son activité était de diffuser en France le fonds de musique classique de la firme “Urania Records”, sise à New York, 40 East 19th Street. Par contrat signé à Berlin-Est en novembre 1952, son représentant M. Rissland avait acquis auprès du Comité d’État de Radiodiffusion de la République Démocratique Allemande le droit d’exploiter les bandes magnétiques enregistrées et archivées de 1942 à 1945 par les services de Radio­diffusion du 3e Reich à Berlin, lesquelles bandes étaient arrivées en la possession dudit Comité d’État de la RDA après avoir été un temps sous le contrôle des autorités soviétiques à la fin de la guerre. On ignore quel fut le succès commercial des disques Urania auprès du public. Toujours est-il que la société Thalia Disques rencontre des difficultés financières à partir de 1955, en relation probablement avec le procès intenté contre elle en février 1954 par l’illustre chef d’orchestre allemand Wilhelm Furtwängler. Celui-ci avait vu rouge après la publication à son insu de son interprétation de la 3e Symphonie “Héroïque” de Beethoven à partir des bandes réalisées en 1944 à la radio de Berlin. Furtwängler meurt en novembre 1954 à l’âge de 68 ans mais son action est poursuivie par sa veuve et son fils. Par jugement du 4 janvier 1956, le Tribunal Civil de la Seine condamne solidairement les sociétés Thalia Disques et Urania Records à retirer les disques du commerce et à verser à la famille un million de francs de dommages et intérêts, décision confirmée en appel le 13 février 1957. Un liquidateur est nommé en mai 1957 puis Thalia Disques est mis en règlement judiciaire en octobre 1958. La faillite est prononcée en avril 1964. Les créanciers sont radiés d’office en août 1964 en même temps que disparaît la société qui avait déjà cessé toute activité depuis plus de sept ans.
Jean-Pierre MEUNIER
© 2008 FRÉMEAUX & ASSOCIÉS/GROUPE FRÉMEAUX COLOMBINI SAS


Pour les informations, prêts ou dons de documents, disques et photos, grand merci à : Archives de Paris, Arnaud Boubet (Paris Jazz Corner), Patricia Bugie, Jacques David, Alain Jean-Marie, Albert Lirvat, Childebert Mourinet, Mme Yolande Mourinet, Patrick Tricoit.


english notes
Al Lirvat and his Cigal’s Band
If perchance, as night was falling, you had strolled in Paris in the early seventies to the Boulevard de Rochechouart, between Barbès and Pigalle, you would have noticed a bar with its lights streaming onto the pavement accompanied by the lively notes of a band.  Out of curiosity, you would have stopped for a while to admire the prodigious vitality of the musicians, and then captivated by the ambience, entered to enjoy some of the best jazz in the French capital.  La Cigale, a unique kind of concert bar was the last place, before it closed in 1975, to boast a true show of live music for the price of a drink.  It was led by the Guadeloupian trombonist Al Lirvat, who had played there on many an occasion since 1942 and who made the name of this historic jazz venue in Paris.
This recording was made in February 1955.  Al Lirvat had been playing at La Cigale for a month, not just as a simple musician but as leader and arranger of a jazz band.  He had taken over from the American trumpeter Jack Butler and had kept part of his band:  pianist Pierre Jean-Louis, alto saxist Childebert Mourinet, both from Guadaloupe, and especially the fabulous clarinettist and saxophonist Benny Waters, a big name from the Golden Swing Era in the US from 1925 to 1942.  Al Lirvat added bassist René James from Madagascar, the Trinidadian drummer Harold Smith and his elder brother for the vocals, Georgie Smith.  Spurred on by their boss, every night they came out with strong, direct and explosive jazz with nonstop and bewitching swing, inspired by Dixieland, middle jazz and rhythm and blues, going against the West Coast movement which was finding its way in the Rive Gauche basements clubs.  Luckily, a new recording company decided to immortalize these magical moments.  The session was held on 17 February 1955 in the Salle Adyar, 4 Square Rapp in Paris which gave birth to four LPs.  Unfortunately, the firm Thalia Disques, a Urania distributor had financial problems.  Only a few discs were bought in La Cigale, which explains their rareness.  Apart from the performance itself, the cohesion between the musicians and the original nature of Al Lirvat’s arrangements with their dose of classicism and modernity, the recordings portray the musical atmosphere of La Cigale.  They are also unique examples of the talent of Pierre Jean-Louis and Childebert Mourinet, very promising artists but who remained in the background.  Pierre Jean-Louis was a gifted pianist whose music resembled that of Thelonius Monk or Bud Powell.  He had accompanied trumpeter Bill Coleman during his stay in Switzerland in 1953 and had also played with Don Byas.  He passed away in 1972 from alcoholism.  These discs also throw a new light on saxist Benny Waters, a disciple of Coleman Hawkins on the tenor, Sidney Bechet on the soprano (listen to Summertime) and is an incredible virtuoso on the clarinet as we can appreciate in Original Dixieland One-Step. The group continued playing at La Cigale for a year and a half without any change.  In July 1956, Pierre Jean-Louis was replaced by pianist Gaby Laurent.  In September, tenor saxophonist Harry Perret took over from Benny Waters who left on tour.  In April 1957, René James was replaced by Luc Davis.  Then in September 1957 Al Lirvat came out with a totally remodelled band.  Other than its leader on the trombone, it comprised Marcel Louis-Joseph (ts), Emilien Antile (as), Michel Sardaby (p), André Condouant (b) and Guy Duteil (dm).  Al Lirvat led his band until December 1961, with a one month break in February 1959 for a tour in Africa and another from December 1959 to January 1961 to accompany Josephine Baker at Olympia, tour Greece and appear in the movie Paris Blues.  Al Lirvat returned to La Cigale in June 1969 as Benny Waters’ sideman.  He then led a new band as from January 1970 sided by saxophonist Robert Mavounzy from 1970 to the death of the latter in March 1974.  La Cigale closed its doors on 28 September 1975 with a memorable farewell evening.


Al Lirvat
The Guadeloupian trombonist Al Lirvat, who died in June 2007, had a great influence on the evolution of West Indian music through his innovating ideas.  By creating the Biguine Wabap in 1950, he sparked the fusion between Biguine and contemporary jazz.  This album features Al Lirvat on a day which is less known but nevertheless exciting.  Here we may find a pure jazzman, on a part with the top American band leaders.  His adopted father, André Lirvat, left to fight in the trenches and died of his wounds two years after returning to Guadeloupe.  At the age of four, Albert was left to live with his aunt who had married Savinien Léogane, who sold instruments and sheet music in Pointe-à-Pitre.  The couple saw to the boy’s education until he finished his studies.  At a very young age his uncle taught him music and gave him a banjo.  At high school, Albert created an amateur band with his friends called ‘Los Creolitos’.  He began composing tunes, some of which are still popular to this day.  In late December 1935, with his Baccalaureat in philosophy, Albert Lirvat ventured to Paris to study the radio.  He continued to play the guitar and met the Martinique guitarist Pierre Louise (the future father of Eddy Louiss) with whom he recorded two guitar duos in 1939.



Having obtained a diploma as a radio engineer, Albert Lirvat returned to Guadeloupe in August 1939, just before World War 2 broke out.  After six months of military training in Martinique he returned to France in April 1940 for officer training.  He arrived just as the Germans were invading France.  Demobbed in Paris in August 1940, he had no work and no money.  At this point, his friend saxist Félix Valvert persuaded him to learn the trombone in order to join his orchestra.  After a tour on the Mediterranean coast from May to September 1942, Al Lirvat joined the ‘Swing’ band in Paris led by Cameroonian drummer Fredy Jumbo who was playing at ‘La Cigale’.  During Occupation, recordings were made for Polydor and Swing, the label created by Charles Delaunay.  Fredy Jumbo’s West Indian band also gave concerts at the Salle Pleyel and the Ecole Normale de Musique, supervised by the Hot Club de France.  In 1944, the group from La Cigale was led by Martinique drummer Sam Castendet.  Following Liberation, the ‘Jazz en brasserie’ formula was even more popular, particularly appreciated by the new patronage of American soldiers.  In the annual referendum organized by the magazine ‘Jazz Hot’, Al Lirvat came second in the trombone category in 1944 and first in 1945.  In 1946 he left the jazz scene to follow Sam Castendet’s orchestra in dance clubs and West Indian cabarets (Villa d’Este, Pavillon d’Armenonville, Canne à Sucre, etc.)  That year Albert met Marthe Alessandrini, a singer from Corsica and they became the Creole duo known as ‘Martinales y Alberto’.  They remained married until Marthe’s death in August 1979.  They lived in a house in Paris where Al Lirvat was to stay until his death. From 1947 to 1953, Albert Lirvat continued to learn music with lessons given by his mother-in-law, a classical piano teacher.  He studied harmony, composition and orchestration.  After hearing Dizzy Gillespie’s big band in Salle Pleyel in February 1948, he dreamt of modernizing the Beguine genre and in 1950 composed his first ‘Wabap’ beguines.  From 1946 to 1954, Al Lirvat’s discographical activity was intense – traditional beguine with Sam Castendet and Wabap beguine with Robert Mavounzy.  He then returned to jazz and the Cigale band from January 1955 to December 1961, with a one-year break in 1960.  In 1962 he began a long collaboration with Martinique saxophonist and clarinettist Barel Coppet.  In April 1965, back from a tour in the West Indies with Barel Coppet, Al Lirvat created an instrumental and vocal trio ‘Le Trio des Iles’ (guitar, clarinet, percussion) which was billed every night in Parisian cabarets. When Barel Coppet left for Martinique in early 1968, Lirvat again led a band at La Cigale from June 1969 until it closed in September 1975 and he recorded two jazz discs. Aged around sixty, Al Lirvat varied his activities.  He gave lessons, acted on stage, appeared in movies and played in jazz clubs while still composing original titles.  He led the orchestra of La Canne à Sucre from September 1976 to August 1977, participated in West Indian shows and musicals in Paris (Ballets Martiniquais in 1977, L’Ile Heureuse by Ronnie Aul at the Elysée Montmartre and then the Mogador in 1980).  In 1979, Al Lirvat was awarded the trophy of the ‘Maracas d’Or’ for his record ‘Biguine Wabap’, issued by Déesse.  His public appearances then became rarer.  In a trio with José Benjamin and Marcel Dorina, he played in numerous restaurants.  On 15 November 1990, with a band created for the event, he gave an unforgettable concert in the first jazz festival in Pointe-à-Pitre.  In 1992, he was given one of the leading roles in the film Siméon directed by Euzhan Palcy.  In November 1993, Al Lirvat played in a quartet at the ‘Petit Opportun’ in Paris.  His last public appearance on the trombone was in May 1994 at the age of 78 at the Centre Mathis in Paris.  Then, suffering from heart problems and deafness, he put aside his instrument.  But he has not been forgotten.  On 21 October 1997 at the Auditorium des Halles, the Paris Town Hall paid him tribute and awarded him the Médaille de Vermeil.  In May 1998 Al Lirvat was made Chevalier in the Ordre national du Mérite and was honoured by the Guadeloupe SACEM in March 2002.  An album of his last compositions was issued in 2002 by bassist Eric Vinceno.  An exciting documentary about his life was made by Cécile Baquey in 2003 for the television.  Al Lirvat died in the Hôpital Lariboisière in Paris on 30 June 2007 at the age of 91.  He was cremated in a moving ceremony held on 6 July in the Père Lachaise Crematorium.  Al Lirvat left approximately one hundred discs and two hundred titles registered at the SACEM.


Benny Waters
Through his vitality, record-breaking length of career, open approach to the various forms of music he encountered, independence and charisma, Benny Waters stands forward as an atypical saxophonist in the history of jazz.  He was still playing in concerts at the age of 96, two months before his death in 1998.
Benny Waters wrote of his life in his book ‘The Key to a Jazzy Life’, published in 1985.  His anecdotes enable us to retrace the chronological details which were otherwise hazy.  Born on 23 January 1902 in Brighton, a small village in Maryland, US, Benny Waters was the youngest child of seven in a religious and musical family.  His father, mother and three sisters sang at church and his three brothers played several instruments.  At the age of five, Benny found the hidden key to the family organ and taught himself to play.  Having discovered her son’s gift, his sick mother used her last strength in teaching him music.  Benny proved prodigious on the piano and then he learnt the clarinet on an E flat model offered by his elder brother Clarence.  At the age of eight, he began playing in the military music band led by Clarence. In 1910, after his mother’s death, Benny left to live with his aunt in Haverford, near Phila­delphia in Pennsylvania.  She was married to a wealth Black who owned anlarge a large building company.  The cantatrice Marian Anderson often came to dinner at their home.  After two or three years, all Benny’s family came to settle in the Philadelphia region.  Benny played the clarinet in his elder brother’s two orchestras:  the family band ‘The Brother’s Band’ and another comprising some fifteen musicians.  Having mastered the clarinet, Benny Waters put his hand to alto, soprano and tenor saxophones.  The latter was to make him famous.  From 1918 to 1921, he studied at the Philadelphia High School.  After a while spent in Lonnie Polk’s dance band, he joined a true jazz band for the first time – that led by clarinettist Charlie Miller.  He thus debuted as a professional musician.  For three years, he travelled across Pennsylvania, returning three times a week to Philadelphia’s Waldorf Castle.  From 1922 to 1924, having left school, Benny attended Boston’s New England Conservatory.  There he learnt the rudiments, harmony, composition and orchestration.  He earned his keep by giving clarinet lessons.  Among his 70 students was Harry Carney, the future baritone sax with Duke Ellington.  One day, working at Boston’s Lamp’s Club in pianist Tom Whaley’s band, Benny played with Johnny Hodges then aged 16 and fell under the spell of the young genius.  They became friends and for a while played as a duo in one of Boston’s big hotels, both playing alternately the piano and saxophone.  Benny left the Conservatory without a diploma but with solid musical knowledge.  In 1924 he played in various bands in Philadelphia, Atlantic city and then in New York for a 2-week show in the Lafayette Theatre.


Benny Waters developed the style which was to make his name from 1925 to 1932 in the pianist’ Charlie Johnson’s big band.  Having become the band’s arranger since the departure of Benny Carter, he wrote two arrangements each week for two years.  On a part with the best groups from Harlem, Johnson had found worthy musicians such as Jobbo Jabbo Smith, Benny Carter and Sidney from De Paris.  He usually played at New York’s Amall’s Small’s Paradise, returning for summer seasons in Atlantic City.  When the orchestra disbanded in 1932 due to the slump, Benny Waters played with various set-ups:  Stuff Smith in Chicago, Louis Metcalf in New York, etc.  In early 1935 he was hired as the tenor in Fletcher Henderson’s orchestra, replacing Coleman Hawkins.  This period was marked by his alcohol addiction (which lasted until 1969), blackening his reputation.  Six months after his arrival he broke his arm in a fight while drunk and his contract with Fletcher Henderson came to an end.  When he could play once again, in late 1936, Benny Waters was taken on by Charlie Johnson on the alto.  The following year he played for six months as clarinettist in the band led by Alberto Socarras.  From 1938 to 1940 he spent most of his time in the band of trumpeter Hot Lips Page, or in hotels for violinist Norwood Fenner and then for pianist Dave Martin.  He then worked with Claude Hopkins (1940-41), with Hot Lips Page again at Kelly’s Stable and at New York’s Apollo Theater (1941), then he replaced Teddy Buckner with Jimmie Lunceford, playing for a year and a half in New York’s ‘Renaissance Ballroom’ and Los Angeles’ Trianon Ballroom (1942-43).  With his second wife, pianist Lorraine Faulkner, he led his own band for four years (1943-46), first at the ‘Red Mill’ in the Bronx in New York, then in San Diego, California.  For two years (1947-48), Benny Waters was a member of ‘Roy Milton’s Rhythm-and-Blues Band’, first in Los Angeles, then on tour around the USA.  As from 1949 he played the clarinet and soprano in the Dixieland band of trombonist Jimmy Archey at Ryan’s in New York then at the Savoy in Boston. Another landmark in his career was when Jimmy Archey’s band left for Europe in 1952.  After a few concerts in Switzerland, the tour stopped due to bad organization.  The orchestra disbanded.  Jimmy Archey joined pianist Earl Hines who was then in Europe.  The other musicians returned to the US..  But Benny Waters joined the band led by trumpeter Bill Coleman who was then playing at the ‘Chiquito’ in Berne, a well-known club in Switzerland.  Benny and Bill had known each other since 1931 after playing together in Charlie Johnson’s band.  From 1953 to February 1954, Benny Waters participated in a series of concerts with ‘Bill Coleman and his Swing Stars’, touring Switzerland, Germany, Belgium, France, North Africa and stopping off in Paris.


In March 1954 Benny Waters was hired at La Cigale in the band led by trumpeter Jack Butler.  The following year, the band was handed over to Al Lirvat who made this recording session.  In early 195, Benny Waters went on tour with Bill Coleman to Italy.  Back in Paris, he returned to La Cigale with Jack Butler in 1960 and then from 1962 to 1968.  When the latter left in 1969, he led the band.  After a year, in January 1970, Waters wanted his independence and passed his hat to Al Lirvat.  He then only played freelance and as soloist in numerous European jazz festivals.  From 1980 to 1985 he was back in New York for a few concerts.  In the late eighties, Benny Waters teamed up with singer Polya Jordan, a blues and gospel singer. In 1992, he was suffering from a cataract but was otherwise on form despite his age.  Benny Waters returned to New York for an operation, but it did not succeed.  Half blind, he continued playing alone or in a group called ‘The Statesmen of Jazz’.  In 1996 he received the Legion of Honour from the French Ministry of Culture.  In 1997, to celebrate his 95th birthday, he played for three nights running at Manhattan’s Birdland.  On 11 August 1998, shortly after moving to Columbia, Maryland, Benny Waters passed away in hospital, aged 96.


Childebert Mourinet
Childebert Mourinet was born on 26 December 1924 in Trois-Rivières (Guadeloupe).  He was brought up by his father in Basse-Terre.  At the age of seven he began playing the triangle in the family band, also including his grandfather on the drums.  He began playing a home-made drum.  At the age of nine, he was the drummer with clarinettists Auguste Nerplat and Ernest Machares.  When he was seventeen he learnt the trumpet which he put aside a few years later to play the alto saxophone.  Childebert Mourinet boasted a good reputation in Guadeloupe and in 1948 founded the band ‘Lotus Jazz’.  Wanting to pursue his career as a musician he left his island and arrived in Marseilles in 1949.  Shortly after he went to Paris.  For a month, accompanied by a guitarist, he busked in a Creole restaurant Chez Adrienne in the Montparnasse district.  He was hired at the Tambourin in rue Vavin for six months and then at the Plumeau in boulevard Raspail for three months.  One evening at La Roulotte in Rue Pigalle, he heard the saxophonist Robert Mavounzy for the first time.  Blinded by his genius, he decided to reach his standard.  He took music lessons and made fast progress.  In late 1950 Childebert replaced the drummer in the band led by the Martinique trumpeter Joseph Florentiny at La Cigale.  He also played the alto at La Rose Rouge.  In 1951 Childebert replaced Florentiny’s saxist and immediately became a name at La Cigale.  He continued playing there in the band of the Martinique trumpeter Hubert Pontat (1952) then with the American trumpeter Jack Butler (1954-54) and with Al Lirvat (1955-57).  He then played at Jimmy’s (1957-59), La Canne à Sucre in Luis Angel’s orchestra (1959-60) and then at L’Ajoupa, a dance hall in Boulevard Barbès (1961).  He also participated in numerous galas and dances.  In 1961 work was becoming scarce for musicians in Paris so Childebert (aka Chil’ Debeer) left for Belgium with his wife, the singer Luce Mornay who he had met in Paris in 1958.  He lived in Brussels for 7 years where his band played in the main dance halls of the city and thereabouts:  Les Anges Noirs (1961-63), La Dolce Vita (1964), Les Folies Parisiennes (1964-68).  This period was interrupted by a four-month stay in Guadeloupe for the 1966 Carnival when he played in a nightclub, the Zombi.  He cut a few singles for Célini.  However, this episode made him homesick and in 1968 he returned to Guadeloupe for good.  Childebert Mourinet slowly stepped back from music, opened a shop and spent his time in this new activity.  A few years later, he headed a nightclub, Le Geyser in Bouillante.  His last time on stage was in the Art Centre in Pointe-à-Pitre during a jam session in the International Saxophone Festival organized by Germain Cécé in January 1996.  A few days later, on 9 February 1996 he died suddenly in Trois-Rivières, aged 72. 
English adaptation by Laure WRIGHT from the French text of Jean-Pierre MEUNIER
© 2008 FRÉMEAUX & ASSOCIÉS/GROUPE FRÉMEAUX COLOMBINI SAS


History of the French Subsidiary of ‘Urania Records’
On 14 December 1951 the company Thalia Disques SARL was created by businessman Ernest Lederer and a band leader, Jean de Rohozinski.  The headquarters were located at 40 Rue Lauriston, Paris 16th before moving in March 1952 to 3 Rue de Monttessuy, Paris 7th.  The company was for ‘the recording or musical works of art, manufacturing, sales, importation and exportation of discs and phonographic material’.  On 20 May 1952 the Thalia and Urania labels were published in the Official Bulletin for Industrial Ownership.  The company Thalia Disques made several discs itself, issued for the Urania label, including this recording of Al Lirvat.  However, its principal activity was to distribute the classical music of ‘Urania Records’, loca­ted in News York, 40 East 19th Street.  Through a contract signed in East Berlin in November 1952, its representative M. Rissland had acquired from the RDA State Committee for Radio Broadcasting the right to use the ma­gnetic tapes recorded and archived from 1942 to 1945 by the Radio broadcasting departments of the 3rd Reich in Berlin which were in the hands of this RDA committee after being under the control of the German authorities at the end of the war.  We are unaware of the marketing success of Urania records.  However, the company Thalia Disques had some financial problems as from 1955, probably related to the trial in February 1954 when they were accused by the famous German band leader Wilhelm Furtwangler for is­suing, without his knowing, his interpretation of Beethoven’s 3rd Symphony (The EriocaEroica) from tapes made in 1944 for the Berlin radio.  Furtwangler died in November 1954 at the age of 68 but his widow and son pursued the case.  On 4 January 1956 the Civil Tribunal of La Seine demanded Thalia Disques and Urania Records to remove the records from sale and to pay the family one million francs damage and interests, and the decision was confirmed on 13 February 1957 after an appeal.  Bankruptcy was pronounced in April 1964 and the company disappeared in August 1964, when all activity had ceased seven years before.


1. Summertime (George Gershwin) 3’44
2. Give over the cheat (Al Lirvat) 3’11
3. Route 66 (Bobby Troup) 4’42
4. Don’t blame me (Jimmy McHugh) 6’01
5. No work today (Al Lirvat) 3’23
6. It’s wonderful to be in love (Al Lirvat, Benjamin Waters) 4’10
7. I’m in the mood for love (Jimmy McHugh, Dorothy Fields) 6’27
8. Two baboons (J. Colombo) 3’23
9. Blues in the groove (Benjamin Waters) 3’37
10. Yes! The cigal sings again (Al Lirvat, Georgie Smith) 5’36
11. When the saints go marchin’in (Traditionnel) 3’25
12. Original dixieland one-step (Red Nichols) 2’52


CD AL LIRVAT and his Cigal’s Band / Paris 1955 / featuring BENNY WATERS © Frémeaux & Associés (frémeaux, frémaux, frémau, frémaud, frémault, frémo, frémont, fermeaux, fremeaux, fremaux, fremau, fremaud, fremault, fremo, fremont, CD audio, 78 tours, disques anciens, CD à acheter, écouter des vieux enregistrements, albums, rééditions, anthologies ou intégrales sont disponibles sous forme de CD et par téléchargement.)

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